Expose les aspirations des artistes du Land Art, qui tentent de forger une nouvelle image de la nature, et les regroupe selon l'idée génératrice de leur travail : la réflexion sur l'espace, le corps comme outil, la rêverie fusionnelle, l'expérience du temps ou la sculpture. Suivent dix études consacrées à des artistes représentatifs.
Le projet qu'Érik Samakh a créé au Domaine de Trévarez part de ce constat : le château est aujourd'hui devenu malgré lui une maison à chauve-souris, une batbox. Une première installation au rez-de-chaussée des écuries joue avec notre perception : une obscurité, une odeur de sous-bois, un son spatialisé diffusant les cris des chauves-souris, ainsi que leurs battements d'ailes donnent la sensation que les animaux volent au-dessus des têtes.
Le leurre, présent dans le travail d'Érik Samakh, renvoie à l'image de l'artiste, chasseur-cueilleur. Alliant l'archaïque et une haute technicité, le travail de Samakh s'intéresse davantage aux relations entre les choses qu'aux choses elles-mêmes. Ici il s'agit bien de mettre en évidence un certain renversement de l'ordre « naturel », où l'animal a profité d'une vacance et d'une mesure de protection.
Patrick Neu travaille le cristal, la mie de pain, le plomb, la coquille d'oeuf ou la cire d'abeille, dessine à l'encre de Chine sur des ailes de papillon, peint à la gouache sur des papiers carbonisés, grave des verres en cristal à la pointe de la plume dans le noir de fumée. Autant d'exercices de « funambulisme sculptural » mêlant modestie et maîtrise technique, patience et minutie. Ce sont des heures, des mois, des années qu'il encapsule ainsi dans ses oeuvres, avec lesquelles il entretient une proximité de longue durée. Méthodiquement, méticuleusement, patiemment, il confectionne une camisole de force à partir de milliers d'ailes d'abeilles assemblées avec une précision chirurgicale au vernis à ongles, ou réalise une armure de samouraï en cristal, tisse un voile en cheveux naturels... L'artiste oppose la fragilité des matériaux à la force que représentent les objets pour interroger l'im- permanence et la fragilité de la vie. Bénitiers, chasubles, marionnettes d'ombres de Bali et d'Indonésie revisités... autant de réminiscences délicates de l'histoire de l'art qui offrent une lecture contemporaine de notre culture artistique classique.
Victoria Klotz développe depuis la fin des années 1990 une création singulière, plutôt marginale dans le champ de l'art contemporain : esthétiser notre rapport à l'animal et à la nature.
Pas ici de culte du médium : les options plastiques sont diverses, entre sculpture et installation, photographie et intervention. Importe avant tout, pour cette amoureuse du milieu naturel, la mise en oeuvre, par des voies plasticiennes diverses, d'une divergence de vue par rapport à la manière dont le sens commun perçoit la « nature ». L'artiste, volontiers, se présente comme « la fille du chasseur », comme quelqu'un qui appartient à un temps et un espace où la peur de la nature n'avait pas fait son chemin.
Pour son installation créée au sein du parc de l'Abbaye de Daoulas, Victoria Klotz s'est inspirée du bestiaire présent dans l'iconographie de Daoulas : le cerf de saint Thélo, l'âne et le loup de saint Hervé. L'intervention de l'artiste prend place en contrebas du parc, dans le périmètre d'une parcelle close par une palissade en bois. L'oeuvre fait référence au jardin d'Éden, à la fois lieu de désobéissance, mais aussi milieu fermé et protégé, telle une réserve naturelle où l'homme irresponsable agit comme un enfant. Le visiteur est invité à venir observer ce huis-clos de différents points de vue au travers d'oeilletons percés dans la palissade.