«?Ça commence parfois par une inquiétude ou un malaise. On se sent en décalage, on craint d'agir de manière déplacée. On a le sentiment de ne pas «être à sa place». Mais qu'est-ce qu'être à sa place, dans sa famille, son couple, son travail ? Quels sont les espaces, réels ou symboliques, qui nous accueillent ou nous rejettent ? Faut-il tenter de conquérir les places qui nous sont interdites, à cause de notre genre, notre handicap, notre âge, notre origine ethnique ou sociale ? Peut-être faut-il transformer ces lieux de l'intérieur et s'y créer une place à soi ??» Dans cet ouvrage aussi passionnant que sensible, la philosophe Claire Marin explore toutes les places que nous occupons - quotidiennement, volontairement ou contre notre gré, celles que nous avons perdues, celles que nous redoutons de perdre - et interroge ce qui est à la fois la formulation d'un désir personnel et un nouvel impératif social. Encore reste-t-il à savoir si l'on finit tous par trouver une place, ou si le propre d'une place n'est pas plutôt de sans cesse se déplacer, ou de déplacer celui qui croit pouvoir s'y installer...
« J'allais conjurer le sort, le mauvais oeil qui me collait le train depuis près de trente ans. Le Voyant d'Étampes serait ma renaissance et le premier jour de ma nouvelle vie. J'allais recaver une dernière fois, me refaire sur un registre plus confidentiel, mais moins dangereux. » Universitaire alcoolique et fraîchement retraité, Jean Roscoff se lance dans l'écriture d'un livre pour se remettre en selle : Le voyant d'Étampes, essai sur un poète américain méconnu qui se tua au volant dans l'Essonne, au début des années 60. A priori, pas de quoi déchaîner la critique. Mais si son sujet était piégé ? Abel Quentin raconte la chute d'un anti-héros romantique et cynique, à l'ère des réseaux sociaux et des dérives identitaires. Et dresse, avec un humour délicieusement acide, le portrait d'une génération.
Hannah est une Nisei, une fille d'immigrés japonais. Si son père l'a bercée de contes nippons, elle se sent avant tout canadienne ; alors pourquoi les autres enfants la traitent-ils de "? sale jaune ? " ?? Jack, lui, est un creekwalker, il veille sur la forêt et se réfugie dans les légendes autochtones depuis le départ de son frère à la guerre. Le jour où l'ermite tombe nez à nez avec un ours blanc au coeur de la Colombie-Britannique, il croit rêver - la créature n'existe que dans les mythes anciens.
Pourtant, la jeune femme inconsciente qu'il recueille semble prouver le contraire : marquée des griffes de la bête, Hannah développe d'étranges dons à son réveil. Des années 1920 à l'après-guerre, Marie Charrel brosse le portrait d'une Amérique du Nord où la magie sylvestre s'enchevêtre à la fresque historique. Contes japonais et légendes indigènes se lient dans une fabuleuse ode à la nature et à la fraternité.
Un vieil homme fait un infarctus et s'apprête à entamer son « grand voyage » ; au même moment, à des kilomètres de là, une petite fille défie le plongeoir des 10 mètres de la piscine pour impressionner sa maman si secrète. Deux sauts dans le vide qui vont tout faire basculer.
Léonard est un vieil homme solitaire. Sa femme est décédée voilà des années, et ses enfants ne lui pardonnent pas ses erreurs du passé.
Egoïste, c'est vrai qu'il l'a été ; et infidèle, inconséquent, porté sur la boisson... Aussi lorsqu'il passe l'arme à gauche et voit les souvenirs défiler sous ses yeux, il n'est pas dupe quant au chemin de rédemption qu'il s'agit d'accomplir. De son côté, Zoé, dix ans, attend désespérément le retour de sa mère de l'hôpital. Depuis que cette dernière est tombée en catatonie, il lui est impossible de lui parler, de la réveiller de ce qui ressemble à un cauchemar sans fin. La petite fille est décidée à enquêter et à sauver la belle endormie. Les destins de Léonard et de Zoé vont bientôt s'entremêler : l'un pourrait en effet être la réponse aux questions de l'autre...
Thibault Bérard poursuit son exploration du grand roman familial et de ses secrets mal cicatrisés. A travers deux personnages abimés par les événements, c'est d'amour, de résilience et de quête individuelle qu'il est ici question.
Après L'Homme nu, la nouvelle enquête de Marc Dugain et Christophe Labbé sur nos comportements de demain. Ces dernières années ont bouleversé nos vies quotidiennes. Ce bouleversement, qui profite formidablement aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), sera durable?: autant l'analyser et le comprendre le mieux possible. C'est le pari de Marc Dugain et de Christophe Labbé dans ce nouveau livre, qui se concentre sur ce virage de civilisation pour mieux dessiner la société du futur. Une société où tout sera fait pour éviter les contacts?; où chacun, faute de se confronter véritablement à l'altérité, risque de s'enfoncer dans une solitude délirante, au beau milieu du métavers... Télétravail, objets connectés, voitures autonomes, applications de rencontres, paiement sans contact, données personnelles livrées à qui accepte de payer ces data?: quel sera l'impact de cette numérisation massive de nos activités quotidiennes?? À mi-?chemin entre journalisme et narration littéraire, Marc Dugain et Christophe Labbé portent leur regard sur l'avancée inexorable de ces phénomènes, au point que les politiques se dispensent bien de les évoquer dans leurs programmes. Est-il vraiment trop tard?? Resterons-nous humains si plus rien ne nous touche??
Dans l'opacité du plus grand système totalitaire de la planète, sacré pour la troisième fois à la tête du Parti ?communiste, de l'armée et de l'État, Xi Jinping est le maître absolu de la Chine, aujourd'hui deuxième économie mondiale. Un développement extraordinaire qui, en deux générations à peine, a sorti de la misère des centaines de millions de personnes, et assuré leur immense fortune à des entrepreneurs hors pair. Comme aux États-Unis, 1 % des Chinois les plus fortunés contrôlent plus du tiers de la richesse nationale. On les connaît à peine, les Jack Ma d'Alibaba, Pony Ma de Tencent, Ren Zhengfei de Huawei, Zhang Yiming qui a créé TikTok, Yang Huiyan, la patronne de Country Gardens, ou la reine du botox Zhao Yang... Trop d'influence, trop d'arrogance - au risque de casser les ressorts de l'économie, Xi Jinping les a mis sous tutelle et a maintenu pendant près de trois ans 1,4 milliard de personnes dans le carcan du zéro Covid. La croissance fléchit, le chômage grimpe, des manifestations surgissent. Début 2023, changement radical, priorité à l'économie. Ukraine, Taïwan, haute technologie?: la confrontation avec les États-Unis durcit. Xi Jinping peut-il réussir son pari sans les milliardaires rouges, et imposer au monde la suprématie chinoise??
EUROPE CENTRALE - ANNEES TRENTE. Après avoir fui la révolution russe, les jumeaux Sylvin et Maria Rubinstein se découvrent un talent fulgurant pour le flamenco. Très vite, Varsovie, Berlin et même New York sont à leurs pieds. Lorsque le Continent sombre dans la guerre, les danseurs sont séparés, et Maria disparaît. Pour venger sa soeur tant aimée, Sylvin ira jusqu'à se glisser dans la peau d'une femme.
Et c'est ainsi travesti qu'il s'engage dans la Résistance pour lutter contre les nazis. HAMBOURG - 2017. Lukas, jeune homme à l'identité trouble, rencontre la sulfureuse Iva sur la scène où Sylvin dansait autrefois. Fuyant leur passé, ils partent à leur tour en road-trip dans l'Europe interlope. Au fil des cabarets, leur flamenco incandescent et métissé enflamme les passions. Mais il suscite, aussi, la violence et l'intolérance.
Jusqu'à ce que Lukas commette l'irréparable pour protéger Iva... A près d'un siècle de distance, Marie Charrel retrace le destin d'artistes épris de liberté, rattrapés par la folie du monde. Mais prêts à se battre jusqu'au bout pour défendre qui ils sont.
Atay et Abay ont toujours eu la tête sur les épaules, aussi Firuzeh et son petit frère, le turbulent Nour, ne sont-ils pas inquiets lorsque leurs parents leur annoncent qu'ils quittent Kaboul. Et puis les deux enfants ont d'autres préoccupations?: d'abord, s'écharper toute la journée, puis écouter les contes d'Abay, enfin se faire des copains dans le camp de fortune où ils sont parqués après leur traversée des mers. Mais alors que les jours deviennent des mois, que les gardes ne cessent de les abreuver d'insultes et de coups et que les médicaments semblent la seule réponse des adultes au malheur, Firuzeh comprend que l'enfance touche à sa fin. Accompagnée par la fantomatique Nasima, sa meilleure amie des fonds marins, la petite fille n'en est qu'au début d'un long voyage. Un récit d'initiation tout en beauté et fragilité, où l'âpreté de la réalité tragique rencontre la poésie et la magie d'un regard d'enfant.
Des premiers émois de l'enfance aux plus grands rôles de Molière et Shakespeare dans des salles combles, Jacques Weber se souvient, par flashs, d'une vie monumentale. Se côtoient dans une joyeuse effervescence les muses Marguerite Duras et Grace de Monaco, les comparses de scène Francis Huster, Jacques Villeret ou Isabelle Adjani, l'admiration émue pour Catherine Deneuve, Gérard Depardieu... les souvenirs familiaux, également, ne sont jamais loin, comme celui de sa mère pleurant la disparition de Gérard Philippe ou celui de son frère adoré, Bernard.
L'exercice autobiographique devient vite le prétexte au tableau d'une époque, d'une génération ; celle de jeunes brûleurs de planches promis à un avenir radieux - du moins, pour ceux qui ne se consumeront pas en cours de route. C'est à eux, également, que Weber rend hommage avec une douce mélancolie.
Après le succès de De l'autre côté de la Machine, Aurélie Jean nous entraîne dans un nouveau voyage : au coeur de nos institutions juridiques et des algorithmes qui s'y exercent. Comment la loi est-elle pensée et appliquée au temps des algorithmes ? Comment les algorithmes sont-ils utilisés au sein du système judiciaire ? Et est-il vraiment possible de les réguler ? C'est un fait : les algorithmes rythment nos vies. Ils nous aident à nous déplacer, à travailler, à nous soigner, et même à légiférer. Certains, alarmistes, diraient qu'ils sont de partout... Or, peu d'entre nous les comprennent, sans parler d'en maîtriser les subtilités. Nos dirigeants, parlementaires et nos juristes n'y font pas exception, et participent pour certains à augmenter la confusion autour de leur utilisation et de leur supposé danger... Pourtant, il est aujourd'hui nécessaire, voire capital, de comprendre le fonctionnement des algorithmes développés, mais aussi d'anticiper leur développement, de l'encadrer et de l'accompagner aussi judicieusement que justement. Une chose demeure cependant certaine : les algorithmes ne disposent d'aucune personnalité juridique face à un tribunal. En revanche, s'ils ne peuvent réellement faire la loi, ils l'influencent et en orientent désormais la pratique. Mal employés, ils deviennent une menace pour ses principes de transparence et d'équité. Bien maîtrisés, ils peuvent, au contraire, guider ceux qui la font et l'exercent afin de garantir le traitement égalitaire de chacun face à la justice. Consciente du défi qui nous attend, Aurélie Jean nous appelle à agir et propose de dompter (plutôt que de réguler) les algorithmes à travers des lois souples et anticipatrices, afin de ne rien sacrifier au progrès tout en les pensant dans la plus grande objectivité scientifique, sociale et économique. Car c'est cette même transparence intrinsèque à l'exercice de la justice qui doit s'appliquer dans le champ des algorithmes afin de permettre à chacun - du citoyen au législateur - de garantir l'harmonie, la justice et l'essor intellectuel au sein de nos sociétés.
Les égarés ? Dans les médias comme dans la vie, ils sont plus nombreux qu'on ne le croit. On les reconnaît aisément : ils s'enferment dans un concept fou, qu'ils vénèrent absolument : l'identité. Alors ils ne parlent que de race, de pays d'origine, de couleur de peau, de culture (d'appropriation culturelle), de classe sociale... Ils ne croient qu'aux racines... C'est parce qu'ils font fausse route, et parce qu'ils risquent d'entraîner notre monde avec eux, que Julia de Funès reprend sa plume et tente de les raisonner. Que se passe-t-il en Occident ? Alors que l'identité était autrefois une sorte de construction savoureuse, une image de soi qu'on dessinait au fur et à mesure de son parcours et de son existence, désormais cette notion empêche et contraint la vie des gens, parce qu'ils la pensent en amont de leur vie, et parce qu'ils assurent qu'on ne peut en changer ! Pour lutter contre ces préjugés, la philosophe dessine dans ce livre 10 rôles ultracontemporains, dix cases prison : le lycéen woke, l'homme anti-viriliste, la femme hyperféministe, la grand-mère hyperactive, le jeune homme racisé, etc. Surtout, Julia de Funès oppose à l'identité une notion joyeuse, et philosophique : l'authenticité. Être juste soi, mais vraiment soi, au carrefour de plusieurs identités, et sans plus jouer aucun rôle.
« Je sais bien ce que je fuis, mais non pas ce que je cherche », expliquait Montaigne à propos de la longue chevauchée qu'il fit à travers l'Europe en 1580.
Gaspard Koenig aussi sait ce qu'il fuit : les injonctions permanentes des gouvernements et des algorithmes. Il s'est donc lancé sur les traces de Montaigne, en suivant le même itinéraire, avec le même moyen de transport : un cheval, ou plutôt une jument, Destinada. Pour rejoindre Rome, le cavalier et sa monture ont parcouru 2 500 kilomètres pendant cinq mois, passant par le Périgord, la Champagne, les Vosges, la Bavière, la Toscane...
Toquant aux portes pour trouver gîte et couvert, parcourant les campagnes mais aussi les zones commerciales et les centres-villes, l'écrivain a eu tout le loisir de « frotter et limer sa cervelle contre celle d'autrui », comme le recommandait Montaigne. Dans cette plongée au coeur des territoires, la générosité et l'hospitalité sont presque toujours au rendez-vous.
Au rythme du pas, notre modernité révèle ses vertus et ses travers. L'occasion pour l'auteur de renouer avec certains thèmes chers à Montaigne : la relation entre l'homme et l'animal, l'art du dépouillement, les conflits religieux, la diversité des cultures ou les leçons de la nature...
Au fond, que Gaspard Koenig pouvait-il bien chercher dans un tel vagabondage, sinon la liberté ? La sienne, celle que l'on cultive dans cette « arrière-boutique » où se réfugiait Montaigne. Mais aussi la nôtre, exigence politique plus contemporaine que jamais.
Entre témoignage intime et pamphlet sur nos sociétés désenchantées, le nouveau livre de Sonia Mabrouk invite le lecteur à s'ouvrir pleinement au monde, et à ne plus refuser ce qu'il ne comprend pas. «Ma conversion au sacré s'est faite en plusieurs étapes. Ce ne fut pas une révélation brutale et soudaine ; plutôt une succession de moments à la fois intimes et universels, un cheminement dans le temps vers des fragments de sacré, une compréhension de quelque chose qui nous précède et qui nous suit, qui en tout cas nous dépasse. Je dirais aussi que, dans mon cas, j'ai reçu le sacré comme on reçoit la foi. À un moment précis, le sacré a fini par s'imposer dans mon existence. Était-ce le fruit du hasard, ou était-ce un événement déjà inscrit en moi ? Impossible à dire. Une chose est sûre: la vie s'en est mêlée, et depuis, tout a changé.»
Si notre parole se libère heureusement pour dénoncer les injustices, les traumatismes, on constate qu'elle s'abime également en propageant les haines et les mensonges - par le harcèlement en ligne, les fake news, les trolls... Il faut sans doute le reconnaître : les mots font mal. Ils peuvent être des armes destructrices.
Voici la thèse défendue par Roger-Pol Droit et Monique Atlan, dans le prolongement de leur dernier livre, Le sens des limites (2021). Loin d'un pessimisme mortifère ou d'un constat d'échec, leur nouveau livre éclaire la puissance de la parole et propose des solutions pour comprendre notre responsabilité dans son usage. Pour les auteurs, il est essentiel et urgent de ré-apprendre à parler, pour sauver notre humanité.
Des scientifiques, de plus en plus nombreux, nous promettent que la «?révolution de la longévité?» est pour demain, que nos petits-enfants pourront vivre cent cinquante ans, voire davantage, encore jeunes et en bonne santé physique et psychique. Ce livre fait le point sur ces recherches, sépare science et fantasmes et pose la question de fond?: à quoi bon vivre aussi longtemps?? Face à cette interrogation, deux conceptions de la vie heureuse s'opposent. La première nous vient de ces sagesses anciennes que la psychologie positive remet au goût du jour. Elles nous invitent à dire «?oui au réel?», à nous résigner à l'ordre naturel des choses afin d'accepter dans la sérénité la vieillesse et la mort. Les modernes philosophies de l'histoire et de la liberté plaident pour une tout autre spiritualité?: si une éducation tout au long de la vie, voire une perfectibilité potentiellement infinie, sont le propre de l'Homme, allonger la vie en bonne santé pourrait offrir à l'humanité l'occasion de devenir enfin moins bornée, moins violente, et, pourquoi pas, plus sage qu'elle ne le fut au xxe siècle. Ce sont les termes de ce débat désormais crucial que présente ce livre. L.F.
Cet été-là, rien ne sera pareil, elle le sent. D'abord, c'est Titi, sa mère et soeur deux en un, qui la laisse tomber pour aller conter fleurette au conducteur de ferry. Et Élène, qui tient si bien les services sociaux à distance, vient l'embêter avec des histoires de puberté - même que c'est pour ça que son corps change. Elle, le changement, ça ne lui dit rien?; elle est déjà suffisamment différente comme ça, avec ses doigts croches et ses cheveux de lainages. Et puis il y a cet étranger qui se baigne dans sa rivière, auprès de qui elle se sent bizarre et plus grande tout à coup. Cet été-là, c'est sûr, rien ne sera pareil. Stéphanie Boulay dissèque les tourments d'une adolescente sublimement discordante. Une voix déroutante, unique, d'une grande force poétique.
À la mort de leurs parents, Lily et le Petit intègrent le pensionnat du redoutable M. Tilbrook. Face à la cruauté des surveillants, aux humiliations et à la tristesse, Lily s'efforce de protéger le Petit ; de tout son corps et de toute son âme, la petite fille fait barrage. Car dans l'obscurité de l'hiver, chaque imperceptible lumière ressemble à un espoir : la réponse d'un rouge-gorge au chant de Lily, les escapades dans la forêt, l'étrange amitié d'un ermite au fond des bois... De nos jours, une jeune femme se rend sur l'île de Jersey, pour enquêter sur le passé de son père. Les locaux ne voient pas d'un très bon oeil son arrivée, l'étrangère n'ayant de cesse de poser des questions sur la sordide affaire qui a secoué la ville il y a quelque temps : celle de l'orphelinat de Jersey, ou l'histoire d'un tentaculaire réseau pédophile... Et si la mémoire du père de la jeune femme, ancien pensionnaire, a effacé à peu près tout ce qui concerne cette période de sa vie, un nom, pourtant, revient inlassablement dans ses souvenirs : Lily. Mais qui était Lily ?
La philosophie a pensé la vie, mais non pas vivre ; et le religieux, qui prenait en charge la question du vivre, est aujourd'hui en retrait. Ainsi « vivre » est laissé en friche, abandonné au prêche ou bien au truisme ; et de là prospèrent le Développement personnel et le marché du Bonheur, qui vendent vivre comme du « tout positif ».
Or, comme le montre François Jullien dans ce nouveau livre, vivre est paradoxal, s'étendant du vital au vivant. Il est à la fois la condition de toutes les conditions : être en vie ; et l'aspiration de toutes nos aspirations :
Vivre enfin ! Nous sommes en vie, mais nous n'accédons pas pour autant à vivre. De là que nous puissions être nostalgiques de la vie au sein même de la vie - ou que « la vraie vie est absente ».
Comment faire pour vivre ? Comment vivre enfin ? Car répéter qu'il faut « cueillir le jour », « profiter de la vie », n'est jamais très utile ou efficace...
Le philosophe de La Vraie vie trace donc plutôt, pour s'y repérer, une carte de ces possibles intensifs entre lesquels décider vivre. Vivre y reparaît alors dans sa ressource, dans son essor, dans son « matin », dégagé de ce qui l'enlisait, au fil des jours, et l'emmurait.
Telle est « la transparence du matin », en amont de tous les enseignements de la morale.
Aujourd'hui où l'on ne peut plus tracer de plan de la Cité idéale, et où les lendemains « ne chantent plus », peut-on faire autre chose que défaire ce qui bloque l'état présent des choses pour y rouvrir des possibles ?
Or, qu'est-ce qui bloque, si ce n'est des coïncidences idéologiques installées depuis trop longtemps, paralysant la société ? Ne pouvant les renverser (comment en aurait-on la force ?) et les dénoncer ne s'entendant plus, on ne peut que les fissurer : localement, sur le terrain, chacun en ayant l'initiative là où il est.
Mais ces dé-coïncidences se relient et se relaient, elle se répondent et peuvent s'associer.
Une Association en est née, dont chacun peut faire partie. Car c'est quand même avec des fissures que commencent à s'effondrer les cavernes.
Sensible, rêveur, Célian ne s'épanouit pas à l'école. Sa mère Mary, à la suite d'une rupture amoureuse, décide de partir avec lui dans une île légendaire de la mer Baltique. C'est là en effet qu'à la Renaissance, Tycho Brahe - astronome dont l'étrange destinée aurait inspiré Hamlet - imagina un observatoire prodigieux depuis lequel il redessina entièrement la carte du Ciel.
En parcourant les forêts et les rivages de cette île préservée où seuls le soleil et la lune semblent diviser le temps, Mary et Célian découvrent un monde sauvage au contact duquel s'effacent peu à peu leurs blessures.
Porté par une écriture délicate, sensuelle, ce premier roman est une ode à la beauté du cosmos et de la nature. L'Enfant céleste évoque aussi la tendresse inconditionnelle d'une mère pour son fils, personnage d'une grande pureté qui donne toute sa lumière au roman.
Tristane Banon le martèle : dans la pratique radicale des grandes religions monothéistes, la femme est présentée comme inférieure à l'homme. Quand la plupart de nos sociétés contemporaines, pourtant bâties sur ce précepte structurel, s'en sont plus ou moins affranchies au prix de décennies de combats féministes, l'influence de cette misogynie systémique perdure. Dans une humanité en crise, il n'est pas faux de dire qu'elle opère même un retour en force. Il suffit d'observer les islamistes imposer le niqab, la burqa ou le hidjab, les juifs orthodoxes demander à leurs épouses de sacrifier leur chevelure, ou encore les traditionnalistes catholiques aller jusqu'au meurtre lors de raids antiavortement, pour s'en convaincre. Bien sûr il s'agit là d'extrémistes ;
Mais l'obscurantisme religieux gagne doucement du terrain, bien plus ancré dans les mentalités que ce que l'on croit : la fin du droit à l'avortement dans certains États américains a ainsi peu soulevé les foules ; en France, beaucoup de féministes se refusent à condamner fermement certaines pratiques religieuses, coups de canif donnés au pacte républicain, pour peu que celui qui tienne la lame soit croyant.
Aucune religion ne veut l'émancipation de la femme, aucune ne lui reconnaît les mêmes possibles qu'aux hommes, seuls existent des croyants humanistes conscients de ce que les textes ont à nous apprendre, et de ce qu'il faut savoir laisser sur le bord du chemin de l'universalisme. Tristane Banon est de ceux-là.
Dans les rues d'un Paris déserté, la narratrice avance la peur au ventre et la joie au coeur : c'est chez Sara qu'elle se rend, pour la toute première fois. Les premières fois, les deux amantes les comptent et les chérissent, depuis leur rencontre, les messages échangés comme autant de promesses poétiques, le désir contenu, jusqu'à l'apothéose du premier baiser, des premières caresses, de la première étreinte. Leur histoire est une évidence. Débute une romance ardente et délicate, dont les héroïnes sont également les témoins subjuguées. La découverte de l'autre, de son corps, de ses affects, l'éblouissement sensuel et la douce ivresse des moments partagés seront l'occasion d'apprendre à se connaître un peu mieux soi-même. Anne-Fleur Multon redonne ses lettres de noblesse et d'humanité au roman d'amour et nous entraîne dans les dédales d'une passion résolument joyeuse, souvent charnelle et parfois mélancolique, mais toujours étourdissante.
Au xve siècle, dans le Japon médiéval, Kotaro et Hikojiro, deux intouchables, grandissent avec un seul rêve : intégrer l'escadron des jardiniers du shogun et marcher dans les pas de leur modèle, le grand moine zen, Ikkyu Sojun. Les frasques et provocations de ce moine rebelle marquent l'époque autant que ses prodigieux talents. Tout enfant, il est arraché à sa mère, suit l'enseignement rigide des monastères et connaît enfin l'éveil, lors d'une promenade méditative, lorsqu'il entend le « chant du corbeau ». Suivent trente ans d'errance. Refusant les titres et les honneurs, cet électron libre poursuit son zen à lui, passe du temple au bordel, tombe sur le tard follement amoureux d'une chanteuse aveugle, écrit de sublimes poètes érotiques qu'il jette au vent... À si bonne école, comment les deux parias parviendront-ils à sortir de leur misère ?
« Dès que je rentre, je me mets à écrire. La dernière chose que je pensais faire dans ma vie était d'écrire un livre. Mais j'ai eu besoin de raconter cette histoire folle. L'histoire de ma famille, une famille heureuse et aimante dont la vie a basculé. J'ose espérer que le récit de ces événements permettra de mieux les comprendre. Je suis la femme de Roman Polanski. Il est, selon qui vous êtes, l'incarnation d'une génération, un survivant, un mythe, un génie, un salaud. À une époque où l'on préfère ce qui est vraisemblable à ce qui est vrai, j'ai voulu allumer un contre-feu. » Une vie incendiée est le récit inédit, poignant et intime d'Emmanuelle Seigner. Une prise de parole qui fait la lumière sur une histoire hautement médiatisée, une affaire sensible, complexe, aux répercussions dévastatrices pour de nombreuses personnes, à commencer par elle-même. L'actrice prend courageusement la parole pour la première fois et livre enfin sa vérité.