Colette à Paris, c'est d'abord l'histoire d'une provinciale issue du fin fond de l'Yonne qui, peu à peu, par la grâce imprévue d'un mariage avec une célébrité du temps, le journaliste Willy, devient, elle aussi, une figure bien parisienne : une actrice et une artiste du music-hall, mais aussi une journaliste et surtout le grand écrivain que l'on sait - autant que la résidente successive de zones variées de Paris, et une virtuose du déménagement.
Colette est avant tout un écrivain de la rive droite, indifférente au monde des intellectuels et des politiques, et à celui des rassemblements "militants". Un écrivain qui sait retrouver cet art du flâneur métropolitain et de l'observateur, né avec Rétif de la Bretonne, Balzac et Baudelaire, et qui trouve dans la ville majeure un contrepoint et un contrepoids, narratifs et volontiers fictionnels, à ce village natal de Saint-Sauveur en Puisaye dont elle construit l'improbable mythe dans ses textes autobiographiques.
Marcel Proust est né à Paris. Il y a vécu toute sa vie, y est mort et y est enterré. Parisien de coeur et d'esprit, il aimait la capitale et n'a jamais sérieusement envisagé de vivre ailleurs. Paris est la fois sa ville et le principal théâtre dans lequel se déroule l'extraordinaire comédie humaine qu'il a décrite et mise en scène.
George Sand est communément présentée comme la "bonne dame de Nohant". C'est oublier qu'elle est née à Paris dans le 3e arrondissement et qu'elle y a passé les premières années de son existence.
Après avoir incarné l'âge d'or de son enfance, la capitale sera synonyme, pour cette jeune provinciale mal mariée, de liberté et d'émancipation.
Pour autant, George Sand ne sera jamais une "vraie" parisienne, car elle rêve d'un Paris qui n'existe pas : un Paris à la campagne. George Sand et Paris, une longue histoire d'amour et de désamour...
En 1820, on découvre dans le registre de la paroisse Saint-Eustache, la date de baptême de Molière, le 15 janvier 1622. A partir de 1821, on célèbre donc la "naissance" du grand homme à cette date. De nombreuses célébrations auront lieu en 2022 pour les 400 ans de sa naissance. La Comédie française notamment, "sa maison", prévoit 6 mois de commémorations et programme 25 pièces de l'écrivain. Retournons au xviie siècle, retrouvons le Paris grouillant de vie des Halles, du Pont-Neuf, glissons-nous sous les plafonds du Louvre et arpentons les rues du quartier du Palais-Royal, sur les pas de celui qui faisait dire en 1659 au faux marquis de Mascarille : « Pour moi, je tiens que hors de Paris, il n'y a point de salut pour les honnêtes gens ! »
Le Vendéen Clemenceau a aimé passionnément Paris.
La capitale a séduit très vite le jeune provincial venu pour achever ses études de médecine. Au Quartier latin, il fréquente avec la même assiduité l'amphithéâtre et le café, quartier général des étudiants opposants à l'Empire. En 1870, de retour des États-Unis, il entre en politique à Montmartre, dans un Paris en guerre. Après l'épisode douloureux de la Commune, il devient le médecin des pauvres et fait l'apprentissage de la violence sous toutes ses formes : économique, sociale et culturelle. Plus tard, journaliste ou aux affaires, il oeuvre à faire de Paris le centre névralgique d'un pays républicain, apaisé, soucieux de liberté et de justice. Amoureux des arts, passionné par la culture, Georges Clemenceau sait fuir la salle de rédaction, l'hémicycle ou le bureau du ministère pour, le matin, aller au Bois de Boulogne et le soir, en habit et haut de forme, courir au spectacle sur les Boulevards ou place du Théâtre-Français. Cependant, tout en goûtant aux plaisirs frivoles et joyeux de la Belle Epoque, le Père la Victoire grave à jamais dans son coeur le Paris des révolutions, le Paris du peuple, le Paris de la République éternelle.
À Paris, entre 1861 et 1929, le fils du médecin du bocage a rencontré et accompli la grande Histoire
Baudelaire à Paris, c'est d'abord l'enfant heureux de la rue Hautefeuille, où il est né en avril 1821, puis le collégien du Quartier Latin qui deviendra un jeune dandy, adepte d'une « vie libre » et fréquentant les milieux louches. En 1848, sur les barricades du carrefour de Buci et du Palais Royal, Baudelaire est un révolutionnaire exalté et parodique. Il devient, sous le Second Empire, un flâneur nostalgique - Le vieux Paris n'est plus, déclare-t-il en 1859, dans « Le Cygne », un poème des « Tableaux parisiens » - un flâneur doublé d'un observateur, qui épie les « petites vieilles » à travers les allées du jardin du Luxembourg.
Il aimait le Paris des boulevards, des théâtres, des cafés, le Paris des « multitudes », le Paris de la vie moderne. Atteint de la « maladie du domicile », il y aura vécu sans jamais s'y établir.
Venu à Paris en 1922, à l'âge de dix-neuf ans, Georges Simenon y réside dix ans, durant lesquels il mène une vie trépidante et emmagasine mille impressions et émotions. Sur les quelque deux cents ouvrages qu'il signe de son patronyme, il situe à Paris l'intrigue d'une centaine de romans et évoque très largement la ville dans ses écrits autobiographiques, en particulier dans ses vingt et unes dictées. Mais le plus extraordinaire est que l'immense majorité de ces romans parisiens seront écrits en dehors de Paris, tantôt aux Etats-Unis, tantôt en Suisse où il vécut de 1957 à sa mort. Quel est le Paris de Simenon ? Cet ouvrage montre comment un écrivain de génie s'attache à ses souvenirs et en fait la matière même, la chair et le sang de ses livres.
Si Louis-Ferdinand Destouches est né en 1894 à Courbevoie, l'écrivain Louis-Ferdinand Céline est né à Paris, en 1932, lors de la parution de Voyage au bout de la nuit. Toute sa vie, l'écrivain cultiva une dualité entre Paris où il vivait, et sa proche banlieue, où il travaillait.
Fils de petits commerçants, la vie de Céline est intimement liée à celle de la capitale, d'abord le passage Choiseul, le fameux « passage des Bérézinas » de Mort à crédit, le théâtre de sa jeunesse. Mais Céline, c'est aussi et surtout Montmartre, la rue Lepic, la rue Girardon, l'avenue Junot où, après ses consultations, il retrouve ses amis : le peintre Gen Paul, l'écrivain Marcel Aymé, l'acteur Le Vigan... C'est aussi le Paris de l'Occupation, où Céline puise son inspiration pour ses romans d'après-guerre, n'hésitant pas à se mettre en scène après son retour d'exil au Danemark. Même à la fin de sa vie, installé à Meudon, avec sa femme et ses animaux, une vue imprenable lui permet de contempler la capitale...
Victor Hugo porte un regard acéré sur les gens, scandalisé sur la misère, gourmand sur les femmes, tendre sur les enfants.
Rimbaud, que l'on voit toujours en adolescent de Charleville, fut aussi, de 1870 à 1873, un Parisien temporaire, soucieux de montrer ses vers et de fréquenter les milieux de la poésie nouvelle. Accueilli par Verlaine qui l'aimera corps et âme, il sera dans la capitale au hasard de nombreux gîtes occasionnels durant une période des plus troublée : la France occupée, les heures de la Commune, les débuts houleux de la Troisième République.
Habitué des cafés et des cercles artistiques (les Vilains-Bonshommes, les Zutistes), ami, devenu vite insupportable, de Charles Cros ou de l'inénarrable Cabaner, il déambula dans le Paris de l'époque où il tenta de vivre, mal nourri, mal logé, et écrivit certains de ses plus étonnants poèmes.
Si Françoise Sagan, née Quoirez, a toujours rappelé qu'elle était originaire du Lot, elle a néanmoins incarné dès sa jeunesse la vraie Parisienne, par son élégance discrète, sa liberté de pensée et l'impertinence de son esprit. Véritable phénomène de la littérature, depuis son fameux Bonjour Tristesse qui lui valut une renommée mondiale, elle a le plus souvent vécu à Paris, élargissant même l'influence de la capitale et ses modes de vie à Saint-Tropez et à la Normandie.
Si elle a cantonné Paris à quelques lieux iconiques (le boulevard Malesherbes, Saint-Germain-des-Prés, la rue du Cherche-Midi, les boîtes de nuit de la rive droite, et l'avenue Foch), elle a reconnu cette ville comme le centre le plus ardent, le plus foisonnant, le plus inventif du monde. C'est à Paris qu'elle se sentait profondément au plus juste d'elle-même, parce que le génie de la capitale correspondait à sa façon de vivre, indépendante, émancipée, bohème.
Elle aimait la beauté de Paris, préférant les beaux quartiers aux quartiers populaires, le Faubourg Saint-Honoré, la place Vendôme et les palaces à la banlieue. Anti-Simone de Beauvoir et anti- Duras, reine distante de l'underground parisien, elle hanta ses boites de nuit sans conviction, n'aimant guère danser, aimant la paresse de la Seine à laquelle elle voulait ressembler. Nonchalante et distraite, dépensière et futile, mais aussi grave et secrète, elle voyait en Paris, à l'instar de Colette à laquelle on la compara souvent, un lieu d'inspiration et de liberté sereine qui était pour elle le plus "vivable".
Une découverte du Paris de la fin du XIXe siècle, du IXe arrondissement où E. Zola a grandi aux quartiers qu'il dépeignit dans son oeuvre : les halles, les collines de Passy, les faubourgs, etc. La capitale est aussi le lieu des engagements littéraires et politiques avec le naturalisme et l'affaire Dreyfus.
Comment Alexandre Dumas, ce jeune provincial, fils d'un général de la Révolution, a-t-il pu devenir durant plus de vingt ans le « Roi de Paris » ? D'une révolution à l'autre, de 1830 à 1848, sa plume conquérante bouleverse le théâtre et impose une nouvelle forme de roman : le roman historique, que les journaux s'arrachent pour leur feuilleton.
Le règne de ce monarque des lettres traverse certes des turbulences que soulèvent ses pratiques éditoriales réprouvées, les inconséquences de sa conduite et les scandales de sa vie privée. Mais sa verve, sa bonhomie, sa générosité, son génie de vie l'emportent sur ces vices qui sont plutôt des fantaisies.
Claude Schopp nous invite à suivre pas à pas le géant débonnaire dans les lieux qu'il a hantés, afin de composer la carte de son Paris qu'il a autant haï qu'il l'a aimé.
"J'ai plus écrit de toi Paris que de moi-même / Et plus qu'en mon soleil en toi Paris j'ai cru." De sa naissance, qu'il situera en forme de plaisanterie "sur l'esplanade des Invalides", au petit appartement de la rue de la Sourdière, et jusqu'à sa mort, rue de Varenne, Aragon n'aura quitté Paris que quelques mois, toujours sous la contrainte de l'Histoire. L'explorateur surréaliste de l'insolite urbain, le "paysan" de Paris, sera celui aussi de tous les lieux et milieux : des Beaux quartiers à l'est ouvrier de la capitale, des frénésies des années 1920 aux cortèges militants, jusqu'au quartier des Halles du noctambule des années 1970. Il n'est pas de lieu qu'il n'ait observé, de "gris de Paris" qu'il n'ait saisi et chanté. La vie et l'oeuvre, ici nouées, constituent le guide de la redécouverte d'une capitale indissociable de son poète : "Arrachez-moi le coeur vous y verrez Paris."
"J'erre à travers mon beau Paris sans avoir le coeur d'y mourir" chante Guillaume Apollinaire dans sa célèbre complainte du Mal aimé.
Paris, à l'époque d'Apollinaire, est le creuset d'une formidable épopée littéraire et artistique dont il sera le chantre, le précurseur, l'arrangeur. Il y est poète bien sûr, mais aussi chroniqueur, critique d'art, patron de presse. C'est là qu'il travaille, c'est là qu'il aime vivre entouré de ses amis, c'est là qu'il encense l'existence.