Il n'est guère de poésie qui se libère de l'expérience de la vie, qui ne s'ancre dans le quotidien des gestes, des mots, des regards, dans la présence et la proximité de l'autre, des autres. Il n'est guère non plus de poésie qui ne soit pudique ; ne serait-ce que parce que tout mettre tel que sur le papier ne parvient, à de rares exceptions près, qu'à un appauvrissement et une exténuation. Jacques Allemand, dans ce dernier de ses recueils a su trouver le point d'équilibre entre la familiarité pleine de vie et l'art d'en faire surgir dans les mots la délicatesse du ressenti intime. Ces poèmes se lisent et relisent, et chaque lecture approche d'une vision d'ensemble, simple, lumineuse, tendre, attentive et discrète, toujours mobile.
On écrit toujours au croisement des sensations, des pensées, des temps, des désirs ou des regrets, des souvenirs autant que des oublis ; le poème est au coeur de multiples croisements et entrelacs qui sont la matière intime et jamais achevée de celui qui parle. Ainsi en est-il de ce recueil dont chaque poème, chaque vers est un fil de l'écheveau recommencé de l'existence.