1934. Yash (surnom de l'auteur) embarque à New York sur un bateau pour retourner vers sa ville natale, Lublin, en Pologne. Le voyage le mène au Havre, où il descend du bateau, prend le train, passe par Paris.
Là, il retrouve des amis artistes ou écrivains yiddish au Dôme, à Montparnasse. Toujours en train, il traverse l'Allemagne - devenue nazie l'année précédente - avant d'arriver en Pologne.
Il est défendu à un citoyen libanais de se rendre en Israël. Mais le narrateur, un jeune photographe franco-libanais, décide d'enfreindre la loi de son pays et ne pas suivre l'avis de sa famille. Arrivé à l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, il subit un interrogatoire de plusieurs heures. Les questions fusent et se répètent. « Comment s'appelle votre mère ? Comment s'appelle votre père ? Comment s'appelle votre grand-père ? Comment vous appelez-vous ? » Des questions qui reviennent comme une berceuse et qui voudraient obliger le narrateur à se définir de manière définitive. Lui qui avait pensé faire ce voyage pour mettre de côté sa part libanaise, mettre Beyrouth entre parenthèses...
Après Le nez juif, Sabyl Ghoussoub revient avec le récit de ce voyage interdit, un livre plein d'humour, de tendresse et parfois de colère.
La scénariste Dora Bessis est prête à tout, en cette année 1987, pour monter un film sur Eli Cohen, l'espion du Mossad qui, dans les années 1960, a infiltré les plus hautes sphères du pouvoir syrien, avant d'être démasqué et pendu à Damas en 1965. Dora le sait déjà, son film s'appellera Le loup de Damas et sera interprété par Robert De Niro dans le rôle de l'espion.
En 1962, l'auteur alors âgé de dix ans, découvre Kapò de Gillo Pontecorvo, l'un des tout premiers films de fiction traitant du génocide des Juifs par les nazis.
Ce film marquera le début de ce qui deviendra l'obsession de l'auteur. De David Rousset à Primo Levi, en passant par Raoul Hilberg, Dominique Porté va lire tout ce qui paraît sur le sujet. Jusqu'à découvrir un personnage qui ne cessera de le fasciner : Chaïm Rumkowski.
Ce Juif de Lodz a été désigné en octobre 1939 par les nazis pour diriger le ghetto de la ville. Il finira par se prendre totalement au jeu d'un pouvoir dérisoire et délirant, jusqu'à faire imprimer des timbres à son effigie.
Les chapitres décrivant l'obsession de l'auteur alternent avec ceux racontant le comportement de ce « roi » ubuesque du ghetto.
Pologne, avant la Première Guerre mondiale. Wolf est très heureux sur le domaine de son père Hersh. Il préfère s'occuper du bétail et faire des promenades dans la campagne plutôt que d'étudier.
Quand il rentre du service militaire, son père a vendu le domaine pour s'installer dans la bourgade voisine.
Par dépit, Wolf part pour l'Amérique. Débarqué à New York, il ne se fait pas à la vie urbaine. Il s'installe alors chez un paysan protestant et sa fille Esther. Tout en se rapprochant d'Esther, il découvre le mode de vie protestant, austère. C'est ainsi qu'il devient Willy.
Déjà connu pour ses talents de narrateur, Israël Joshua Singer ose ici aborder un tabou du judaïsme traditionnel : l'union mixte.
Parus en 1888, ces vingt-six contes juifs sont les seuls textes de Leopold von Sacher-Masoch écrits en français.
Ces petites formes littéraires sont inspirées de contes juifs de l'Europe entière (Alsace, Russie, Pologne, Angleterre, Italie...).
Pour la première fois au format poche.
Précédentes éditions : Balland (1992), éditions du Sandre (2007)
Le petit Motl vient de voir mourir son père, qui était chantre à la synagogue.
Devenu orphelin, il doit exécuter les tâches quotidiennes que lui imposent sa maman et sa vie de misère. Motl décide de les raconter avec son regard d'enfant juif d'Ukraine de la fin du XIXe siècle. Et comme il n'a plus rien à perdre, Motl rêve de quitter l'Europe pour l'Amérique...
On retrouve avec le Motl de Sholem-Aleikhem ce qui a probablement inspiré René Goscinny et son petit Nicolas, la légèreté pour raconter des événements pas forcément légers.
Ce roman est l'un des grands classiques de la littérature yiddish. Des générations de Juifs d'Europe orientale et de nombreux Juifs immigrés en Europe occidentale ou en Amérique se sont identifiés à Motl. Il s'agit d'un petit bijou d'humour et de sensibilité.
« J'ai longtemps pensé que le yiddish était une langue d'intérieur, comme des chaussons ou une robe de chambre. » À travers des réminiscences du Paris de l'?après-guerre, Talila évoque son enfance de fille d?'immigrés juifs polonais qui ont choisi de vivre malgré la perte des leurs dans le Génocide. Elle rend hommage à des gens simples, tournés vers l?'avenir, pleins d'énergie et porteurs d'une langue - le yiddish - à offrir à leurs enfants.
Elle dépeint l'atelier de confection de son père, les déjeuners du dimanche autour de la table du salon, les cris, les disputes, les pleurs, les rires.
Ces textes d'une profonde humanité ont accompagné ses récitals et les accompagnent encore.
En 2011, ils ont été publiés aux éditions Naïve. Talila ajoute ici une dizaine d'inédits.
Le recueil contient trois nouvelles écrites autour de 1905. Elles ont la même toile de fond : la révolution avortée en Russie.
Les trois sont des monologues où le narrateur s'adresse à un interlocuteur.
Guitel Pourishkevitsh Comment Guitel parvient à faire réformer son fils et se retrouve affublée du surnom de Guitel Pourishkevitsh, un surnom qui marie la carpe et le lapin.
Joseph Comment un « gentleman » raconte une histoire qui s'avère être un rêve.
Trois veuves Comment un homme, à force de convoiter trois générations de femmes, finit célibataire.
Dans une langue savoureuse, chaque narrateur raconte une mésaventure personnelle. Le lecteur se demande si le narrateur se moque de lui-même ou si Sholem- Aleichem lui porte un regard attendri et ironique.
Lire Au pied du Sinaï (1898), paru trois mois après le « J'accuse » de Zola, c'est découvrir un Clemenceau insoupçonné : non le redoutable tribun radical, ni même le brillant éditorialiste de L'Aurore, mais un écrivain, tour à tour ethnologue et conteur, satirique et fraternel, parti à la rencontre du monde juif.
C'est aussi s'aviser qu'avant même de s'engager dans la cause dreyfusarde, « le Tigre » entendait répliquer à l'antisémitisme effréné de son temps, en peignant des types humains attachants - de l'opulent baron Moïse au miséreux Schlomé le batailleur - et des cohortes pathétiques de Juifs galiciens, pauvres parmi les pauvres.
C'est mesurer enfin la prégnance troublante, au tournant du siècle, de représentations ambiguës et de préjugés raciaux jusque sous la plume d'un ardent humaniste.
Une introduction de Philippe Zard, professeur de littérature comparée, replace ces récits dans le contexte de l'époque.
Des romans de George Sand, Daniel Stauben dit : « Le Berry n'est pas la seule contrée de la France où vivent des populations au caractère tranché, aux coutumes antiques, à l'idiome pittoresque. Aux paysans de l'Indre, on pourrait opposer sous plus d'un rapport, dans une autre sphère d'existence et d'idées, les Juifs de nos hameaux de l'Alsace. » De 1857 à 1859, dans la Revue des Deux-Mondes, Daniel Stauben fait paraître ces Scènes de la vie juive en Alsace qui seront publiées en volume en 1860.
L'auteur, qui a quitté son Alsace natale pour suivre une carrière universitaire à Aix, Poitiers et Besançon, y raconte la vie de personnages juifs de la campagne alsacienne quelques décennies avant que l'exode rural et les vicissitudes du XXe siècle mettent fin à des siècles de judaïsme rural en Alsace.
Ces récits sont tout simplement charmants.
Le désormais célèbre détective privé Oded Héfer, dit la Fouine, accepte une mission minable confiée par sa grand-mère, pensionnaire dans une maison de retraite. Elle a perdu son chat et souhaite que son petit-fils le retrouve au plus vite. En cherchant l'horrible bête, Oded Héfer tombe sur le cadavre d'un pensionnaire de la maison de retraite.
L'enquête doit être menée par le commissaire Yaron Malka. Mais la Fouine ne veut pas être tenue à distance d'une telle enquête. Il a de bonnes raisons de vouloir la mener malgré l'interdiction du commissaire : le meurtre a été commis dans la maison de retraite où sa grand-mère réside.
Gay assumé, fragile et plein d'esprit, Oded Héfer s'immisce alors dans une délicate enquête auprès de personnes du troisième âge aux histoires personnelles chargées.
Entre les deux guerres, les Juifs représentent environ un tiers de la population de Varsovie. Benny Mer choisit de les faire revivre à travers la visite guidée d'une des rues les plus pauvres du quartier juif de la ville, la rue Smocza (Smotshè en yiddish). Pour cela, il s'est plongé dans la presse yiddish, ses annonces, les faits divers, les fragments littéraires...
Les personnages rencontrés - souvent des petites gens, tailleurs, vendeuses au marché... - sont une source essentielle pour l'auteur. Il tente alors de retrouver ce qu'ils sont devenus après 1939 et parvient parfois à retracer qui a été enfermé dans le ghetto, qui y est mort, qui y a combattu durant l'insurrection, etc.
Une démarche comparable à celle de Ruth Zylberman pour 209, rue Saint-Maur (Seuil, 2020).
Dans une démarche à la fois historique et sociologique, l'ouvrage retrace l'histoire de l'école Maïmonide, une école qui a ceci de particulier qu'elle allie éducation républicaine et éducation juive.
Cette école a vu le jour dans la région parisienne en 1935. Elle a alors traversé les traumatismes et les bouleversements qui ont agité la vie et l'identité des Juifs en France tout au long du XXe siècle.
Aujourd'hui encore, elle poursuit le projet de transmettre à la fois une éducation républicaine et une éducation juive.
L'auteur, ancien élève de « Maïmo », a voulu en savoir plus sur sa propre école. Pour cela, il s'est plongé dans les archives et est parti à la recherche de témoignages écrits ou oraux afin de faire revivre ce qui semblait être au départ une pure utopie.
"Est-il normal, en mes meilleures années, de voir cette seule ruelle, ces quelques cours encloses, étouffées ? Je voudrais crier au temps d'attendre, de cesser de courir. Je voudrais rattraper mon année passée et la garder pour plus tard, jusqu'à la nouvelle vie. Je n'éprouve pas le moindre désespoir. Aujourd'hui j'ai quinze ans et je vis confiant en l'avenir. Je vois devant moi du soleil, du soleil, du soleil, du soleil.
Dans une première partie, H. Leivick se souvient des six années passées dans un cachot obscur, de ses camarades de détention, révolutionnaires, juifs et non juifs. Il se souvient également des prisonniers de droit commun, dont certains avaient assassiné des Juifs. Des flash-back sur son enfance, son éducation traditionnelle puis son engagement politique parsèment le récit, alimentés par des dialogues intérieurs émouvants avec son père.
Dans la deuxième partie, H. Leivick raconte le voyage à pied, puis en bateau-prison vers la Sibérie, traversé par une galerie de portraits et de réflexions sur l'existence et la résistance à l'oppression.
Le 26 août 1789 la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen est adoptée par l'Assemblée constituante. Elle stipule, dès l'article II, que "tous les hommes sont égaux parla nature et devant la loi". Tous les hommes ? Non. A cette date, l'Assemblée constituante ne s'est pas encore penchée sur les Juifs. Face aux préjugés, il faudra la détermination du comte de Clermont-Tonnerre et de l'abbé Grégoire pour que la loi soit enfin décrétée le 27 septembre 7797.
Des discours sur la citoyenneté toujours actuels.
Après le décès de son père, rescapé de la Shoah, sa fille part dans une quête familiale désespérée.
Elle découvre un film témoignage de son père dans lequel il raconte avoir eu une enfant avant la guerre, enfant disparue en déportation. Est-elle morte, se demande la narratrice qui, à partir de ce moment, n'a de cesse de la retrouver.
Recherches et hasards vont la mener à Montréal où elle rencontre enfin sa demi-soeur, Mariette. Mais leurs souvenirs ne correspondent pas. Au fil du récit, l'histoire du père révèle un homme double.
Le lecteur finit par en être totalement troublé.
Ce roman renouvelle le genre de la recherche de l'histoire familiale : les doutes de la narratrice deviennent ceux du lecteur.
Si les faits sont graves, la manière de les relater est légère, souvent drôle.
Yitskhok Leybush Peretz (Pologne, 1851-1915) est l'un des fondateurs de la littérature yiddish moderne du tournant du XXe siècle. Il est à présent considéré comme un classique.
Il a inspiré plusieurs générations d'écrivains avant la Première Guerre mondiale et entre les deux guerres, en puisant dans les richesses de la culture juive traditionnelle pour créer une littérature moderne.
Ses oeuvres ont été publiées, en yiddish, sur les cinq continents. Il est traduit dans une dizaine de langues.
"Je me souviens qu'enfant, j'avais envie de m'asseoir à côté des ouvriers palestiniens, d'arracher des morceaux de pain avec eux, de boire leur café turc dans les tasses minuscules qu'ils utilisaient. Je ne l'ai jamais fait. " En revenant sur son enfance et son adolescence à Psagot, colonie juive de Cisjordanie peuplée de Juifs pratiquants, Yonatan Berg nous fait pénétrer dans un lieu peu visité, à la fois protecteur et angoissant, bucolique et violent, ouvert et fermé, souvent nourri par la peur.
Yonatan Berg ne s'est pas toujours senti à l'aise dans ce milieu. Après le service militaire et la découverte de terres lointaines, il prend la décision de quitter Psagot. Ce ne sera pas sans déchirement.
Peu nombreux se souviennent d'une chanson de Mike Brant intitulée Un grand bonheur. C'est un seul vers de cette chanson, "Si maintenant j'oublie mon île", qui a touché Serge Airoldi au point de prendre la plume et de la laisser aller au gré des sentiments que lui inspirait l'histoire personnelle de Moshe Brand, lui qui était enfant au moment du suicide de la star.
Toute une enfance s'est levée. La nécessité s'est alors fait sentir de revenir au parcours meurtri qui va de Moshe Brand, l'enfant du rêve israélien, à Mike Brant, la star de la variété des années 1970, jusqu'au suicide en 1975.
Sous le texte attachant et poétique de Si maintenant j'oublie mon île, Serge Airoldi fait redécouvrir la fragilité d'un homme à qui tout semblait sourire.
"Tu parles bien, gros, t'envoies de bonnes disquettes. Tu parles comme mon avocat, un Feuj. C'est frais, j'avoue, mais pour nous t'as vu c'est cuit, dead et archi-dead. On est trop des mecs en chien, des ex-clus, comme disait Doc Gynéco. Nos têtes sont trop cramées. Faut croire que le bonheur, c'est comme une boîte de nuit des Champs-Elysées : tout le monde veut rentrer, mais y en a pas beaucoup qui ne se mangent pas un "ici, c'est privé, vous êtes pas VIP" ".
Frédéric, "Black" des banlieues, est un dealer à succès. Arrêté, il découvre en prison le pouvoir des mots et de la belle langue. Comment partager sa passion ? Il commence avec son compagnon de cellule, un "Feuj" à qui il enseigne le français sans wesh, blédard ou bâtard. Frédéric y croit, sa rédemption passera par les mots et la connaissance. Il lutte, s'appuie sur la confiance en son Dieu, résiste à Satan qui veut le ramener à sa vie antérieure.
La République, consternée par l'état de ses prisons, le couve des yeux.
Alors qu'il vogue vers l'Amérique, le narrateur raconte à Shalom-Aleikhem les malheurs survenus à son fils pendant la 1ère Guerre mondiale à Krushnik, une bourgade polonaise.
L'armée allemande occupe la région jusqu'alors sous domination russe. Les Allemands cherchent un autochtone pour faire office de maire. Se doutant que rien de bon ne sortirait de cette distinction, tous les notables, tant polonais que juifs, trouvent un moyen de se défiler ; le sort tombe sur le fils du narrateur.
Comme souvent chez l'auteur, cette situation tragique provoque le rire. Au-delà du rire, l'auteur parvient à décrire, dans une verve extraordinaire servie par une excellente traduction, les relations entre Juifs et Polonais, Juifs et Russes, Juifs et Allemands.
Dans ce court roman très enlevé, Aleph, le narrateur, se présente comme un antihéros, une sorte de Woody Allen inversé.
Depuis tout petit, sa mère lui répète : « T'es moche, j'espère que tu te referas le nez quand tu grandiras. Et en plus tu ressembles à un juif. » Heureusement pour Aleph, sa mère n'a pas complètement raison : il n'est pas moche.
Enfant, il séduit les commerçants ; adolescent, il plaît aux filles et il se fait des copains, y compris dans le lycée privé des beaux quartiers où ses parents l'envoient.
En revanche, sa mère dit vrai sur un point : il ressemble à un juif. Et pour un Français arabe qui vit entre Paris et Beyrouth, ce n'est pas toujours facile.