Il est mort jeune, à quarante-cinq ans, mais il laisse une oeuvre considérable, labyrinthique, construite comme autant d'expériences d'écriture. Une vie anéantie à peine commencée - père tué en 1940, mère disparue à Auschwitz. Pas de souvenirs d'enfance. De cette amnésie, Georges Perec fera le ressort de sa création littéraire : il ne cesse de chercher à retisser des liens et des repères par les lettres, le jeu, l'invention narrative. Son oeuvre trace des chemins obliques pour lire le monde et son histoire. La vie de cet homme qui s'est reconstruit grâce à sa passion des mots s'entrevoit essentiellement à l'ombre et à la lumière de ses livres.C'est en les lisant que Claude Burgelin s'efforce de retrouver la trame d'une vie et les secrets d'un imaginaire qui continue à fasciner par son charme indicible et ce qu'il conserve d'énigmatique. Il accompagne une enfance cassée avant d'être recréée par les ressources de l'intelligence. Esquisse le portrait d'un jeune homme déterminé à affronter l'existence en écrivant. Dessine un Perec partagé entre le travail de bureau et l'artisanat de l'écriture, expérimentateur de l'art d'écrire et de dire, paysan de Paris à la recherche de «l'infra-ordinaire», présent-absent de sa judéité qu'il revisite à Ellis Island, homme d'amitiés et de grands rires. Il vivra entouré d'une seule vraie parenté, tôt retrouvée auprès de certains auteurs, la famille de cet enfant de la littérature, qui a su devenir, par un infatigable labeur, un écrivain singulièrement heureux.
Philip Roth (1933-2018) est mort trois ans avant la parution de cette monumentale biographie qui retrace le roman de sa vie d'homme et d'écrivain. Mais il en avait accompagné l'élaboration, de près, sans s'en mêler, laissant grands ouverts les trésors inépuisables de ses archives, de son infaillible mémoire, de son expérience des hommes et des choses.Blake Bailey a passé plusieurs années à interroger les parents, les familiers, les détracteurs, les amours tumultueuses, épisodiques ou indéfectibles, les oeuvres enfin qui peuplent cette existence singulière. Il brosse l'itinéraire d'un enfant de l'assimilation devenu l'ausculteur des grandeurs et des travers de l'exceptionnalisme américain, du destin juif, des rapports entre les hommes et les femmes, des secrets de la création littéraire. Il décrit l'austérité sédentaire, exténuante, d'un écrivain obsédé par son art au service de la recréation romanesque du réel. Il évoque ses amitiés complexes avec d'autres géants de la littérature - Saul Bellow, Updike, Mailer, Styron, Milan Kundera... - et son engagement pour les écrivains d'Europe centrale cloîtrés derrière le rideau de fer. Il raconte sans fard, de cet homme qui a beaucoup aimé les femmes, les deux mariages naufragés dont le souvenir cuisant ne cessera de le hanter. Et, chemin faisant, il reconstitue le dialogue ininterrompu entre l'expérience personnelle et l'oeuvre intemporelle de ce témoin d'une époque qui était en train d'expirer au moment où lui-même quittait la scène.
Il fut la personnalité française la plus célèbre dans le monde, fêté comme un bienfaiteur de l'humanité, symbole de la lutte victorieuse contre les épidémies. Louis Pasteur (1822-1895) est devenu un mythe déjà de son vivant, mais son itinéraire personnel et des pans entiers de son oeuvre restent dans l'ombre.Qui était vraiment cette figure longtemps vénérée avant que des critiques mettent en doute la probité de l'homme et la valeur de son oeuvre jusqu'à les rendre évanescentes ? Pour le retrouver, cette biographie propose de ne jamais séparer la science de Pasteur de sa vie personnelle, de ses relations, de ses idées philosophiques et convictions religieuses. Chez lui, le bonheur familial et l'aventure de la recherche furent intimement liés. Il ne pouvait envisager son savoir hors des sollicitudes de l'époque. D'où ses études sur le déclin de la culture des vers à soie, mais aussi sur les maladies du vin, la préparation du vinaigre ou de la bière et la pasteurisation des produits alimentaires à laquelle son nom reste attaché. Puis, à l'automne de sa vie, les découvertes fondamentales sur les maladies infectieuses et enfin la vaccination qui couronnent un demi-siècle de recherches.C'est en embrassant l'ensemble d'une existence singulière que ce livre renouvelle l'interprétation de plusieurs facettes d'une oeuvre qu'il invite à redécouvrir. Sans rien dissimuler des faiblesses de l'homme, ses ambitions effrénées, son oubli des apports de ses prédécesseurs et de ses collaborateurs, sa hargne polémique... Un immense savant sous les traits d'un homme ordinaire jusque dans ses défauts.
Sur cette duchesse devenue reine, statufiée en idole de la Bretagne, il existe une littérature pléthorique mais qui repose sur des sources fragiles et plutôt rares. Pour reconstituer son itinéraire si bref et si chahuté, il faut suivre ses pas en retrouvant et en interrogeant ceux qui l'ont accompagnée.L'existence d'Anne de Bretagne se lit comme un précipité de vie : duchesse à onze ans, reine de France à quinze ans, mère à seize ans, veuve à vingt et un ans, remariée et reine à vingt-deux ans, enceinte à quatorze reprises au moins, mais ne laissant que deux héritières quand elle meurt à trente-sept ans. De son vivant et plus encore depuis sa mort, on s'est emparé d'elle pour soutenir des causes inconciliables, l'indépendance du duché de Bretagne qu'elle a défendue en effet jusqu'au bout ou, au contraire, l'annexion pure et simple de l'Armorique au royaume de France. Anne est au coeur de cet enjeu séculaire. Son règne achève le siècle d'or d'un État breton qui croyait pouvoir jouer dans la cour des grands avant de céder à plus puissant que lui.Cette biographie dessine le portrait intime d'une de nos premières femmes politiques. Elle en restitue les croyances, l'intelligence de l'histoire, le goût des images enluminées, l'art de la sociabilité décliné au féminin - c'est à elle qu'on doit l'invention de la cour des Dames.À la faveur de son destin singulier et au fil des pages s'écrit également, en miroir, l'histoire croisée du royaume des lys et du duché de l'hermine.
Très jeune, Sarah Bernhardt va faire ses débuts au théâtre ; en 1862, à l'âge de dix-huit ans, elle joue son premier rôle à la Comédie-Française. pendant dix ans, elle multiplie les apparitions dans de petits rôles avant de jouer la reine d'Espagne dans la reprise de Ruy Blas où son interprétation est très remarquée. En 1872, elle revient à la Comédie-Française dont elle devient sociétaire en 1875 et où elle interprète Dona Sol dans Hernani. Elle est en train de devenir une légende vivante car, à ses talents de comédienne, viennent s'ajouter ceux de peintre et de sculpteur. Elle est également l'inspiratrice de nombreux peintres et Alphonse Mucha l'immortalise sur ses affiches. En 1879, Sarah Bernhardt fait sa première tournée en Angleterre. Elle connaît un grand succès dans Phèdre, avant d'aller aux Ètats-Unis où elle remportera un triomphe. Elle est dorénavant une star internationale et parcourt le monde du Caucase au Brésil avec la troupe qu'elle a créée. Elle sait jouer aussi bien des rôles du répertoire classique que des rôles de comédies légères comme Froufrou ou Fédora et elle est l'unique actrice à avoir triomphé en interprétant successivement le rôle d'Ophélie puis celui d'Hamlet. Sa vie amoureuse est également bien remplie. Une correspondance fournie témoigne de l'empressement de ses amants à son égard. Àtravers une correspondance inédite, des souvenirs d'amis et les propos écrits de Sarah, les auteurs ont réussi à tracer un magnifique portrait d'une femme hors du commun, qui fut aussi la plus grande comédienne de son temps.
Il existe un mythe de Molière édifié sur un monceau de légendes, approximatives, artificieuses, extravagantes : mari jaloux et malheureux ; d'humeur rêveuse et mélancolique ; versificateur maladroit ; acteur doué pour le seul jeu comique ; malade consumé par ses mauvais poumons...
Des générations de biographes ont colporté ces fables qui composent encore aujourd'hui son portrait.
Comment retrouver le vrai Molière, celui que ses contemporains ont connu et qui nous est largement dérobé ? Il ne subsiste de lui ni manuscrits ni lettres ni écrits intimes. Pour connaître au plus près la figure de l'homme, l'itinéraire de l'acteur, l'audace du directeur de théâtre, l'ingéniosité créatrice de l'auteur, il faut revenir aux témoignages méconnus, aux documents oubliés, aux traces matérielles - tout ce qui restitue, souvent par effraction, les travaux et les jours de l'homme, la vie d'une famille hors norme, les tribulations d'une troupe d'exception, la séduction de l'artiste-courtisan devenu le favori de Louis XIV, et qui éclairent les fulgurances du plus grand auteur comique occidental.
Georges Forestier tente de se glisser dans l'intimité du créateur. Il en reconstitue la formation intellectuelle, révèle les secrets de fabrication de ses oeuvres et fait découvrir la logique qui préside à l'enchaînement des pièces en perpétuel renouvellement. Au fil des spectacles, à la Cour comme à la Ville, et d'un triomphe à l'autre, c'est le genre même de la comédie que Molière ne cesse de révolutionner. Voilà pourquoi cet alchimiste reste indéfiniment le contemporain de ses spectateurs et de ses lecteurs.
Depuis sa mort, voici un demi-siècle, la stature de Céline n'a cessé de croître : qu'on le veuille ou non, il est un des auteurs majeurs du XXe siècle, un des plus lus, des plus commentés et assurément des plus disputés. Céline a inventé une manière entièrement nouvelle d'écrire le français. Son Voyage au bout de la nuit a été ressenti comme un choc, comme une révolution dans la manière de dire par le roman l'expérience humaine. C'est son oeuvre de polémiste qui devait plus tard lui aliéner durablement nombre de lecteurs. Mais peut-on vraiment dissocier le génie de l'écrivain des violences de l'homme ? Pour Henri Godard les deux sont inséparables. Cette biographie se propose précisément de retracer le chemin de la vie à l'oeuvre, tout comme elle s'efforce de pénétrer le secret de cette existence à l'épreuve du travail de l'écriture. Elle part à la découverte des vérités contradictoires de Céline, que restitue par fragments, de l'enfance à la mort, une abondante correspondance récemment réunie. C'est un portrait souvent inattendu qui se dessine peu à peu : de l'enfant sage et affectionné du Passage Choiseul au reclus de Meudon, en passant par le jeune commis de boutique, le cuirassier à jamais marqué par la guerre, le médecin des quartiers pauvres, l'antisémite furieux, le prisonnier de Copenhague. mais aussi l'amoureux de la mer et des ports, le copain qui adore parler sexe, enfin, le plus méconnu, l'homme qui mit le corps féminin et la danse au centre de sa vie. Au fil des pages et des années, c'est une figure plus intime, plus complexe, plus déchirée aussi, que découvre le lecteur. Cet itinéraire hors du commun échappe décidément aux simplifications péremptoires.
«Une drôle de bonne femme» pour Gauguin, son petit-fils; «la cousine de Marx et la grand-mère du MLF» pour ses admirateurs de 68; une héroïne romantique pour André Breton:tout au long de sa courte vie, Flora Tristan (1803-1844) n'a cessé de brouiller les représentations convenues. Elle qui se voyait comme «un être à part» anticipe les sensibilités de notre époque. Née aux marges de la société, elle refuse très jeune de confiner son existence; de cette marginalité même elle fera un étendard:la Paria, une «indignée» avant l'heure.Cette biographie recompose l'itinéraire d'une femme intempestive qui bouscule ses contemporains en se risquant dans cette chasse gardée masculine qu'est l'espace public. Constituer la classe ouvrière, proclamer l'égalité des sexes, redéfinir le code amoureux en consacrant le principe du consentement explicite des femmes:voilà la mission qu'elle se donne. Inlassablement, elle prend la plume, s'aventure sur le terrain pour affronter le spectacle de la misère, au Pérou, en Angleterre et à travers la France, à la rencontre des prolétaires - compagnons du Tour de France, associations ouvrières, vétérans des insurrections de canuts...Flora Tristan, enfant du siècle des prophètes et des mages romantiques, transfère sur le peuple une sacralité créée par la Révolution.L'originalité de celle qui se voyait en apôtre de l'égalité est d'avoir placé l'identité sexuelle au coeur de la question sociale, avec une netteté et une radicalité inédites. Elle se sentait appelée à «faire sonner le 89 des femmes» pour enfin pouvoir réaliser le 89 des ouvriers, et ainsi l'émancipation du genre humain.
Thiers, Bainville, Lefebvre, Tulard. Napoléon ne manque pas de biographes. On s'en étonnerait à tort. Les hommes qui ont laissé une empreinte aussi profonde sur leur temps sont-ils si nombreux? L'histoire de Napoléon, son souvenir, son mythe ont littéralement obsédé le XIXe siècle et une partie du XXe. Aujourd'hui, la légende a pâli, le monde a changé. L'épopée guerrière de l'Empire ne fait plus guère rêver nos contemporains, pour qui la guerre apparaît l'incarnation du Mal. Mais Napoléon n'a pas été seulement un conquérant. Stratège hors pair, il est aussi le plus doué des élèves de Machiavel dans l'art de gouverner. Plus que le guerrier, c'est le Premier consul qui, pour avoir fini la Révolution et fondé les institutions dont elle avait eu l'idée, fascine encore. À la fois héros ancien et bourgeois moderne, il occupe une place unique dans l'histoire universelle.
Ce premier volume, Bonaparte, retrace l'histoire du jeune Napoléon, de la Corse aux Tuileries, des années obscures de l'enfance jusqu'à la proclamation du Consulat à vie en 1802 où, sans encore porter le titre d'Empereur, il rétablit à son profit la monarchie héréditaire. S'il est dans la vie de chaque homme, comme dit Jorge Luis Borges, un moment où il sait «à jamais qui il est», ce livre s'attache à le déterminer pour comprendre comment Napoléon est devenu Napoléon.
«Je porte en moi la mélancolie des races barbares, avec ses instincts de migrations et ses dégoûts innés de la vie, qui leur faisait quitter leur pays, pour se quitter eux-mêmes.» Dans cette déclaration de Gustave Flaubert (1821-1880), qu'y a-t-il de vrai? Le migrant, à part le grand voyage en Orient et quelques escapades en Bretagne, en Angleterre ou en Corse, a surtout vécu dans le «trou» qu'il s'est «creusé» à Croisset, sa demeure normande, où il écrit son oeuvre et où il meurt foudroyé. Peut-on se fuir soi-même, bien qu'on professe la poétique de l'«impersonnalité»? Peut-on lâcher son siècle? Le détester, oui, lui préférer une Antiquité imaginaire, certes, mais Flaubert, comme tout le monde, est entraîné dans les tourbillons du temps. Son oeuvre portera cette double marque:le rêve carthaginois d'un monde flamboyant à jamais disparu mais recréé et la peinture vengeresse du siècle de Monsieur Prudhomme et du pharmacien Homais. Michel Winock porte un regard d'historien sur cette vie tout entière vouée à la littérature. Il raconte l'enfance créative de l'écrivain, le suit dans ses pérégrinations de jeunesse, décrit ses amours tumultueuses, l'accompagne dans les salons parisiens et met en scène sa ferveur dans l'amitié - Maxime Du Camp, George Sand, les Goncourt, Zola, Daudet, Maupassant, Tourgueniev... Son dégoût proclamé de la vie, Flaubert ne l'a transcendé ni par l'expérience amoureuse (somme toute décevante), ni par la foi en Dieu (il est incroyant), ni par quelque idéal politique (scepticisme revendiqué), mais par la religion de l'Art, dont il fut un pèlerin absolu.
Il n'a cessé d'affoler les imaginations avec ses prophéties sur l'avenir et les malheurs de l'humanité. Ses prédictions se sont prêtées à toutes les interprétations au gré des chaos de l'histoire. Qui est Michel de Nostredame (1503-1566), réinventé en « Nostradamus », le devin-astrologue provençal, objet d'idolâtrie ou d'exécration ? La légende a fini par voiler sa voix et sa figure.
Cette biographie passe au crible la masse des écrits et des dires attachés à ce personnage énigmatique. À la faveur de documents récemment exhumés, elle révèle ses traits inédits, en restituant ses passions, ses emportements, ses croyances religieuses et son savoir éclectique, au confluent du platonisme, de l'occultisme, du judaïsme, du christianisme et de l'alchimie. Elle revient sur ses curieuses entrevues avec Henri II, Charles IX et Catherine de Médicis, magnifiées ensuite pour la postérité. Elle suit ses tribulations d'apothicaire, à la recherche de recettes secrètes et de philtres magiques. Elle évoque le médecin dans son combat contre la peste comme dans ses relations complexes avec les tenants de la médecine officielle et les astrologues patentés. Elle raconte ses succès et ses déboires d'interprète des astres et des prodiges, avec ses almanachs et pronostications aux tirages faramineux, et avec son commerce d'horoscopes recherché à travers l'Europe. Autant de prédictions qui inquiétaient dans une époque de grandes violences.
Entre les impostures qu'on lui attribue et le génie visionnaire qu'on lui prête, ce livre fait apparaître la vérité d'un homme qui n'a pas fini de subjuguer les esprits.
C'est au chevet d'un Marcel Proust mourant que s'affirme la vocation littéraire de Paul Morand; et c'est dans le vacarme d'une modernité incarnée par Jean Cocteau qu'elle va s'épanouir. Ce rejeton de la bourgeoisie parisienne, éclairée, artiste, aura connu les astres de la bohème comme de l'élite républicaine; deux mondes étanches qui vont former sa personnalité et dessiner sa double carrière de diplomate et d'écrivain. D'emblée, dans ses nouvelles et ses romans, Morand épouse les prouesses de son siècle en rompant avec un monde englouti à jamais par la Guerre. Il roule vite, il vole loin. La Terre a rétréci et il le fait savoir. L'écrivain au style étincelant, classique mais si reconnaissable, fait découvrir aux Français la magie de l'ailleurs. Sous de fausses allures de dilettante, cet amateur de sport et de jolies femmes trouve le temps d'écrire une oeuvre très ample qui ne s'arrêtera qu'à sa mort. S'il n'a jamais été fâché avec la géographie, Morand l'aura parfois été avec l'histoire. En 1940, il choisit Vichy alors qu'il est en poste à Londres. Sa proximité avec les rouages de la Collaboration et sa fidélité indéfectible à Pierre Laval lui vaudront, la guerre finie, des années d'opprobre, d'exil et de solitude, Cest à travers ses publications posthumes qu'apparaît au grand jour un antisémitisme longtemps occulté. La lecture d'archives jusqu'ici inaccessibles, journaux intimes, correspondances inédites, a permis à l'auteur de cette biographie, la première depuis un quart de siècle, de signer le portrait d'un Morand à tant d'égards méconnu. Cette existence, faite de trajectoires superposées, trouve enfin ses ressorts et sa vérité.
En 1970, à quarante-cinq ans, Yukio Mishima, le plus brillant écrivain de sa génération, auteur de quarante romans, dix-huit pièces de théâtre, vingt volumes de nouvelles et autant d'essais littéraires, à la fois metteur en scène, acteur, escrimeur d'élite et athlète, déjà trois fois pressenti pour le prix Nobel, horrifiait le monde entier en se suicidant en public par seppuku:après qu'il avait enfoncé un sabre dans son abdomen, un cadet qui l'assistait achevait le rituel en lui tranchant la tête. C'était la conclusion épique et sanglante d'une vie tout entière gouvernée par une quête éperdue de pureté et de sublime.Deux ans plus tard, John Nathan entreprenait la biographie de cette figure hors du commun, qu'il avait un moment fréquentée avant de s'en éloigner. L'ouvrage, paru voici un demi-siècle et republié aujourd'hui révisé et enrichi d'une préface inédite de l'auteur, reste un phare dans l'océan des études consacrées à l'auteur de Confession d'un masque. Nourri des témoignages directs de Mishima lui-même, de sa veuve, ses parents, ses proches et de nombreux documents jusqu'ici inaccessibles, il restitue le portrait complexe, volcanique, de cet homme à la volonté surhumaine. John Nathan décrit la vie apparemment ordinaire d'un époux et père épris d'absolu. Il explore le génie et la manière d'un écrivain aux multiples registres. Il interroge l'homosexualité et les pulsions masochistes qui l'habitaient, son obsession de la mort, son ambition de se constituer en légataire de l'idée japonaise du beau. Et il met en miroir le goût de Mishima pour les choses modernes et son attachement au legs impérial, comme son hostilité à la démocratie qui aurait spolié le Japon de son âme.
«Prince de l'ambiguïté», personnalité ondoyante, maître de l'équivoque, François Mitterrand a souvent déconcerté ses contemporains:vichyste et résistant, homme de droite devenu chef de la gauche, anticommuniste allié aux communistes, dénonciateur de la V? République dont il finit par incarner comme personne les formes et les usages les plus discutables. Cet homme doublement enraciné dans sa Saintonge natale et dans son fief du Nivernais, aussi féru de littérature et d'histoire que de politique, sut cultiver le secret, dérouter ses partisans et se montrer un jouteur de première force, combatif mais patient, stratège jamais découragé par l'échec. Chez Mitterrand, le privé et le public paraissent si intimement noués que l'un n'est intelligible qu'à la lumière de l'autre. Michel Winock les met en miroir pour explorer la vérité d'un enfant du siècle, qui a traversé les époques, les milieux et les idées sans jamais en renier aucun. Devenu Président, François Mitterrand a marqué en profondeur la vie politique française. Figure originale d'un monarque de gauche, il réussit à imposer l'alternance et, par là, à consolider la Constitution. S'il échoue à réaliser les espérances socialistes, il ouvre à la France le nouvel horizon de la construction européenne. Dans la maladie, cet épicurien fit preuve jusqu'à la fin d'un stoïcisme digne d'admiration. Honni ou adulé, il reste un grand homme politique du XX? siècle. Complexe, séduisant, attachant, détesté, il a suscité des fidélités inconditionnelles et des rancunes indélébiles. Plus on le découvre et plus on mesure ce qu'il a d'insaisissable.
On l'imagine souvent retiré dans sa tour pour caresser les muses et élaborer une sagesse intemporelle. Mais Montaigne ne peut se résumer à l'image du philosophe voué à la contemplation. C'est un seigneur à la tête d'un vaste domaine, avec ses paysans, ses vignes et ses champs. Un gentilhomme pétri de culture nobiliaire, dont il brave les certitudes pour leur substituer un idéal inédit : conquérir la grandeur dans la « médiocrité » d'une existence ordinaire. Un ancien magistrat aussi, pénétré d'un riche savoir juridique, qu'il mit pour un temps en oeuvre au parlement de Bordeaux, ville dont il deviendra le maire. Un acteur politique surtout, happé par la tourmente des guerres de religion, la violence des haines confessionnelles et la hantise de la mort qui ensanglante la France.
On ne peut comprendre, écrit Arlette Jouanna, le destin singulier de cet homme d'exception sans mettre en miroir les différentes figures qui composent sa personnalité et le terroir historique dans lequel elles s'enracinent. C'est d'un regard d'historien qu'il faut en effet redécouvrir son itinéraire tumultueux et la fascinante diversité d'une pensée toujours en mouvement.
Si Montaigne nous parle encore, c'est qu'au milieu des troubles civils, il en appelle à la « raison publique » pour transcender les intolérances ; c'est qu'il invite à affranchir l'esprit du poids des conventions arrêtées et des préjugés invincibles. Ni le vestige d'un passé révolu, ni le prédicateur d'un individualisme hédoniste, mais tout simplement notre contemporain.
De Vercingétorix, on connaît surtout le nom, sa lutte héroïque contre Rome, sa défaite à Alésia et le récit biaisé qu'en donnera Jules César. Mais d'autres écrits et les trésors exhumés par l'archéologie invitent à le redécouvrir et, au miroir de ce destin hors du commun, à explorer des pans enfouis de l'histoire de l'ancienne Gaule. Cet adolescent arverne, fils de roi, tôt formé à la chose militaire, s'est hissé tout jeune au commandement suprême de la résistance gauloise au conquérant romain. Revers militaire qui recouvre une victoire politique - l'unification des peuples gaulois - dont il deviendra le symbole.
Cette biographie, la première qui lui est consacrée, n'entend céder ni aux hagiographies complaisantes, ni aux légendes controuvées, ni aux appropriations idéologiques. Elle retrace à nouveaux frais, à partir de sources souvent oubliées, l'itinéraire singulier de cette figure d'exception : son enfance au sein d'une lignée aristocratique ; l'éducation reçue par ses maîtres druides ; sa formation, surtout, auprès de César dont il est devenu l'otage ; la rébellion enfin où il se découvre grand leader politique et redoutable chef militaire. Une vie si brève qui aura nourri une si longue postérité.
En suivant ses pas, au fil des chapitres, c'est une nouvelle lecture de l'histoire du peuple et de la civilisation gaulois que ce livre fait découvrir ; une société en plein essor, déjà bien structurée, agitée par des assemblées remuantes et ouverte au monde, à l'ombre menaçante de l'impérialisme romain.
Aragon s'est beaucoup raconté, en prose et en vers ; il n'a cessé d'appliquer avec virtuosité le principe du "mentir vrai" à sa vie riche déjà de tant d'énigmes et de paradoxes : enfant illégitime à qui le secret de ses origines fut longtemps caché ; antimilitariste décoré de la Grande Guerre puis médaillé de la Résistance ; dandy dadaïste devenu militant discipliné du parti de Staline et de Thorez ; poète surréaliste converti au réalisme socialiste ; homme à femmes - et quelles femmes ! - métamorphosé en chantre de l'amour conjugal, avant de découvrir sur le tard le goût des garçons...
Tous ces personnages différents n'en font qu'un seul dont l'itinéraire littéraire, intellectuel et politique transcrit le génie et le chaos du siècle. Philippe Forest recompose à nouveaux frais le roman somptueux de cette longue existence, avec ses chapitres glorieux et ses pages lugubres. Il révèle le jeu de miroirs par lequel se réfléchissent l'oeuvre et la vie d'un écrivain surdoué à qui aucune des formes de la littérature n'était étrangère.
Et si cette oeuvre continue à nous toucher, alors que cette vie n'en finit pas de nous déconcerter, c'est qu'elle possède une jeunesse, une insolence, une énergie sur lesquelles le temps n'a guère eu de prise. Aragon a été aimé autant que haï, admiré autant que décrié, à la fois pour de bonnes et de mauvaises raisons. Il ne s'agit dans ces pages ni de l'acquitter ni de le condamner, mais d'en revenir au mystère même de celui dont on a pu dire qu'il avait été sans doute "le dernier des géants de notre temps".
Lorsqu'à la fin des années 1920, André Malraux fit irruption sur la scène littéraire, il imposa d'emblée un ton, un style, un personnage. En lui, l'action et la littérature, la politique et la morale semblaient se réconcilier. Doué du génie de la séduction et de l'autopromotion, l'auteur des Conquérants puis de La Condition humaine voulait marquer ce monde de «cicatrices».Restent aujourd'hui ses livres, que l'on peut apprécier en oubliant l'homme, mais on se prive alors de leur personnage principal. «Ma vie ne m'intéresse pas», disait-il. De fait, seule sa vie l'intéressait. Il la conçut comme une oeuvre, et peut-être a-t-elle été son meilleur roman. Et c'est ainsi qu'Olivier Todd la retrace et l'analyse, sans complaisance et sans agressivité. S'attaquer à la biographie d'un écrivain ne signifie pas en effet attaquer sa vie et son oeuvre. Mais aucune des questions que soulèvent celles de Malraux n'est éludée. Son enfance, qu'il disait détester, fut-elle malheureuse ? A-t-il été révolutionnaire ? En quoi ? Résistant et gaulliste aussi tôt qu'on le dit ? Avec passion ou par calcul ? Ministre efficace ou rêveur ?S'appuyant sur des témoignages et des documents souvent inédits, le dépouillement d'archives publiques et privées inexploitées, Olivier Todd démêle réalités vécues et imaginées, dévoilant un homme qui n'a passionnément agi que pour écrire, un écrivain qui doutait de lui-même, un personnage sans méchanceté ni mesquinerie, dont les métamorphoses et la mythomanie ont nourri une légende.
Ce livre raconte l'histoire de Guillaume Apollinaire, ou comment Wilhelm de Kostrowitzky, apatride aux origines incertaines, est devenu l'un des plus grands poètes français du XXe. Doué d'un talent protéiforme, conteur, journaliste, critique d'art, critique littéraire, éditeur, directeur de revue, il jouit d'une intuition et d'une réceptivité prodigieuses. Ami des peintres, défenseur de l'art moderne, il impose ses idées et ouvre des voies nouvelles à la poésie de son époque, tout en restant attaché au passé, aux vieux livres et aux souvenirs. De «La Chanson du mal-aimé» aux Poèmes à Lou, des fantaisies visionnaires du Poète assassiné à l'invention des calligrammes, son oeuvre, pleine de contrastes et de surprises, manifeste le don le plus merveilleux, celui d'enchanter la réalité.
Aucune biographie d'envergure n'avait paru sur Apollinaire depuis plus de quarante ans. Fondée sur une somme exceptionnelle de documents originaux, souvent inédits, cette biographie littéraire et historique unit la saveur du réel au plaisir de la recherche et de la recréation. Peuplée d'écrivains et d'artistes européens, qui éclairent la personnalité du poète et le cours de la modernité, elle trace le portrait d'un passeur au caractère étonnamment mobile et parfaitement plastique. Des couloirs du Vatican aux rives du Rhin, des bords de la Seine aux tranchées de Champagne, elle explore un monde machiné par les échanges et les communications, épris de vitesse et de nouveauté, mais aussi fondé sur des valeurs héritées d'un autre temps. Un monde en équilibre instable que la Grande Guerre bouleverse à jamais. Le monde d'Apollinaire.
Comment rendre compte d'une vie qui comporte tant d'inconnues ? Quelques témoignages, des vestiges de correspondance, des archives longtemps restées muettes restituent, par fragments, l'existence tumultueuse du premier géant des lettres françaises. Mais c'est dans son oeuvre surtout, marquée par les bruits et les fureurs du siècle, ou encore dans ses liens avec les grands du royaume et de la culture humaniste que se laisse découvrir le véritable Rabelais. Mireille Huchon fait revivre le destin exceptionnel d'un homme intimement engagé dans les affaires du temps et constamment en quête de tous les savoirs : juriste, médecin, mathématicien, sans doute alchimiste, poète, romancier, éditeur aussi, très impliqué dans le travail de l'imprimerie, lieu alors de toutes les audaces et de tous les dangers. Défilent ainsi les multiples figures d'un Rabelais souvent impudent, parfois imprudent, successivement franciscain, bénédictin, curé, à la fois humaniste et espion, commensal de voluptueux prélats et contempteur des vices de la papauté, coureur de bénéfices aussi bien que de femmes. Cet « Eschyle de la mangeaille », cet « Homère bouffon » a hissé la satire à des cimes jusque-là inégalées en puisant dans l'insondable réservoir de l'apparente trivialité des choses. C'est pourtant une oeuvre aux enjeux philosophiques et moraux longuement médités, une réflexion exceptionnelle sur la langue française et la création d'une prose littéraire, que Rabelais invite à décrypter sous les rires et les éclats provoqués par Gargantua, Pantagruel et leurs compagnons. Au fil des pages se dessine, derrière le manipulateur des mots et des êtres, un portrait inédit de l'extravagant maître François Rabelais.
Jean-Paul II restera le dernier «géant» de notre époque. Au cours d'un pontificat exceptionnellement long, le premier pape polonais de l'Histoire aura joué un rôle à la fois majeur et contradictoire. D'une part, contre toutes les modes, il a obstinément défendu la tradition, la liturgie, le dogme de l'Église catholique, ce qui lui vaut parfois une image conservatrice, voire réactionnaire, notamment sur le plan moral. Mais à l'aube du III? millénaire de l'ère chrétienne, il a surtout modernisé et «mondialisé» cette Église d'un milliard de fidèles ; il a replacé l'Homme, sa dignité et sa responsabilité, au centre du message évangélique contemporain ; sur le plan politique, il fut un des principaux acteurs de la chute du communisme en Europe et n'a cessé de se battre pour la paix et les droits de l'homme ; il a effectué quelque cent voyages apostoliques, souvent spectaculaires, y compris dans le monde musulman ; il a multiplié les rassemblements de jeunes, même dans les sociétés les plus déchristianisées comme la France ; il a spectaculairement dénoncé les fautes passées de l'Église, et a contribué à la réconcilier avec le monde juif.Qui est donc le vrai Jean-Paul II ? Élu pape le 16 octobre 1978 à l'âge de cinquante-huit ans, Karol Wojtyla avait été tour à tour comédien, poète, journaliste, aumônier, philosophe, professeur et archevêque dans une Pologne victime successivement du nazisme et du communisme. Ce passé riche et contrasté, qui a demandé à l'auteur plusieurs années d'enquête, éclaire la personnalité et l'oeuvre d'un pape hors du commun.
Il est né sous Louis XV dans une Bretagne encore féodale ; il est mort en pleine révolution de 1848.
Au cours de cette longue existence ont passé les régimes et les constitutions. Il a beaucoup vécu et beaucoup vu depuis Combourg : le Paris révolutionnaire, les Indiens de Niagara, les taudis de Londres, Rome par deux fois, les corneilles de l'Acropole, les murs de Jérusalem. Et au milieu de ces tribulations, il a eu le temps de devenir le plus grand écrivain de sa génération. C'est aussi le premier " enfant du siècle " à être entré en politique sous la Restauration pour ne plus en sortir.
Il en a épousé les vicissitudes sans jamais renoncer à son idéal de liberté aristocratique, qui conjugue la tradition et le progrès, la légitimité royale et la citoyenneté, le double héritage de l'Ancien Régime et de la Révolution. C'est dire que pour ses contemporains, Chateaubriand fut souvent une énigme. Jean-Claude Berchet reconstitue ce parcours complexe dans une biographie magistrale qui tisse des liens continus entre le génie littéraire, la vie amoureuse et les passions politiques du grand homme.
Au fil des pages se dessine un portrait moral contrasté : le " bon garçon " de la famille et des intimes, ou le pair de France qui interpelle les rois ; le séducteur irrésistible et le fidèle adorateur de Juliette Récamier ; le poète de la mélancolie ou de la tendresse et le polémiste incisif de la Légitimité. De ce destin singulier que Chateaubriand a voulu styliser dans ses Mémoires, ce livre restitue les aléas imprévisibles et méconnus, autant dire le charme secret.
On croit connaître Fellini à travers les films dans lesquels il s'est apparemment raconté : Les vitelloni, Huit et demi, Roma, Amarcord. Mais le souvenir inventé l'emportait souvent chez lui sur le souvenir véridique, comme, dans ses films, le décor entièrement reconstitué se substitua au décor réel, quand, après le néo-réalisme de ses débuts, il adopta une conception subjective du cinéma, mêlant nostalgie, rêves et pressentiments.
Ami du réalisateur pendant quarante ans, Tullio Kezich nous livre un témoignage irremplaçable qui sera, en même temps, un ouvrage de référence pour les admirateurs de Fellini, et les cinéphiles en général. D'abord, il y eut un jeune homme maigre, arrivé à Rome en 1939 en vue d'être dessinateur dans des hebdomadaires humoristiques, qui, devenu scénariste, découvrit aux côtés de Rossellini qu'on pouvait faire du cinéma avec la même liberté qu'en crayonnant ou en écrivant. Des Feux du music-hall (1950), réalisé avec Alberto Lattuada, à La voce della luna (1990) se déroule un itinéraire mouvementé qui pourrait même paraître chaotique, n'étaient des constantes remarquables : l'association si féconde avec Nino Rota ; l'amitié avec Marcello Mastroianni, qui fut son alter ego à l'écran ; surtout l'union indéfectible avec Giulietta Masina, en dépit d'aventures dans la « cité des femmes » sur lesquelles l'auteur confie quelques amicales indiscrétions.
Utilisant des documents inédits, Tullio Kezich jette aussi un précieux éclairage sur les rapports de Fellini avec la psychanalyse et le spiritisme, qu'il approcha et pratiqua en amateur sceptique : curieux de tout ce qui pouvait nourrir son imagination, mais non moins soucieux de préserver la fraîcheur et la spontanéité de son monde intérieur.
De film en film, dont on suit chaque fois l'élaboration, par touches successives, se compose le portrait d'une personnalité aussi singulière qu'attachante, et de l'un des plus grands cinéastes du XXe siècle.
Yes'>#8220;When Matisse dies,yes'>#8221; Pablo Picasso remarked in the 1950s, yes'>#8220;Chagall will be the only painter left who understands what color really is.yes'>#8221; As a pioneer of modernism and one of the greatest figurative artists of the twentieth century, Marc Chagall achieved fame and fortune, and over the course of a long career created some of the bestknown and mostloved paintings of our time. Yet behind this triumph lay struggle, heartbreak, bitterness, frustration, lost love, exileyes'>#8212;and above all the miracle of survival.Born into near poverty in Russia in 1887, the son of a Jewish herring merchant, Chagall fled the repressive yes'>#8220;potatocoloredyes'>#8221; tsarist empire in 1911 for Paris. There he worked alongside Modigliani and Lyes'>#233;ger in the tumbledown tenement called La Ruche, where yes'>#8220;one either died or came out famous.yes'>#8221; But turmoil lay aheadyes'>#8212;war and revolution; a period as an improbable artistic commissar in the young Soviet Union; a difficult existence in Weimar Germany, occupied France, and eventually the United States. Throughout, as Jackie Wullschlager makes plain in this groundbreaking biography, he never ceased giving form on canvas to his dreams, longings, and memories. His subject, more often than not, was the shtetl life of his childhood, the wooden huts and synagogues, the goatherds, rabbis, and violinistsyes'>#8212;the whole lost world of Eastern European Jewry. Wullschlage brilliantly describes this world and evokes the characters who peopled it: Chagallyes'>#8217;s passionate, energetic mother, FeigaIta; his eccentric fellow painter and teacher Bakst; his clever, intense first wife, Bella; their glamorous daughter, Ida; his toughminded final companion and wife, Vava; and the colorful, tragic array of artist, actor, and writer friends who perished under the Stalinist regime.Wullschlager explores in detail Chagallyes'>#8217;s complex relationship with Russia and makes clear the Russian dimension he brought to Western modernism. She shows how, as Andryes'>#233; Breton put it, yes'>#8220;under his sole impulse, metaphor made its triumphal entry into modern painting,yes'>#8221; and helped shape the new surrealist movement. As art critic of the Financial Times, she provides a breadth of knowledge on Chagallyes'>#8217;s work, and at the same time as an experienced biographer she brings Chagall the man fully to lifeyes'>#8212;ambitious, charming, suspicious, funny, contradictory, dependent, but above all obsessively determined to produce art of singular beauty and emotional depth.Drawing upon hitherto unseen archival material, including numerous letters from the family collection in Paris, and illustrated with nearly two hundred paintings, drawings, and photographs, Chagall is a landmark biography to rank with Hilary Spurlingyes'>#8217;s Matisse and John Richardsonyes'>#8217;s Picasso.From the Hardcover edition.