Il y a l'histoire d'Ivo et Voara, petites filles nées du fleuve et de la forêt et qui s'aiment plus qu'elles n'aiment la nuit, le jour ou la vie. Il y a l'histoire de Pierre Gallois d'Haurousse, d'un pays exsangue au lendemain d'années de cauchemar, de l'insurrection anticoloniale de 1947. Il y a l'histoire d'Amoulyakar Sow, le tirailleur sénégalais, ballotté de guerre en guerre, débarqué à Madagascar un matin d'avril pour un voyage sans retour. Enfin, il y a l'histoire de Telonono, l'insurgée aux trois seins, qu'on ne raconte qu'en chuchotant et qui a longtemps attendu son heure dans l'obscurité croupie des boîtes d'archives scellées. Et toutes ces histoires, que le roman chante dans la tradition sacrée des conteurs malgaches, forment l'Histoire, celle des feux, des fièvres et de la forêt, les terribles généraux Afo, Tazo et Hazo, qui firent vaciller l'empire colonial français.
"Les études proposées dans ce volume contribuent à une histoire mondiale du travail libérée de l'eurocentrisme et du nationalisme méthodologique. En utilisant la littérature de diverses régions, époques et disciplines, le livre fournit des arguments et des outils conceptuels pour une interprétation différente de l'histoire - une histoire du travail qui intègre l'histoire de l'esclavage et du travail sous contrat, et qui accorde une attention sérieuse aux développements divergents, mais interconnectés, dans différentes parties du monde. Les questions suivantes sont centrales :
- Quelle est la nature de la classe ouvrière mondiale, sur laquelle se concentre l'histoire mondiale du travail ? Comment pouvons-nous définir et délimiter cette classe, et quels facteurs déterminent sa composition ?
- Quelles formes d'action collective cette classe ouvrière a-t-elle développées au fil du temps, et quelle est la logique de ce développement ?
- Que pouvons-nous apprendre des disciplines voisines ? Quels sont les points de vue des anthropologues, des sociologues et des autres spécialistes des sciences sociales qui sont utiles au développement de l'histoire mondiale du travail ?"
Est-il possible de parler de l'histoire de l'Algérie des origines à nos jours en France de manière impartiale sans que cela suscite polémiques, diatribes et anathèmes ? Tel est le but que s'est fixé l'historien Emmanuel Alcaraz. Dans une approche originale, il offre une synthèse limpide et éclairante sur cette histoire qui continue de miner le présent des sociétés françaises et algériennes.
De Jugurtha luttant contre Rome à la conquête arabe, des corsaires d'Alger à la colonisation française, de la guerre d'Algérie à la guerre civile algérienne dans les années 1990 en allant jusqu'au hirak, Emmanuel Alcaraz revisite chaque étape de ce riche passé en utilisant de nouvelles sources tirées des Archives et des témoignages oraux, le tout agrémenté de sa connaissance du terrain algérien, de l'historiographie et de son égo-histoire.
Dans une France marquée par l'indépendance algérienne, terre d'accueil pour les immigrés algériens, l'auteur s'intéresse également aux origines de la montée en puissance des droites extrêmes. Il étudie comment les discours des droites radicales se sont construits dans un esprit de revanche contre les immigrés, par rapport à la blessure narcissique de la perte de l'Algérie française.
Faisant appel à la méthode historique la plus rigoureuse, l'historien interroge l'avenir de la nation algérienne entrée depuis le mouvement populaire de 2019 dans une nouvelle séquence de son histoire, qui ne peut se poursuivre sans la France, avec les Lumières et les ombres du passé à assumer des deux côtés de la méditerranée pour ne pas entrer dans l'avenir à reculons.
Pourquoi le christianisme doit-il changer ou mourir ? Comment dire Dieu dans le langage du XXIe siècle ? Quel est le sens de l'athéisme moderne ? Quelle est la valeur historique des évangiles ? Quelle révolution Jésus, le croyant juif, a-t-il initiée par ses paroles et ses actes ? Comment actualiser aujourd'hui l'esprit qui l'animait ? L'Église catholique peut-elle se réformer en profondeur ? Telles sont quelques-unes des questions de ses lecteurs auxquelles répond l'évêque John Spong. Ce recueil de lettres ne s'adresse pas seulement aux chrétiens à la recherche d'une foi croyable dans la culture de notre temps. Il peut intéresser aussi toute personne sensible à une nouvelle vision du christianisme.
L'évêque anglican américain possède une grande culture en exégèse qui lui permet de relire la bible juive et la bible chrétienne d'une manière critique et non littérale. Il a intégré aussi depuis longtemps, dans sa manière de penser et de croire, les connaissances philosophiques et scientifiques modernes. Notamment en astrophysique, en sciences de la vie et de l'homme. Une pratique de cinquante ans, comme pasteur et évêque, l'a mis à l'écoute de ses contemporains et de leurs interrogations.
En complément de ses six ouvrages déjà traduits et publiés en français, ce livre pédagogique, fait de dialogues, en forme de questions/réponses, nous livre de nouvelles manières de dire Dieu, Jésus de Nazareth, notre humanité et comment vivre, de manière honnête et responsable, dans le monde qui vient... et qui est déjà là.
Le continent noir n'existe nulle part. Il est une utopie, un rêve blanc de génocide. À ce titre, il est un lieu du malheur, une dystopie. L'Afrodystopie est le concept critique des complications, des paradoxes, des contradictions, des ambivalences et des ambiguïtés de la vie africaine et afrodescendante dans ce rêve d'Autrui. Un rêve qui crée sans discontinuer des espaces dystopiques, matériels et psychiques de l'État, de l'Argent, de la Famille, de la Jouissance, dela Mort, dont le paradigme empirique est un rêve collectif d'irrésistible, intense et épuisante sexualité appelée maris de nuit. Avec le concept d'Afrodystopie, Joseph Tonda propose une analyse bouleversante de la manière dont l'imaginaire d'une chimère réelle éclaire la vie dans le rêve des abstractions et des choses. Du rêve colonial du premier président gabonais, Léon Mba, de faire de son paysun département français, au mea culpa postcolonial, en 2007, de son successeur, Omar Bongo Ondimba qui reconnut avoir fait du Gabon une dystopie ; en passant par l'utopie mobutiste de création d'un État, d'un fleuve, d'une monnaie authentiques qui se transforma en dystopie zaïroise ; du délire planétaire suscité chez les Africain(e)set Afrodescendant(e)s par le blockbuster Black Panther dont le nom Wakanda est institué en paradigme afrofuturiste de la puissance africaine, à la régulation de la vie sociale et politique démocratiqueafricaine par la Mort, cet essai, qui s'inspire de nombreux auteurs (More, Marx, Freud, Orwell) met au jour un paradigme méconnu : le paradigme de la vie humaine entrée dans le rêve des choses et des abstractions. Un rêve compliqué, au sens freudien, étrangement commun aux imaginaires de l'Afrique, du colonialisme, de l'impérialisme et ducapitalisme à l'ère néolibérale.
Force est de constater que nous vivons dans un monde fracturé. Ainsi en va-t-il notamment des rapports entre Islam et Occident. De nos jours, il existe dans les mondes musulmans des mouvances radicales qui abhorrent et combattent la civilisation occidentale et les « mécréants ». En face, il est couramment admis que l'islam est une religion régressive et barbare, incompatible avec les valeurs démocratiques, républicaines et laïques. Serions-nous alors sur la voie d'une « guerre de civilisations » ?
Ce livre propose une réflexion sur ces idées toutes faites qui ne cessent de circuler et expliquent l'impossibilité d'un « vivre-ensemble ». Il propose une analyse en termes de représentations et d'imaginaires qui va au-delà de l'actualité immédiate et des visions qu'elle porte.
L'islam des islamistes et des jihadistes n'est qu'une interprétation contemporaine et contingente de la religion musulmane. Il s'inscrit dans un retour du religieux, certes dévoyé et belliqueux, que l'Occident sécularisé a du mal à concevoir, tant il a une conception caricaturale de l'islam.
Au fond, ce livre suggère qu'il est nécessaire d'accorder de l'importance et de prendre au sérieux les discours que chaque camp tient sur l'Autre, avec l'idée qu'il convient d'en connaître la grammaire afin de pouvoir les dépasser et parvenir ainsi à des relations apaisées. Cet ouvrage donne quelques clefs permettant de retrouver la voie du dialogue entre Orient et Occident.
Le quatrième évangile, appelé l'évangile de Jean, est une source biblique importante pour le christianisme. Il a joué un rôle déterminant dans l'élaboration des credo des IVe et Ve siècles qui ont durablement fixé la compréhension de la personne de Jésus dans le cadre d'une culture grecque qui n'est plus la nôtre. Au terme de cinq années de travail fondées sur les études des exégètes, John Spong en est arrivé à penser que cet Évangile doit être relu comme un livre juif, écrit pour des Juifs devenus chrétiens à la fin du premier siècle de notre ère, 65 ou 70 ans après la crucifixion.
Cette communauté d'adeptes de Jésus représente un courant à l'intérieur de la synagogue jusqu'à la fin des années 80. En mettant en cause le statu quo religieux, ce mouvement occasionne progressivement des tensions, jusqu'à ce que, vers l'année 88, le Temple étant détruit depuis 70, les nouvelles autorités juives de l'époque expulsent les chrétiens. Dans une situation nouvelle, comment repenser alors Jésus par rapport aux écritures juives ? Comment se redéfinir chrétiens en dehors d'Israël ?
Le quatrième évangile nous présente d'abord le livre des signes dans lequel des personnages comme la mère de Jésus, Nicodème, la samaritaine près du puits, le fils du fonctionnaire non juif, l'homme paralysé depuis trente-huit ans deviennent autant de symboles, pour exprimer la nouveauté de Jésus et le sens de son message. Une autre partie du livre est consacrée à la Passion : la souveraine liberté et l'autorité de Jésus y apparaissent, en particulier au cours de son arrestation et de son procès face au sanhédrin et à Pilate. La question de la résurrection y est longuement exposée. Le Jésus de cet évangile apparaît comme quelqu'un en qui se font jour une nouvelle conscience de Dieu et une nouvelle vision de l'existence humaine.
Cet ouvrage explore les raisons pour lesquelles la religion chrétienne, qui a « formaté » la presque-totalité de la culture occidentale jusqu'à une époque récente, est maintenant répudiée par la majeure partie des Occidentaux. Cette sortie de la religion, dont parlent sociologues et philosophes, et dans laquelle se reconnaissent de nombreux chrétiens, est l'aboutissement d'une longue histoire. Elle va du Néolithique à ces derniers siècles où les humains se sont émancipés de l'explication religieuse de l'Univers.
Bruno Mori nous propose un nouveau récit. Celui du Cosmos, de sa naissance, de son expansion, de l'évolution qui a mené la planète Terre à la vie et à l'Homo Sapiens. Les humains ont en main l'avenir écologique de leur planète. Cette communion avec un Univers infini suscite l'émerveillement. Il va de pair avec la conscience que nous faisons partie d'un tout en devenir.
Dans ce contexte, ce livre propose une redécouverte de Jésus de Nazareth et de l'énorme valeur spirituelle de la « Voie » qu'il a laissée. Une « Voie ». qui nous invite à devenir plus humains et qui nous ouvre à une autre réalité de Dieu, perçue par les croyants comme la dimension profonde du Cosmos, le coeur qui fait battre, l'Énergie amoureuse...
Les propos de ce livre contribueront à défaire des noeuds et à mettre fin à des hostilités chez de nombreux chrétiens, ex-chrétiens et non-chrétiens, qui n'ont connu le christianisme qu'à travers le miroir déformant de la religion. Les lecteurs ne devraient pas sortir indemnes de ces pages argumentées, haletantes et d'une totale franchise.
Ce livre est un ouvrage de référence dans l'historiographie internationale de l'esclavage. De façon argumentée, il démontre l'importance de l'esclavage dans l'histoire de l'Afrique et met en exergue un phénomène historique central qui a eu ses propres déclinaisons régionales et sa propre périodisation. Il offre une synthèse des connaissances et un cadre structurel pour penser l'esclavage en Afrique.
S'appuyant sur de nombreuses archives, Paul Lovejoy montre que l'esclavage s'est transformé dans le temps sous l'effet d'influences externes à l'Afrique - principalement par la demande de la traite européenne et la traite islamique, puis par l'abolition européenne - et sous l'effet de dynamiques internes, à travers l'usage d'esclaves comme mode de production.
Comment l'Afrique et ses populations furent-elles pleinement impliquées dans le système global de l'esclavage qui s'étendit dans le monde entier? Quels furent les effets sur le continent? Comment quantifier la traite, selon les époques, selon les lieux? Quelles furent les conséquences sur les relations sociales et culturelles en Afrique?
Ce livre ouvre aussi des pistes pour penser les diasporas des Africains en mettant en relation l'Atlantique et le continent. Briser le silence sur les implications de l'esclavage dans l'histoire de l'Afrique mais aussi dans l'histoire du monde : tel est l'objectif de cet ouvrage, indispensable.
La Révolution haïtienne ne représente pas seulement une rupture radicale avec l'esclavage, elle résulte d'une longue élaboration durant toute l'histoire coloniale. Cet ouvrage explore les profondeurs de ce passé colonial fiévreux et montre comment, en pleine révolution, le droit de l'Ancien Régime est invoqué tant par des administrateurs en quête de stabilité que par des gens de couleur libres et par des esclaves exigeant la citoyenneté et la fin des brutalités. De fait, les règles du Code noir pour libérer et châtier les esclaves ont été au centre d'intenses débats sur la menace que le maître (autant que l'esclave) faisait peser sur le maintien de l'ordre. Ce livre, qui a obtenu aux États-Unis des prix de l'American Historical et de la Caribbean Studies Association, offre une analyse novatrice du passage de l'esclavage à la liberté dans ce pays qui allait devenir Haïti.
Malick W. Ghachem est professeur associé au Département d'histoire du Massachusetts Institute of Technology. Juriste et historien, il travaille sur la question de l'esclavage et ses héritages en Haïti, en France, et aux États-Unis.
Qu'entend-on par Dieu notre Père ; Dieu créateur et l'évolution vont-ils ensemble ? Dieu est-il omnipotent face à la souffrance et à la misère dans le monde ? Dieu peut-il être expérimenté ? Chrétiens et musulmans, croient-ils au même Dieu ? À propos de Jésus de Nazareth, est-il vraiment né d'une femme vierge ? Comment comprendre les récits de miracles ? Comment nous représenter la crucifixion il y a 2000 ans ? Si Jésus regardait l'Église, que dirait-il ? Telles sont quelques-unes des questions auxquelles répond Eugen Drewermann dans un dialogue avec Martin Freytag, un professeur de religion en classe de seconde, en Allemagne. Des questions posées par des jeunes, filles et garçons, de 16 ans en moyenne. Avec sa formidable culture biblique, ses connaissances en sciences, en psychologie et en psychanalyse, Drewermann aborde de manière pédagogique et sans tabous les interrogations que se posent des jeunes qui, pour beaucoup, possèdent peu ou pas du tout de culture chrétienne. Certes, le pacte scolaire allemand, comme celui de la Belgique, a sa propre spécificité. Mais en France, au Canada, en Suisse et ailleurs, les questions de jeunes se ressemblent. Drewermann s'attèle dans ce livre à répondre à leur curiosité. Un livre qui intéressa aussi les enseignants, les éducateurs et toute personne en recherche de transmission.
Droit et esclavage n'ont pas toujours été en conflit. L'esclavage, négation des droits humains fondamentaux, a également été un phénomène institutionnalisé dans de nombreuses sociétés par le passé, et comme tel, reconnu et organisé par le droit. Les contributions incluses dans le présent ouvrage collectif analysent différents aspects de ce compagnonnage contrenature et montrent comment le droit est intervenu pour déterminer et normer le statut des esclaves, comment il a régulé les pratiques de mise en esclavage, de traite ou de sortie de l'esclavage tout comme il a protégé l'ordre public esclavagiste.
L'ouvrage esquisse une géopolitique des esclavages de l'Afrique et des Amériques, du XIVe au XIXe siècles, en mettant en perspective dans des espaces traditionnellement séparés la diversité des formes de servitude et leurs conséquences. Quelles institutions, quelles organisations ont été mises en place dans les pays esclavagistes en fonction des facteurs exogènes ou endogènes aux états ou aux sociétés ? À travers la diversité des conditions serviles étudiées ici se dessine en creux la permanence de faits sociaux et politiques qui résistent aux particularités temporelles et spatiales, et qui repoussent l'esclave dans une altérité quasi-définitive entérinée par le droit.
Cet ouvrage propose une anthropologie politique du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Agence onusienne ayant pour mission de veiller sur la prise en charge des réfugiés, le HCR est présent dans plus de 130 pays et s'occupe de quelques 80 millions de personnes. En emmenant le lecteur à travers les bureaux chargés du dossier afghan, au cours des années 2000, à Genève comme à Kaboul, le livre donne à voir le fonctionnement interne de cette organisation internationale : comment se déploie-t-elle à travers le monde ? Qui sont ses agents ? Comment le HCR exerce-t-il son pouvoir ?
En décrivant comment pense et travaille le HCR, ce livre montre que la vision du monde nationale et étato-centrée de l'organisation l'amène en pratique à participer à des mécanismes de sédentarisation et d'illégalisation des personnes déplacées. Il met ainsi en lumière une impasse majeure de l'action contemporaine du HCR : l'agence s'efforce d'établir un type d'ordre - sédentaire et centré sur l'État-nation - qui est en fait à l'origine du « problème » qu'elle a pour mission de résoudre.
En étudiant la prise en charge d'une population de réfugiés emblématique à partir d'un positionnement original, à la fois fonctionnaire de l'agence et anthropologue, l'auteure mène un travail fin et ambitieux, qui articule plusieurs niveaux d'analyse : la micropolitique des pratiques tout autant que l'institution et les rapports de pouvoir multi-scalaires qui façonnent son environnement.
Libres après les abolitions ? La question peut surprendre. Les abolitions du XIXe siècle ont été toujours considérées comme une rupture majeure dans l'histoire des esclavages atlantiques. L'émergence contemporaine de revendications mémorielles, souvent impulsées par les descendants des populations autrefois esclavisées, suggère, au contraire, l'existence d'un passé « qui ne passe pas ». Au-delà d'une définition juridique, l'esclavage a signifié dominations, violences extrêmes et déconsidérations multiformes. Après les abolitions, des processus ethnoculturels de racialisation comme les structures de travail ont perduré, voire se sont renforcés, et ont été complétés par d'autres facteurs d'exclusion socio-économique.
Cet ouvrage tente d'explorer les barrières dressées pour empêcher la totale émancipation des nouveaux libres et de leurs descendants, ainsi que les stratégies complexes d'adaptation que ces derniers ont mises en oeuvre pour obtenir, sinon une assimilation, du moins une intégration économique et possiblement citoyenne, à égalité. La dizaine de contributions réunies s'inscrit dans une perspective comparative et porte à la fois sur les Amériques et l'Afrique, de la fin du XVIIIe au début du XXIe siècle. Elles sont issues d'une réflexion qui a été menée dans le cadre du programme européen EURESCL-FP7 (Slave Trade, Slavery Abolitions and their Legacies in European Histories and Identities) coordonné par le Centre international de recherches sur les esclavages et post-esclavages (CIRESC), laboratoire du CNRS. L'ouvrage fait suite à Sortir de l'esclavage. Europe du Sud et Amériques (XIVe-XIXe siècle), précédent volume de cette collection.
Le 27 avril 1848, alors que la France abolit l'esclavage pour la seconde fois, le gouvernement accorde dans le même temps une indemnité aux colons « dépossédés » de leurs esclaves. Ils reçoivent, par la loi du 30 avril 1849 et son décret d'application du 24 novembre 1849, 126 millions de francs, en versement direct et en rentes.
La France traverse alors une crise économique et cette indemnité représente 7 % des dépenses publiques. Les législateurs prennent pourtant la décision de la verser : c'est la condition que les anciens propriétaires d'esclaves posent à l'Émancipation générale. Tout en abolissant l'esclavage, la France ne veut ni perdre ses possessions ni supprimer l'ordre colonial.
Cet ouvrage reproduit les discussions qui ont conduit à l'élaboration de cette loi. S'y trouvent les plaidoyers des planteurs, les positions de personnalités telles que Cyrille Bissette ou Victor Schoelcher, les échanges au sein de la commission instituée pour en préparer le règlement et les délibérations parlementaires qui ont suivi. Ces textes permettent de saisir les enjeux de cette indemnisation dont les conséquences sont dénoncées aujourd'hui.
John Shelby Spong, qui appartient à l'Église épiscopalienne des États-Unis (tradition anglicane), a été pendant vingt-cinq ans évêque de Newark dans le New Jersey. Dans son travail de terrain, il a très vite réalisé que le message sur Jésus était devenu confus, voire incompréhensible, pour beaucoup de femmes et d'hommes, rebutés par des textes enveloppés de mythes, de légendes et d'interprétations d'une autre époque. À partir d'une relecture des textes, il nous propose dans cet ouvrage un portrait du Jésus réel, à la fois prophète, porteur d'un message de fraternité et inventeur d'une voie dans laquelle le monde traditionnel du divin se trouve bouleversé. Il aborde avec la plus grande lucidité des sujets comme la naissance et l'enfance de Jésus, les miracles, la résurrection et l'ascension de Jésus. La version originale (Jesus for the Non- Religious, 1re éd. 2007 chez HarperCollins) s'est vendue à plus de cent mille exemplaires et a suscité un écho de grande ampleur dans le monde anglo-saxon. L'ouvrage de l'évêque J. S. Spong se situe dans la lignée des recherches qui, depuis le XIXe siècle surtout, ont entrepris de faire le tri, dans les quatre évangiles et les autres parties du Nouveau Testament, entre l'expérience faite en et avec Jésus et la culture alors disponible dont on s'est servi pour la dire. Cet énorme travail s'est encore accéléré dans la seconde moitié du XXe siècle, comme l'ont montré les livres de Jacques Giri, Les nouvelles hypothèses sur les origines du christianisme (Karthala, 5e éd. 2015), et de José Antonio Pagola, Jésus, approche historique (Le Cerf, 2012). Encore aujourd'hui, ce travail critique reste trop souvent entre les mains des exégètes et des spécialistes. Beaucoup de chrétiens, et de catholiques en particulier, n'y ont pas accès ou ne perçoivent pas les conséquences considérables que ces acquis devraient apporter dans les prédications et les homélies, dans la rédaction des catéchismes, dans les prises de parole des évêques et du pape et, tout simplement, dans la culture religieuse et les débats de société. En s'inscrivant dans ces traditions critiques, Jésus pour le XXIe siècle est un essai libre et franc pour donner sens et puissance à une vie de Jésus revisitée.
Toutes les familles ont leur histoire.
Celle des dos Santos est extraordinaire. Elle met en scène un père autoritaire, une fille milliardaire, un fils en prison, un général effrayant et de nombreux intrigants. Elle se déroule en Angola, champion pétrolier lusophone dont la majorité de la population vit avec moins de deux dollars par jour, et dans sa capitale Luanda, longtemps présentée comme la « Dubaï de l'Afrique ». Arrivé au pouvoir presque par hasard, le père distribue pendant trente-huit ans les ressources du pays à ses proches. Cela fait de lui le parrain tout-puissant d'un clan devenu très vite très riche. Ils sont intouchables. Leur règne s'annonce éternel. Jusqu'au jour où le parrain est contraint de passer la main. Le nouvel homme fort, pourtant membre de la clique, veut faire le ménage. Dans son viseur, le système dos Santos. Rebondissements, coups tordus et manipulations, tels sont les ingrédients de cette haletante saga familiale.
"Contrairement à ce que prétend une certaine pensée unique, le nationalisme n'est pas un concept vide de sens historique. C'est un système de pensée envisageant la réflexion sur l'homme autour de la notion de nation. Le nationalisme arabe est, semble-t-il, aussi et surtout, une réaffirmation de soi, une récupération d'identité par les peuples arabes, la manifestation de leur volonté de reprendre place dans l'histoire et leurs histoires.
Un des théoriciens du nationalisme arabe et un des fondateurs du Baas, Michel Aflak disait que « le nationalisme ne peut pas être simplement un cri du coeur, une revendication légitime mais mal formulée. Il doit, au contraire, reposer sur des bases intellectuelles solides ».
Se plaçant dans une perspective civilisationnelle le nationalisme défend une vision du monde où chaque civilisation apporte sa note et sa richesse créative à la culture mondiale. Par conséquent - et sans doute plus qu'un intégrisme sectaire n'offrant qu'une mauvaise caricature de l'Islam - le nationalisme arabe incarne une espérance. L'auteur, spécialiste de la région, retrace les prémices du nationalisme arabe puis son développement et s'interroge sur la survie de ce courant majeur de la pensée nationale arabe."
"Trente ans après leur avènement sur le continent africain, les transitions démocratiques sont en proie à diverses formes de menaces et à de multiples facteurs d'empêchement. Parallèlement, les « démocraties anciennes » sont confrontées à une crise existentielle inédite, à la fois ébranlées par la défiance d'une partie des opinions internes et déstabilisées par l'affirmation offensive, sur la scène internationale, de nouvelles puissances autocratiques et autres régimes « a démocratiques ». Comment, dans ce contexte, conforter la quête de l'idéal démocratique sur le continent africain ?
Considérant que les démocraties anciennes et les émergentes ont destin lié, Francis Laloupo explore les causes et les manifestations d'une crise historique des systèmes démocratiques, les impacts et les mécanismes d'une bipolarisation systémique sur la scène internationale, et ses impacts sur les processus de démocratisation dans les pays du Sud. Une « ode à l'urgence démocratique » sur le continent africain et un plaidoyer original pour « inventer de nouvelles formes de vie » en ce troisième millénaire."
Au début du XVIe siècle, le christianisme était en crise, en proie à des conflits qui donnèrent naissance à la Réforme protestante. Un peu plus tard, le mouvement de Martin Luther fut suivi par une période révolutionnaire dans les connaissances humaines. Ces évolutions historiques et scientifiques eurent pourtant peu d'impact sur l'adhésion des chrétiens à des doctrines élaborées durant les premiers temps de l'ère chrétienne. C'est la raison pour laquelle le christianisme est devenu « in-croyable » (Unbelievable).
L'exégète biblique et évêque John Shelby Spong soutient l'idée que le déclin progressif des Églises nécessite d'élaborer un tout nouveau genre de christianisme : une foi profondément en phase avec l'expérience humaine plutôt qu'avec des dogmes dépassés. Pour la vitalité du christianisme, il lance un appel aux chrétiens à actualiser leur foi à la lumière des progrès dans nos connaissances, notamment bibliques, et à questionner les enseignements rigides qui se sont renforcés avec la Contre-Réforme catholique.
Par sa résistance révolutionnaire à l'autorité de l'Église au XVIe siècle, le mouvement de Luther peut encore servir de modèle, selon Spong, pour les chrétiens insatisfaits d'aujourd'hui. Alors que les réponses des Réformateurs sont, elles aussi, devenues insuffisantes, leur démarche peut encore nous servir de guide. L'idée de Dieu a-t-elle encore un sens ? Pouvons-nous encore en toute honnêteté suivre les credo historiques ? Des prétentions telles que l'infaillibilité du pape ou l'inerrance de la Bible ne sont-elles pas irrecevables ?
L'auteur expose ici douze « thèses » pour aider les croyants d'aujourd'hui à reformuler leur foi. Avec cet ouvrage qui conclut sa carrière d'écrivain, l'évêque Spong continue à conjuguer une tradition intellectuelle rigoureuse et la recherche d'une foi chrétienne innovante. Son approche incite les chrétiens et autres croyants à entrer dans des perspectives qui donnent sens.
Petit village au coeur d'une vallée fertile près de Bethléem, Artâs est l'observatoire par excellence des premiers temps de la présence européenne et américaine en Palestine ottomane et de la mémoire qui en perdure jusqu'à aujourd'hui. Ayant attiré l'attention des pèlerins, des explorateurs et des chercheurs bibliques dès le XVIe siècle en raison de son lien supposé avec l'héritage du roi Salomon, Artâs devient au milieu du XIXe siècle le lieu d'implantation privilégié de colons se réclamant de la mouvance millénariste protestante. Le réseau millénariste multinational à Artâs ne constitue pas un bloc monolithique, mais ses différents courants se rejoignent sur l'idée que les juifs doivent s'installer en Terre sainte pour préparer le « second avènement » du Christ.
Au début du XXe siècle, la présence de ces colons a favorisé celle de chercheurs dont l'activité a eu par la suite une forte résonance, notamment parmi les habitants du village. L'appropriation dont fait l'objet le travail de ces chercheurs, et particulièrement celui de l'anthropologue finlandaise Hilma Granqvist, prend tout son sens dans le contexte de l'occupation israélienne.
Loin des lectures binaires des relations entre « Orient » et « Occident », cet ouvrage analyse les rapports de force à l'oeuvre à la fin de l'époque ottomane et pendant le mandat britannique à partir d'un corpus inédit et varié d'archives. Son croisement avec l'histoire orale dévoile la manière dont cette période est rappelée, interprétée ou vouée à l'oubli par les villageois et les Européens ayant vécu à Artâs. Ces récits mettent en lumière la signification attribuée à l'histoire, à la fois dans la mémoire populaire et dans l'historiographie de la Palestine. Entre métahistoire et microstoria, le cas d'Artâs ouvre une nouvelle perspective sur une période charnière de l'histoire du Proche-Orient.
L'histoire des missions chrétiennes n'a accordé qu'une place secondaire au rôle joué par les femmes, alors qu'elles sont majoritaires dans la mission depuis la fin du XIXe siècle. Cet ouvrage se penche sur cette histoire de «la mission au féminin» à partir de l'exemple des Soeurs missionnaires du Saint-Esprit. La Congrégation a été fondée en Lorraine par Eugénie Caps, en 1921. Aujourd'hui, originaires de 19 pays et travaillant dans 16 pays du monde entier, les Soeurs Spiritaines reviennent sur les cent ans de leur histoire confrontée au défi de l'altérité culturelle, en prenant comme arrière-fond la rencontre de Jésus et de la Cananéenne (Mt 15, 21-28).
Une première partie éclaire le contexte général des femmes missionnaires au début du XXe siècle et celui du diocèse de Metz au sortir de la première guerre mondiale. Les acteurs des débuts de l'institut sont présentés.
La deuxième partie, historique, revient sur l'action missionnaire des Spiritaines à Madagascar, au Sénégal, au Cameroun, en Haïti et en Centrafrique.
La troisième partie présente un regard anthropologique sur l'interculturalité et la mission chrétienne comme le lieu d'une rencontre en profondeur. La présentation d'expériences de terrain au Cameroun et aux Philippines montre comment les Spiritaines vivent leur vocation missionnaire dans la lignée du Père François Libermann, un des deux fondateurs des Spiritains.
Dans une quatrième partie, l'ouvrage essaie de répondre à la question: quel/quelle missionnaire pour quel monde aujourd'hui?
Est-il possible que le Christ soit nostalgique de son séjour terrestre malgré sa « fin » tragique ? Cette hypothèse d'un poème de Jorge Luis Borges aurait probablement plu à Jean-Marc Ela dont le parcours sacrificiel s'est achevé en 2008 dans la douleur de l'exil et le silence grisâtre de l'hiver canadien. Théologien insoumis, sociologue incandescent et penseur transversal, Ela a mené une vie ascétique dans l'allégresse du don de soi. Il n'avait jamais cessé d'aimer son Afrique à laquelle il avait si mal.
En formulant une demande radicale d'humanité pour l'Afrique des villages, des bidonvilles et des exclus, Ela a esquissé et mis en pratique une éthique de la transgression et une esthétique de la compassion. Il en a payé le prix, dignement. Oui, la dissidence intellectuelle se paie cash, surtout dans les lieux où les pouvoirs religieux et politiques imposent des spiritualités dogmatiques. Ni l'inflation des douleurs, ni les persécutions sournoises, ni la violence muette n'ont cependant empêché cet esprit indocile d'enfreindre les vérités rigides du religieux, de l'économique, du politique et du social.
Ela a accédé à «l'immortalité cosmique» -celle que seule confèrent l'oeuvre qui reste, les actes posés, les manières d'être et les souvenirs incrustés dans le subconscient collectif. Son travail prophétique interroge la vaste accumulation du passé, décloisonne les savoirs et trace les horizons avec une espérance poignante. Comme la forêt innombrable du sud-Cameroun dont les nuances ne peuvent être répertoriées, son oeuvre énonce un nombre infini de sens. Cet ouvrage n'ambitionne donc pas d'en offrir une exégèse. L'objet ici est plus circonscrit : éclairer le parcours de l'homme, ouvrir quelques fenêtres sur sa parole et la porter au-delà des amphithéâtres et des conclaves théologiques.
Ont contribué à cet ouvrage :
Nada Ben Amor, Islam Amine Derradji, Éric Gobe, Caroline Guibet Lafaye, Mohand Akli Hadibi, Ratiba Hadj-Moussa, Imed Melliti, Zakaria Rhani et Marouen Taleb.
Reconnu pour sa solide culture biblique, fondée sur les travaux de l'exégèse moderne et pour sa bonne connaissance de l'hébreu et du grec, John Shelby Spong développe ici le grand intérêt à lire les évangiles avec des lunettes juives, en s'appuyant sur les travaux de l'exégète anglais Michaël Goulder. La méthode du midrash, qui consiste à raconter l'histoire de Jésus en lien avec l'histoire sacrée du peuple juif, est en effet partout présente dans le Nouveau Testament et tous les évangiles sont des livres profondément juifs.
Plus précisément, le premier évangile est né dans le cadre de l'année liturgique juive. Au cours des trois décennies qui suivirent la crucifixion, les premiers chrétiens se remémoraient, avec leurs frères juifs ou entre eux dans les célébrations hebdomadaires, la vie et les paroles de Jésus sous l'éclairage de la Bible. Ce n'est qu'avec Marc, autour des années 70 de notre ère, que la tradition orale, déjà consignée dans des lectionnaires, fut rassemblée par écrit pour devenir le premier synoptique.
L'auteur nous invite ici à approfondir notre culture juive afin de découvrir les trésors cachés dans ces livres que nous appelons les évangiles. Une démarche qui porte un coup mortel à leur lecture littéraliste. De l'entrée de Jésus dans sa vie publique jusqu'à l'affirmation de la Résurrection, l'ensemble de l'ouvrage est une superbe illustration de la démarche midrashique, témoignant ainsi de la maturité de l'auteur.
Ce huitième ouvrage de Spong, publié aujourd'hui en français, sera sans doute le dernier des vingt-six titres en anglais que représente son oeuvre. Ceux qui ont apprécié sa démarche libératrice et ceux qui souhaiteraient la découvrir l'apprécieront. C'est un livre riche et facile à lire, un complément qui s'avérera très utile à la bibliothèque Spong.