Que le pope soit une des cibles privilégiées de ces Contes, n'est peut-être pas gratuit.
Alexandre Herzen se devait de constater : " Les moujiks méprisent les popes, qui ne sont pour eux qu'êtres fainéants et gens cupides, qui s'emploient à vivre à leurs dépends. Le héros de toutes les obscénités populaires et chansons de rue, l'objet de toutes les moqueries et de tous les sarcasmes, c'est toujours le pope. " Afanassiev, en livrant ce matériau brut, entendait réfuter à l'avance les arguments des détracteurs possibles de ces Contes : " Les littératures des autres peuples offrent beaucoup de contes érotiques du même genre, et depuis bien longtemps déjà nous ont précédés dans cette voie (...) Donc, l'accusation de cynisme grossier adressée au peuple russe équivaudrait à la même accusation adressée à tous les peuples, c'est-à-dire se réduirait à zéro ".
Et d'inviter de vrais chercheurs à aller au fond des choses : " Curieux sous bien des rapports, nos Contes secrets russes sont également remarquables pour une autre raison : au savant fondamental, à l'investigateur en profondeur de l'esprit populaire russe, ils fournissent un vaste champ de comparaison, relativement au contenu, avec les contes du même genre des écrivains étrangers, avec les contes des autres peuples.
Il y a eu une édition en langue française de ces contes, due à la curiosité de Guillaume Apollinaire, mais ces Contes secrets russes furent livré au public français en 1912 et le furent dans un curieux costume.
Les Contes populaires russes constituent l'un des recueils les plus importants de notre patrimoine européen, et l'oeuvre d'Afanassiev, par son rayonnement, est comparable à celle des frères Grimm. Ce deuxième tome est entièrement consacré aux contes merveilleux. On trouvera ici les versions russes de contes célèbres, comme Le Miroir Magique, ou La Fuite magique... Certains de ces textes révèlent une parenté avec tel ou tel chant épique, par exemple avec la Chanson des Niebelungen. D'autres remontent au Somadeva, d'autres encore ont des rapports avec le conte breton ou Les Mille et une Nuits. Episodes et personnages ont tous une forte résonance mythologique. A la fin de ce deuxième tome, on trouvera le même appareil de notes que pour le premier. Par ses diverses activités - historien de la civilisation et de la littérature russes, juriste, ethnographe, folkloriste, critique, journaliste, archiviste, étymologiste, connaissant presque toutes les langues indo-européennes - Afanassiev (1826- 1872) fut, dans le domaine des sciences humaines, l'un des savants les plus admirés de son époque. Lise Gruel-Apert, traductrice, est maître de conférences de civilisation et linguistique russes à L'université de Rennes-II. Elle a publié plusieurs ouvrages, dont La Russie traditionnelle, côté femmes, aux Editions Imago (2007).
Les Contes populaires russes sont l'un des recueils de contes les plus importants de l'Europe du XIXe siècle. L'oeuvre d'Afanassiev (1826-1872) est par son importance comparable à celle des frères Grimm.
En 1850, Afanassiev commence à penser à un recueil de contes, genre fort rare à l'époque, et s'adresse à des collecteurs indivividuels : la tradition orale paysanne russe, au moment où il la fixe dans l'écrit, est d'une très grande richesse. Edité aussi bien sous le régime tsariste que sous le régime soviétique, son recueil n'a cessé de jouir d'une grande renommée.
Les Contes populaires russes ont servi de base aux célèbres études de Propp sur le conte merveilleux, et nombre d'artistes tels Pouchkine, Gogol, Tolstoï, Prokofiev, Chagall s'y réfèrent explicitement. Tous les grands contes-types y figurent. Plus rassembleur que rédacteur de contes, Afanassiev fut d'une extrême modernité dans sa démarche.
La présente publication comportera trois tomes et reprendra l'ensemble des contes publiés dans les précédentes éditions françaises (Maisonneuve et Larose). Chaque tome contiendra, en outre, des contes inédits jusqu'alors en français et des notes de présentation. Ce premier tome se divise pour moitié entre contes merveilleux et contes d'animaux.