Ce livre explore un pan de l'imaginaire occidental.
Le diable traditionnel n'en est pas le centre unique, car les métamorphoses de la figure du Mal indiquent aussi la façon dont les hommes conçoivent leur destin personnel et l'avenir de leur civilisation. Etroitement imbriquées, l'histoire du corps, celle de la culture, celle du lien social, fournissent les lignes de force d'une enquête qui embrasse le deuxième millénaire de l'ère chrétienne. Tout commence avec l'affirmation de Satan sur la scène européenne, à partir du XIIe siècle, sous la double forme du terrible souverain luciférien régnant sur une immense armée démoniaque, et de la bête immonde lovée dans les entrailles du pécheur.
Trois chapitres interrogent ensuite l'énigme de la chasse aux sorcières des XVIe et XVIIe siècles. L'époque des Lumières voit le crépuscule du diable, tant à cause de l'accentuation d'un processus d'intériorisation du Mal que de l'invention du fantastique en littérature. Une vigoureuse accélération de ces mouvements marque les XIXe et XXe siècles. L'avant-dernier chapitre traque les métamorphoses subtiles du démon intérieur, compagnon d'un sujet occidental de plus en plus libéré de la peur de Satan mais convié à se méfier de lui-même et de ses pulsions.
Le dernier revisite l'imaginaire diabolique actuel à travers l'exorcisme, la vogue du surnaturel, le cinéma, la BD, la publicité, les rumeurs urbaines, en distinguant un courant ironique à la française d'une vision tragique et maléfique dominante aux Etats-Unis.
L'orgasme est-il soluble dans l'histoire ? Émotion individuelle quasi incommunicable mais aussi réalité culturelle, il appartient et tout à la fois échappe à l'expérience collective. L'histoire de l'orgasme est celle du corps caché, des désirs interdits, de la chair corsetée par les tabous et les morales.
Enfouis dans les tréfonds des archives et des bibliothèques, les documents concernant cette vie physique, parfois libertine, n'en sont pas moins extraordinairement abondants et d'une surprenante force d'évocation. Le livre de Robert Muchembled exhume des sources fascinantes qui invitent à regarder d'un oeil neuf un passé souvent figé par de vertueuses sélections, pour découvrir « l'envers du décor » et réaliser que la sublimation des pulsions érotiques, bien au-delà du simple ascétisme religieux, a sans doute été le moteur caché du dynamisme de l'Occident jusqu'aux années 1960.
En matière de volupté, Angleterre et France ont suivi des chemins parallèles et les États-Unis conservent la profonde empreinte de ce modèle répressif commun, récemment abandonné par l'Europe hédoniste au profit d'une sexualité plastique dont les femmes sont les principales bénéficiaires. Libérées par la pilule des dangers et des angoisses liées aux obligations de reproduction, elles peuvent désormais réclamer l'égalité avec les hommes et rechercher sans complexe ce plaisir qu'on dit charnel...
La violence ne cesse de décroître depuis le XIIIe siècle. Bien plus présente dans le Sud que dans le Nord, elle concerne essentiellement les jeunes mâles âgés de 20 à 30 ans, et assez peu les femmes. À travers ce long parcours de la fin du Moyen Âge à nos jours, Robert Muchembled propose des clefs pour comprendre cette brutalité massivement masculine et juvénile : comment s'exprime-telle ? Comment le Vieux Continent parvient-il à la contrôler, à la sublimer ? Pourquoi cette baisse incontestable de l'agressivité (en dehors des guerres, qui relèvent, pour leur part, d'une autre analyse) ? L'une des principales explications est à rechercher dans la promotion voire l'invention de la notion masculine d'honneur, associée à un mouvement général de « civilisation des moeurs » et à une éducation coercitive des adolescents et des mâles célibataires. Un système de règles, de codes de politesse se met en place, principalement autour des années 1650, pour dévaloriser les affrontements armés, les duels, le recours à la vengeance personnelle et la dureté des relations. Mais on observe aujourd'hui une nette inflexion dans ces tendances multiséculaires : les premières années du XXIe siècle semblent inaugurer le retour d'une nouvelle violence avec le problème dit des « jeunes de banlieues », qu'on peut lire comme une sorte de retour du refoulé, comme un processus conduisant à une « décivilisation » des moeurs. L'homme serait-il en train de redevenir un loup pour l'homme ?
Inspecteur de police d'une rare intelligence, escroc aventurier de haut vol, Jean-Baptiste Meusnier fut assassiné en 1757. En retraçant la vie fascinante et aventureuse de ce policier du XVIIIe siècle, Robert Muchembled plonge dans les recoins les plus obscurs du siècle des Lumières.Derrière Meusnier, c'est tout le monde trouble de la police qu'il fait ressurgir, pointant les contradictions, les corruptions et les travers d'une profession saignée par l'achat de ses charges et contrainte, pour survivre, de mettre son talent à son propre service et non à celui du royaume. Entre sexe, argent et pouvoir, la police préfère jouer du pourrissement du régime monarchique plutôt que le servir - et contribue ainsi à précipiter les bouleversements de 1789.Ainsi, ce que Robert Muchembled montre, c'est que les causes de la Révolution française ne résident pas plus dans la désacralisation de la personne royale sous Louis XVI que dans la constitution d'un " espace public ", mais bien dans un lent pourrissement sur pied du régime - dont la police a sa part.
Né des peurs et des angoisses des hommes, le Diable n'est pas une simple notion philosophique ou théologique.
Il est ce qui organise les rapports des individus au pouvoir, il est le Mal qui hante l'esprit et permet de discipliner les corps. Lorsqu'aux XVIe et XVIIe siècles l'Europe allume ses milliers de bûchers de sorcières, c'est la femme et la sexualité qui deviennent alors les objets du Malin, et c'est une terrifiante guerre des sexes qui prend naissance, sans que notre millénaire soit encore parvenu à une pacification.
Car la modernité n'échappe pas à l'influence du démon, même si c'est désormais l'homme, et non cet être cornu et boiteux des légendes, qui est habité par le Mal et animé de pulsions démoniaques. Dans sa course au bonheur, notre époque semble avoir oublié le Diable et se rire de ses ouvres et de ses pompes. Mais la réalité est autre : au cinéma, à la télévision, sur le Net, le vieux thème de la bête intérieure et maléfique ne cesse de resurgir.
Si l'Enfer, c'est les autres, suis-je moi-même Dieu ou démon ? Cet ouvrage explore, au travers d'une iconographie saisissante, le réseau des représentations et des métamorphoses du Malin, de son invention au XIIe siècle jusqu'à ses ultimes visages dans l'ère contemporaine. L'image, analysée avec minutie et brio par Robert Muchembled, spécialiste de l'histoire de la sorcellerie, n'est pas décorative : elle est ce qui donne vie aux peurs et aux angoisses, chair et corps aux figures du démon.