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eléonore lépinard
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Féminisme : mot explosif, chargé de batailles, d'identifications et de contradictions. Mot d'importance donc pour la collection Le mot est faible, dont la professeure en études de genre Éléonore Lépinard s'empare ici avec brio pour le recharger d'une exigence toujours renouvelée de penser ses propres contradictions et de réinventer de nouvelles pratiques d'émancipation.
Si le mot " féminisme " est explosif, c'est qu'il serait pour certain·es porteur d'excès, d'une demande d'égalité risquant de renverser l'ordre établi, d'un désir d'imposer de nouvelles identités ou de prescrire un nouveau langage. Le féminisme brûle en effet : des " pétroleuses " incendiaires de la Commune de Paris, aux soutiens-gorges que les féministes du Mouvement de libération des femmes auraient brûlés, ces mythes tenaces associent dans notre imaginaire collectif les féministes avec un feu ravageur. L'incandescence de ce mot est aujourd'hui ravivée, à coups de hashtags, de témoignages et de colères rendues publiques, de manifestations et de chorégraphies à dimension planétaire.
Il y a aussi danger quand certain·es voudraient non pas s'opposer au féminisme et à ses demandes, mais au contraire se l'approprier, en donner une définition commune et légitime pour toutes celles et ceux qui voudraient se revendiquer de ce projet politique. Les luttes pour imposer ce que devrait être le " vrai " féminisme, sont aussi chargées d'affects, d'histoires et de conflits. Les rassemblements de toutes, #NousToutes, contrastent avec les conflits et colères, les #NousAussi clamés par les exclu·e·x·s d'un discours qui se veut universaliste mais qui ne manquerait pas de toujours ériger des frontières, des clôtures autour d'un " bon " féminisme, accessible à certaines et pas à d'autres.
Il faut dire qu'avec les féminismes revendiqués de Beyoncé, de Sheryl Sandberg, de Chimamenda Ngozi Adichie, d'Élisabeth Badinter, d'Annie Ernaux, d'Amandine Gay, d'Adèle Haenel... ou d'Emmanuel Macron, on dispose d'autant de versions, contradictoires, opposées, oxymoriques ou alliées à explorer. La tendance à qualifier le féminisme indique que ces versions semblent pouvoir se multiplier à l'infini : business feminism, féminisme radical, féminisme néolibéral, féminisme matérialiste, afro-féminisme, transféminisme, féminisme queer, écoféminisme... Devant cette avalanche de tendances on peut se demander si le mot a vraiment encore un sens, s'il peut désigner un projet commun dont les contours seraient identifiables. Comment un mouvement qui semble s'énoncer au nom d'un sujet qui a l'apparence de l'évidence, les femmes, peut-il s'avérer si protéiforme ? Comment peut-il être étiré jusqu'aux limites de ses possibilités et de son histoire puisqu'il devient revendiqué par des fractions de ceux-là même qui l'ont tant combattu, les idéologies de droite voire d'extrême droite ? Y a-t-il encore un dénominateur commun ? Le féminisme est-il voué à l'éclatement et la récupération ou peut-il continuer de nourrir nos imaginaires, nos désirs, nos luttes et nos vies ?
L'autrice défend ici brillamment que ces luttes et ces conflits sont essentiels au féminisme, au sens où ils en constituent l'essence même et sont aussi essentiels à sa dynamique propre. Pour autant, accepter l'importance de ces conflits n'est pas céder au relativisme : toutes les versions du féminisme ne sont pas bonnes à adopter ou équivalentes. Loin de là. Le féminisme porte une exigence toujours renouvelée de penser ses contradictions, de répondre à celles qui en contestent les frontières, de réinventer de nouvelles pratiques d'émancipation. -
Non le concept d'intersectionnalité ne représente pas un danger pour la société ou l'université, ni ne fait disparaître la classe au profit de la race ou du genre. Bien au contraire, cet outil d'analyse est porteur d'une exigence, tant conceptuelle que politique. Une synthèse nécessaire, riche et argumentée, pour comprendre de quoi on parle Les attaques contre les sciences sociales se font de plus en plus nombreuses. À travers elles, ce sont certains travaux critiques qui sont particulièrement visés, notamment ceux portant sur les discriminations raciales, les études de genre et l'intersectionnalité.
À partir d'un article de 2019, devenu référence et paru dans la revue Mouvements, entièrement revu et actualisé, voici, pour toutes et tous, une synthèse salutaire et nécessaire sur ce qu'est réellement la notion d'intersectionnalité. Les autrices, sociologues, s'attachent d'abord à rappeler l'histoire du concept élaboré il y a plus de trente ans par des théoriciennes féministes de couleur pour désigner et appréhender les processus d'imbrication et de co-construction de différents rapports de pouvoir - en particulier la classe, la race et le genre. Il s'agit ensuite de s'interroger sur les résistances, les " peurs ", les discours déformants et autres instrumentalisations politiques que l'intersectionnalité suscite particulièrement en France. Mais justement, défendre les approches intersectionnelles, n'est-ce pas prendre en compte, de manière plus juste, les expériences sociales multiples et complexes vécues par les individu·es, et donc se donner les moyens de penser une véritable transformation sociale ?
Pour l'intersectionnalité : " Qui nos institutions académiques accueillent-elles et quels savoirs valorisent-elles et font-elles éclore sont donc deux questions indissociables. Et ce n'est qu'en tentant d'y répondre et en donnant toute sa place à des travaux potentiellement porteurs de transformation sociale pour les groupes marginalisés que l'enseignement supérieur et la recherche pourront continuer de jouer un rôle politique et social en France, car elles produiront une recherche scientifique qui renouvelle notre compréhension du monde social et le donne à voir dans sa complexité. " Éléonore Lépinard et Sarah Mazouz. -
Les théories en études de genre
Eléonore Lépinard, Marylène Lieber
- La Decouverte
- Reperes Decouverte
- 11 Juin 2020
- 9782348046223
Qu'est-ce que le genre ? Comment a-t-il été conceptualisé ? Est-il défini de la même façon chez les anthropologues, les sociologues, les philosophes, les historiennes et les tenantes des cultural studies ? Quelles ruptures épistémologiques ce concept a-t-il provoquées ?
Cet ouvrage retrace les différentes généalogies de la notion de genre et les débats théoriques qu'elle a suscités. Il présente la variété des perspectives et des développements produits par plus de cinquante ans de recherches sur le genre et les sexualités, tant en termes de savoirs et de connaissances qu'en termes de reconnaissance et de résistance.
Ce livre a pour ambition de familiariser les lectrices et les lecteurs avec les approches majeures des études de genre, dont certaines sont moins connues dans le contexte francophone. Il met également l'accent sur l'imbrication du genre avec d'autres rapports sociaux, au coeur de nombreux développements théoriques, autant hier qu'aujourd'hui. -
L' Genre et islamophobie : Discriminations, préjugés et représentations en Europe
Eléonore Lépinard
- Ens Lyon
- 6 Mai 2021
- 9791036202940
Premier ouvrage proposant une étude des aspects genrés de l'islamophobie en France, en Suisse et en Belgique, ce livre réunit des contributions issues de la sociologie et de la psychologie sociale. Il analyse les processus par lesquels discriminations et préjugés anti-musulman.es sont élaborés et relayés, aussi bien par des acteur.rices institutionnel.les que par les citoyen.nes, et les façons dont celles et ceux qu'ils visent y résistent.
Le genre est omniprésent dans les débats sur l'islam et l'intégration des musulman.es dans les pays européens, tant concernant les formes de voile islamique que les législations pour les interdire. Il est ainsi au coeur du développement de cette forme spécifique de racisme et de racialisation qu'est l'islamophobie.
Comment l'islamophobie peut-elle être identifiée dans des discours publics et médiatiques genrés ? Comment est-elle relayée dans des discours ordinaires attribuant aux hommes musulmans un sexisme et un patriarcat spécifiques ? Quelles sont les discriminations subies par les femmes musulmanes, voilées ou non, et en quoi diffèrent-elles de celles subies par les hommes musulmans ? Telles sont les questions auxquelles cet ouvrage se propose de répondre, par une approche rigoureuse et documentée. -
L'intersectionnalité ; enjeux théoriques et politiques
Farinaz Fassa, Eléonore Lépinard, Marta Roca i escoda, Collectif
- DISPUTE
- 28 Novembre 2016
- 9782843032820
L'intersectionnalité est devenue en quelques années un concept incontournable, aussi bien en sciences sociales qu'au sein des luttes sociales, en particulier féministes. Forgée pour penser l'imbrication des rapports de domination, l'intersectionnalité constitue aujourd'hui un champ d'études et d'expérimentations théoriques foisonnant. Pour la première fois en France, des universitaires abordent ses multiples dimensions épistémologiques, théoriques et politiques , et les recherches récentes qu'elle a permis d'ouvrir dans des espaces aussi différents que la France, l'Amérique latine ou l'Europe de l'Est. Que peut nous offrir cette notion pour penser le genre, la théorie féministe et les mobilisations sociales aujourd'hui ? Comment contribuer à promouvoir un usage de l'intersectionnalité qui renforce son potentiel critique et « insurgé », plutôt que figé sur des identités ? Réunissant des contributions qui s'appuient sur des enquêtes empiriques, cet ouvrage donne à voir la force d'un tel outil lorsqu'il s'agit d'éclairer des processus sociaux et politiques complexes. En offrant un regard à la fois rétrospectif et contemporain sur les enjeux politiques de la production d'un savoir intersectionnel, il a aussi pour ambition de montrer que l'intersectionnalité n'est pas seulement un agencement de critique théorique indispensable, mais aussi une plateforme à partir de laquelle construire des sujets politiques collectifs nécessaires au projet d'émancipation féministe.
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Dissemblances : jeux et enjeux du genre
Rose Marie Lagrave, Agathe Gestin, Eléonore Lépinard, Geneviève Pruvost
- L'Harmattan
- Bibliotheque Du Feminisme
- 1 Janvier 2002
- 9782747528986
Une réflexion consacrée aux constructions des sexes et des sexualités : la société aujourd'hui peut-elle accepter que le biologique, l'identité sexuelle et l'identité de genre puissent être déconnectés ? A travers divers « dispositifs de sexualité », à partir de données historiques, anthropologiques et sociologiques, cet ouvrage s'attache à décrire la pluralité des registres d'actualisation des genres, tout en soulignant la fécondité d'un concept qui permet de mettre au jour les incessantes liaisons entre genre et sexe biologique.
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L'égalité introuvable ; la parité, les féministes et la République
Eléonore Lépinard
- PRESSES DE SCIENCES PO
- Academique
- 8 Février 2007
- 9782724610130
On a cru en France que l'idée de parité, en proposant une nouvelle conception de l'égalité, permettrait d'en finir avec l'exclusion politique des femmes.
D'abord simple espoir de femmes politiques ou de militantes féministes, la parité est aujourd'hui un remède unanimement accepté par la classe politique pour rénover une représentation démocratique et des institutions républicaines en crise. Pourtant, l'égalité peine toujours à se traduire dans les faits. Est-ce le signe d'un manque de volonté politique dans l'application d'une réforme par ailleurs bien pensée ou doit-on s'interroger sur les limites du concept de parité ? En analysant les termes qui ont successivement été utilisés pour définir et légitimer la parité, l'ouvrage démontre comment cette conceptualisation de l'égalité des sexes a abouti à la subversion des objectifs radicaux des débuts.
Conjuguant la science politique, les études sur le genre et la sociologie du droit, l'auteur analyse les facteurs qui ont transformé la revendication paritaire, des tribunes internationales à l'espace public militant et médiatique français. En expliquant les raisons de l'échec relatif de cette réforme, ce livre permet de comprendre les défis posés par la parité au modèle républicain, et par là même d'amorcer une réflexion sur ceux que soulèvent les autres minorités.
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Nouvelles questions fémnisites : morales sexuelles
Marta Roca iescoda, Anne-françoise Praz, Eléonore Lépinard
- Antipodes Suisse
- Nouvelles Questions Femnisites
- 28 Juin 2016
- 9782889011193
Ce numéro traite des luttes féministes autour des reconfigurations d'une "morale sexuelle contemporaine" qui s'efforce, au-delà des normes religieuses traditionnelles, de définir les comportements convenables, acceptables, légitimes, valorisés, ou au contraire répréhensibles ou stigmatisés. À travers des objets divers comme la contraception, la prostitution, la SlutWalk, le consentement des patientes en gynécologie, la régulation des naissances dans le mariage catholique, ce numéro analyse comment les divers discours féministes proposent des normes sexuelles alternatives pour réguler les sexualités. Les études de cas abordent des mobilisations anciennes et nouvelles, intra et extra-européennes.