Jamais, peut-être, socrate ne fut aussi tranquille qu'en cette journée particulière qui s'achève par un arrêt de mort .
Le procès, banal par certains côtés (ce n'est ni la première ni la dernière fois que l'on aura la peau d'un homme libre), a pour nous valeur de symbole. il est l'un des événements fondateurs de notre identité intellectuelle : il décidera de la vocation philosophique de platon. l'histoire de la pensée occidentale porte la marque de cette césure : il y a l'avant et l'après socrate. chaque fois qu'une communauté tente, par la censure, l'ostracisme ou le meurtre, de réduire au silence un étranger moral ou intellec tuel à l'intérieur de ses murs, de bâillonner ou d'effacer ses interrogations intolérables, elle vit une heure socratique.
" (george steiner).
En 1943, François-René Daillie rencontre Maurice Betz, l'un des grands traducteurs de Rilke, et entreprend lui-même ses premières traductions du poète. C'est en 1948 qu'il s'engage dans la traduction des Elégies...
Voici donc le résultat de cinquante années de travail et de perfectionnements. Les dix Élégies n'ont jamais, à notre avis, atteint cette force poétique en version française. C'est à une lecture réellement nouvelle de ce chef-d'oeuvre que nous convie ce livre.
Les deux fils d'oedipe, Etéocle et Polynice, se sont entre-tués au combat. Leur oncle Créon, le roi de Thèbes, décide que le cadavre de Polynice - qui a trahi sa patrie - demeurera exposé sans sépulture. La jeune Antigone, sa soeur, viole volontairement le décret : elle est arrêtée, et récidive. Pour elle, les lois immuables de la conscience, les "lois non écrites", se situent au-dessus des décrets des hommes. Antigone est celle qui désobéit, celle qui dit non, celle qui va au-devant de la mort.
Qu'adviendrait-il des hommes si, un jour, les femmes s'emparaient du pouvoir ? les athéniens du vème siècle n'hésitaient pas à répondre : la mort.
C'est ce fantasme, ce cauchemar qu'aristophane met en scène dans lysistrata. pour sauver athènes et toute la grèce, les femmes décident de dire non à la guerre. quel moyen plus ingénieux pour convaincre leurs maris que la grève du sexe et la prise de l'acropole ? auparavant soumises au désir et à l'autorité de leurs époux, les femmes d'athènes luttent maintenant pour restaurer les vraies valeurs du mariage civique, seul garant de la pérennité de la cité.
Dans ce carnaval qu'est la comédie ancienne, les hommes cèdent : ils font la paix pour faire l'amour et pour se réapproprier le politique qui, le temps d'une pièce de théâtre, était l'affaire des femmes.
Le de amicitia, l'un des derniers traités de cicéron, s'inscrit dans une tradition de réflexion dont il ne nous reste avant lui que les témoignages de platon et d'aristote.
Mais cicéron, comme dans ses autres ouvrages, écrit pour son temps : au lendemain de l'assassinat de césar, il définit l'amitié à la fois d'après les concepts grecs et en fonction des conditions sociales et politiques de la vie romaine, avec l'intention d'en faire le fondement d'une renaissance de l'esprit républicain.
Cette alliance de la tradition romaine aux principes de sagesse grecs forme le coeur de l'humanisme cicéronien dont s'inspirera notre culture classique.
Manifesto per un nuovo teatro paraît dans le numéro 9, janvier-mars 1968, de la fameuse revue romaine Nuovi Argomenti (revue littéraire trimestrielle dirigée par Alberto Carocci, Alberto Moravia, Pier Paolo Pasolini).
Manifeste programmatique pour un théâtre de Parole, ce texte est une déclaration extrême et extrémiste du plus excessif des écrivains italiens du XXe siècle. Une déclaration de guerre à la culture bourgeoise par la critique de la notion de culture et de bourgeoisie. Cela est possible grâce à une lutte littéraire et politique qui se passe au théâtre - un nouveau théâtre - le théâtre de la Parole. Toute la force nécessaire pour cette critique radicale est à chercher dans la puissance de la parole c'est-à-dire dans le poème. On retrouve ici un concept majeur de la pensée de Pasolini (présent dans toutes ses oeuvres, qu'elles soient cinématographiques, littéraires, critiques...) : l'action de la parole est maximale quand la parole est écrite dans la langue de la poésie, c'est-à-dire quand toutes ses propriétés et possibilités, sont engagées pour réinventer le langage et l'humain.
Ce manifeste est donc un texte littéraire, politique, théorique & pratique, de critique théâtrale mais surtout de critique sociale.
En 43 points, sur moins de trente pages, Pasolini lance un défi à tous et à chacun, mais spécialement aux intellectuels (de métier ou dilettantes), un défi qui est toujours terriblement d'actualité.
De Pline, Buffon écrit avec admiration, au fronton de sa propre histoire naturelle, qu'il « a travaillé sur un plan bien plus grand que celui d'Aristote : il a voulu tout embrasser, et il semble avoir mesuré la nature et l'avoir trouvée trop petite encore pour l'étendue de son esprit ». Le monumental livre de Pline n'est pas seulement l'un des documents les plus précieux que l'Antiquité nous ait laissés, il est surtout le signe d'une érudition bien singulière dans un tempérament parfaitement original. Nous ne saurons jamais avec certitude ce qui motiva cet homme de guerre et d'État à l'écriture d'une oeuvre dont l'esprit se pose au contraire de ce qui semble devoir constituer sa situation. Et l'on ne cessera jamais non plus de s'émerveiller face à l'étrangeté d'un livre qui non seulement recueille si vastement la totalité, traitant d'astronomie, de physique, de géographie, d'agriculture, de commerce, de médecine, d'histoire, de minéralogie, de botanique, d'art, de théologie ou de philosophie, mais également pose sur l'univers qu'il a rendu visible un regard de satiété dont ressort constamment la conclusion que les dieux sont pauvres et que cette totalité où ils habitent ne suffit pas.
L'émerveillement sincère devant tant d'objets, d'animaux, de parfums, de pierreries, de faits d'armes, de pays, de coutumes, de doctrines, de cultures et de cultes s'accompagne chez Pline d'une autre sincérité : celle d'une conscience d'homme ressentant la capacité du mystérieux recul dans lequel elle envisage la totalité et ses parties, s'y impliquant ou, précisément, bâtissant dans la neutralité l'encyclopédie du monde. Derrière l'entreprise gigantesque de Pline ressort non pas seulement la singulière richesse d'un contenu, mais la pensée qui s'en est détachée.
Au I er siècle de notre ère, Pline vient à la fois offrir la plus belle des encyclopédies R il reste aujourd'hui le seul auteur à rapporter certains phénomènes ou à constituer la source de nombreux faits R et donner expression à la conscience qu'elle ne se réduit pas à la totalité, si vaste soit-elle. L'Histoire naturelle est ce livre étrange et magistral qui dit d'un seul geste le contenu du savoir dans la condition de l'homme : tenant au creux de sa main l'univers entier qu'il transmet à tous, il est traversé en même temps par un souffle marginal, en qui est ressentie la preuve que son écriture n'est possible que si l'esprit est étranger à ce monde rempli d'étrangetés. C'est ainsi depuis un regard jeté du haut de sa condition que, dans cette oeuvre odysséenne, le lecteur assiste à l'éclosion de chaque détail du monde au sein de l'histoire d'homme.
Durant cinq années, Le port a jauni a publié un recueil de roubaiyat par an. Les ROUBAIYAT sont des quatrains, comme l'indique leur nom issu du chiffre "arbaa", quatre. Genre poétique perse et arabe qui remonte au XIe siècle avec l'oeuvre d'Omar Khayyam, les roubaiyat ont été le terrain de jeu de poètes égyptiens des années 1960-70, qui ont revisité le genre avec humour et truculence linguistique en arabe contemporain dialectal.
Ces quatrains sont une méditation sur la vie, la mort, la joie, le temps qui passe, l'innocence, l'absurdité du monde, son origine, sa cruauté : ils posent un regard et s'attardent sur des instants fugaces, des détails, des petites choses qui disent le monde entier. Durant trois années, Christian Tortel a envoyé au Port a jauni un haïku par mois. Les HAÏKUS sont des poèmes des tercets qui relèvent de la tradition japonaise.
Mais Christian Tortel les écrit en français ou en arabe, et les traduit dans l'autre langue. Ainsi, une fois par mois, se posait dans la boîte à mails du Port a jauni un poème sur des instants fugaces, des détails, des petites choses qui disent le monde entier. A force de fréquenter ces deux chemins parallèles, roubaiyat et haïkus en arabe, il nous est apparu évident de les croiser. Et dans un grand tissage des genres poétiques, les THOULATHIYAT (prononcez "soulassiyate") sont nées.
Elles sont des haïkus ou des tercets, comme l'indique leur nom issu du chiffre "thalatha", trois. Elles sont autant de méditation sur la vie, la mort, le temps qui passe, les mots sans frontière. Elles relient le monde arabe à l'Asie, la France au monde arabe, les langues entre elles, elles racontent, en creux, les tissages possibles en poésie. Un nouveau terrain de jeu qui réinterprète et on l'espère, revitalise, le champ poétique en bilingue, à la fois hommage aux genres anciens et clin d'oeil humoristique pour une création contemporaine.
Edité par cicéron, ce poème est l'exposé le mieux formulé des courants matérialistes de l'antiquité.
Lucrèce présente le système d'epicure, mais aussi, sans doute, une large part de la philosophie de démocrite dont aucun texte ne nous est parvenu. critique de la religion et des superstitions, cosmologie atomistique et naturaliste, sensualisme radical, ébauche d'une théorie évolutionniste, le matérialisme de lucrèce entend mettre en avant la liberté humaine affranchie de toutes les entraves au plaisir, considéré comme bien suprême et critère de nos actions.
Cette philosophie qui prétend aussi, à l'indifférence totale de la nature à l'égard du destin humain n'est pas sans échos aujourd'hui : la mort de l'homme, le relativisme, l'eudémonisme individualiste. ce matérialisme a préfiguré également la cosmologie scientiste du xixe siècle à travers des formules désormais célèbres : " rien ne surgit du néant, rien ne se perd, la somme des mouvements est constante dans la nature.
".
La Théogonie est le chant qu'élève en l'honneur des dieux Immortels un poète béotien inspiré par les Muses. Dans ce poème d'époque archaïque, Hésiode célèbre l'ordre divin du monde en racontant la formation de l'univers, la succession des générations divines et la répartition des honneurs parmi les dieux. L'histoire de la famille divine aboutit ainsi à la mise en place de l'ordre éternel de Zeus. Naissances, unions, conflits, alliances et combats dessinent une carte des puissances divines actives dans le monde. Ce processus théogonique attribue à chaque élément du cosmos, aux dieux immortels ainsi qu'aux hommes mortels, les prérogatives et la place qui leur reviennent.
Le poème d'Hésiode n'est pas seulement un chef-d'oeuvre de la littérature antique. Il met véritablement en scène les puissances divines qu'un homme grec pouvait percevoir à l'oeuvre dans l'univers. La Théogonie atteste à quel point, en Grèce ancienne, poésie et religion étaient étroitement liées l'une à l'autre.
Durant 10 ans, entre 1969 et 1979, les « éducateurs » du réseau de Fernand Deligny, dans les Cévennes, ont transcrit, au jour le jour, les déplacements et les gestes des enfants autistes avec lesquels ils vivaient jour et nuit dans des campements et des fermes. Plus de deux cents de ces cartes, récemment retrouvées dans les archives de Deligny, sont reproduites ici en couleur. Elles sont accompagnées de descriptions minutieuses par ceux qui les ont tracées et d'une introduction de Sandra Alvarez de Toledo (éditrice des OEuvres de Deligny, parues en 2007), qui explicite le contexte de cette recherche et la nature de ces documents. Les « lignes d'erre » témoignent d'une des tentatives les plus singulières de l'histoire de la psychiatrie au XXe siècle, en marge de la prise en charge institutionnelle de l'autisme comme de l'antipsychiatrie.
Ce livre sera l'occasion de préciser ce qu'il en est de la spécificité de ces documents, dans le contexte de la cartographie ET de l'autisme qui suscitent actuellement un grand intérêt, de la part du public comme des spécialistes. Il permettra également de rappeler l'importance, aujourd'hui, de la pensée de Fernand Deligny sur l'humain, l'espace et le langage, sur la place de l'objet, les mécanismes de production de l'image, etc.
Le chant du berger est un poème bilingue en français et en arabe, profondément inspiré et imprégné des codes et des images de la poésie arabe du désert. Il décrit la journée d'un berger au cours de laquelle rien ne se passe, aucun événement, seul le temps continu d'une journée qui s'égraine et d'un enfant berger dont le corps se confond avec les éléments.
Les illustrations préexistent au texte. Le poème a été inspiré par les dessins, puis traduit en arabe. Le livre se lit à double sens, le début de l'un est la fin de l'autre. La traduction en arabe veille à conserver les images initialement présentes dans le texte, tout en recherchant une musicalité et un respect des codes de la métrique arabe. Les illustrations sont inspirées des paysages de la région volcanique du Sud de la Syrie, aux paysages arides mêlant les roches noires et chaotiques, les oliviers et la terre rouge brique d'argile.
"C'est entre 1927 et 1928 que Mandelstam rédigea Le timbre égyptien, dans une apparente incertaine direction. C'est aussi entre deux dates, deux révolutions, entre février et octobre 1917, que Mandelstam campe son personnage, alias Parnok, faisant se culbuter les temps, à Saint-Pétersbourg.
Cette prose inventive, radicale et libre, s'inscrirait dans les pas de « La fin du roman », article paru en 1922 dans De la poésie, où davantage qu'un éclatement, Mandelstam parle de « la ruine sans merci de la biographie », soit la ruine de la continuité, ou pour le dire autrement de l'ordre du développement (y compris historique).
« Passant d'un point de vue à l'autre, de la troisième à la première personne, avec ses ellipses, incises, digressions, Le Timbre égyptien est un incroyable fondu-enchaîné, une technique narrative faite de décrochés, de glissades acrobatiques. » (Extrait de la postface.) Événements politiques, allusions littéraires, sens inouï de la comparaison, éclats de musique, souvenirs, « mémoire étonnée », composent ce texte-palimpseste dont le principe réinventé est, non sans ironie, évoqué par cette ouverture : « Je n'aime pas les manuscrits en rouleaux. Certains sont lourds, graissés par le temps, comme la trompette de l'archange. » "
Les Poèmes du soir sont une ritournelle dédiée à ce qui nous fait peur, ce que l'on ne connaît pas, le minuscule qui grouille sous la terre ou qui farfouille dans le noir quand la nuit est venue, les inquiétudes qui se glissent en nous... Ce sont des poèmes autour du thème du crépuscule et du mystère, de la nuit à la fois effrayante et attirante, avec pour consigne la comptine, le jeu de mots, les allitérations en -oir et en -uit.
Si vous êtes sensible aux généreux conseils Si la poésie ne vous est pas étrangère Si, encore enfant, la vie vous émerveille Et si vous savourez les éditions légères, Cet ouvrage vous est tout destiné, lui qui livre aux générations futures une version à contempler et à lire, dans un sens ou dans un autre, de l'indispensable poème de Rudyard Kipling.
Ce livre en édition bilingue propose la première traduction en français des deux recueils complets, à partir de la langue d'origine (l'afrikaans), d'un auteur grandement célébré dans son pays, enseigné dans les classes, étudié à l'université, etc. Elle a déjà connu de nombreuses traductions, notamment en anglais, en allemand, en néerlandais, en zulu, en polonais, ou encore en turc et un film lui a été consacré en 2011, Black butterflies. Depuis 1965, le Ingrid Jonker Prize couronne chaque année le meilleur premier ouvrage de poésie sud-africaine en afrikaans ou en anglais.
Je suis aussi connu que Shakespeare ou Einstein. J'ai plus de trois millions de références sur Google... Mon nom est Sigmund Freud, et j'ai inventé la psychanalyse.
Rien que ça ! Petit, déjà, je rêvais d'être explorateur, comme le général carthaginois Hannibal. C'est dans la Vienne du début du XXe siècle que je découvre un continent encore inexploré : l'esprit humain. J'ai la passion de guérir et je traque l'inconscient partout où il est. En toute modestie, je vous le dis : « Je cherche à libérer l'humanité ! » Voici l'édition anglaise de la passionnante biographie créée par Corinne Maier et Anne Simon, avec des illustrations superbes et des explications visuelles intelligentes de concepts de la psychanalyse.
Imprimé en utilisant les meilleurs matériaux et du papier écologique, c'est le premier livre d'une collection à chérir !
Alors qu'il était déporté sur les îles de Limnos et Makronissos, entre 1948 et 1950, Ritsos tenait un «journal» poétique. Chaque matin, malgré les terribles conditions de détention, il se réveillait avant tout le monde pour écrire ses poèmes, sur des petits carnets ou des paquets de cigarettes.
Le quotidien et l'amertume du détenu, dans la poésie de Ritsos, y font entendre les silences de la pierre et parler les oublis de l'histoire.
Nous avons publié la première traduction française de ce Journal de déportation en 2009, aujourd'hui épuisé. Parmi les trois livres du célèbre poète grec, Yannis Ritsos, que nous avons publiés, celui-ci, son Journal de déportation, a été le plus apprécié et sans cesse demandé lorsqu'il est devenu introuvable. Nous avons donc décidé de proposer cette nouvelle édition, bilingue grec-français, dans un nouveau format et une nouvelle maquette, dans une traduction revue et corrigée par notre traducteur qui ne cesse de « creuser le vers » et de pousser plus loin son travail sur la poésie grecque pour faire mieux connaître son histoire et son actualité, comme le montre bien sa nouvelle postface.
Les Roubaiyât de Salah Jahine sont des quatrains à l'image de ceux d'Omar Khayyam : philosophiques, humoristiques, ludiques, ils s'achèvent toujours par une exclamation déconcertée : 'agabî ! (que l'on pourrait traduire par « bizarre, bizarre !», ou encore « étonnant, non ? »). Les poèmes sont écrits en dialecte égyptien et jouent avec toute la truculence de cette langue populaire. Ces quatrains sont une méditation sur la vie, la mort, la joie, le temps qui passe, l'innocence, l'absurdité du monde, sa fatalité, son origine, sa raison d'être et de tourner, la cruauté... L'oeuvre de Salah Jahine est prolifique puisqu'il a écrit plus de 240 roubaiyat qui peuvent être classées par thèmes : chaque année, Le port a jauni publiera un recueil de dix quatrains environ (entre neuf et quinze par recueil), classés par thèmes. Après un premier recueil générique publié en septembre 2015, "Plumes et poils de Roubaiyat" paraîtront en mars 2016, un recueil consacré aux bêtes et aux métaphores animales. Walid Taher illustrera cette série de recueils de poèmes avec pour consignes de s'essayer à diverses techniques graphiques, exercice qui lui est très familier et jeu qu'il aime jouer comme il l'a fait dans son album Sept vies (qui donne à voir autant de déclinaisons graphiques qu'il y a d'état d'âmes d'un chat).
« Un biotope n'a rien de sympa, n'a rien de cool. On dévore et on y est dévoré, on y meurt pour que d'autres vivent, la justice ou l'équité sont loin d'y avoir toujours leur place. Cannes est un univers ultra-hiérarchisé, une forme extrême de la société de cour chère à Norbert Elias, qu'il s'agisse des festivaliers, dans et hors du Palais, ou des films. Mais ce système permet que perdure une multiplicité d'êtres qui ne s'aiment pas forcément, qui appartiennent à des espèces différentes, et qui ont besoin les uns des autres de manière plus ou moins amicale. L'essentiel est que l'équilibre général et ses effets sur les « individus », c'est à dire sur les films, sur ceux qui les font, ceux qui les montrent, ceux qui en parlent, ceux qui iront les voir, continuent de bénéficier globalement de tout ce circuit, ou même, comme on dit parfois, de tout ce cirque. Et c'est effectivement le cas, jusqu'à aujourd'hui et il faut le souhaiter pour longtemps encore, du Festival de Cannes.» - Jean-Michel Frodon
En 1994, les Presses universitaires de Princeton publient un ouvrage intitulé Geneva, Zurich, Basel : History, Culture & National Identity. On demande à Nicolas Bouvier de s'occuper du chapitre sur Genève ; il écrit dix pages dans lesquelles il aborde avec lucidité et non sans humour ce qui a fait la spécificité de la ville, tout comme les grands noms qui ont marqué son histoire. En commençant par la guerre des Gaules, il fait la part belle à tous les "grands thèmes genevois" : rigueur du protestantisme calviniste, banques, pédagogie, botanique, humanitaire...
On y découvre le double visage d'une République qui, au fil des siècles, a tantôt recueilli quelques-unes des plus grandes personnalités étrangères, tantôt rejeté ses plus illustres penseurs ; une République qui, parce qu'elle a toujours été prise dans l'étau de puissances adverses et parfois hostiles, a su se façonner une identité propre ; et où les sciences ont pu trouver un terrain de développement favorable alors même que les arts sont souvent restés en rade.
Sans complaisance mais avec une évidente affection pour sa ville natale,
La collection feuilles d'herbe propose dans une édition bilingue un recueil de poésie de Rose Ausländer traduit par les soins d'Edmond Verroul. Ce recueil, le dernier de la poétesse, s'intitule joliment Je compte les étoiles de mes mots. Eloignés du lyrisme et de l'obscurité, les poèmes, très courts, forment de petites phrases, qui ne sont pas sans ressembler dans leur brièveté et leur fragilité aux haikus japonais. La recherche de la simplicité ainsi que la recherche de Dieu traversent de manière diaphane l'ensemble de ces poèmes de la fin et de la finitude. La poète se consacre à la nuit, trois ans avant le grand arrêt, le grand regret. Cette fois l'exil est un retour chez soi, de l'autre côté, dans l'absolument inconnu.
Daphné Bengoa et Leo Fabrizio, respectivement cinéaste et photographes, publient pour la première fois les fruits d'un projet d'envergure mené en commun sur l'oeuvre algérienne de l'architecte français Fernand Pouillon (1912-1986).
Fernand Pouillon conçoit l'aménagement de l'espace urbain avec pour précepte l'amélioration des conditions de vie de l'homme : lui apporter confort et qualité de vie, et ce quelque soit la destination de ses constructions (habitats d'urgence, logements sociaux, universitaires ou hôteliers). C'est pour l'architecte la seule garantie d'une meilleure intégration des individus au tissu social et culturel. Remettre l'humain au centre, bâtir pour sa dignité et ainsi, peut-être, lui permettre une relation harmonieuse à son environnement.
Si ce postulat semble une évidence pour tous, Fernand Pouillon reste néanmoins l'un des rares exemples du XXe siècle à l'avoir véritablement mis en pratique dans l'ensemble de son oeuvre, en France comme en Algérie. Bâtisseur effréné, il élabore chaque projet avec une exigence d'efficacité, de rationalité et d'économie de moyens. En parallèle, il étudie, enseigne, écrit et édite un ensemble de travaux relatifs à l'architecture et plus largement, sur la tâche et la responsabilité de l'architecte. Son oeuvre bâtie en Algérie - des cités (1953-1958) aux complexes touristiques et logements étudiants (1966- 1982) - éclaire particulièrement sa démarche et l'évolution d'une conception singulière de l'architecture sociale. Elle reste néanmoins encore très méconnue du grand public et la création d'un corpus photographique contemporain sur ce volet de son travail est à ce jour inédit.