"Depuis quarante ans je n'ai jamais éteint la lumière le soir dans ma chambre (...) parce que si j'éteins la lumière je suis là-bas tout de suite dans les camps .Tout de suite le noir c'est le camp, le noir c'est la mort des autres et en partie la mienne." Dans une langue simple et directe, Tobias Schiff, déporté à Auschwitz à l'âge de 17 ans en tant que Juif, retrace sa survie dans le camp.
Il a dû laisser passer plus de quarante ans après les événements avant de livrer un texte oral à un ami, puis de retravailler le texte par écrit.
Ce témoignage livré en un seul souffle, sous forme d'un monologue, "est celui d'un extraordinaire écrivain", selon Arnon Grünberg.
Édition française en grand format chez Benoît Jacob, en 2000. Il paraît ici pour la première fois en poche.
Il est défendu à un citoyen libanais de se rendre en Israël. Mais le narrateur, un jeune photographe franco-libanais, décide d'enfreindre la loi de son pays et ne pas suivre l'avis de sa famille. Arrivé à l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, il subit un interrogatoire de plusieurs heures. Les questions fusent et se répètent. « Comment s'appelle votre mère ? Comment s'appelle votre père ? Comment s'appelle votre grand-père ? Comment vous appelez-vous ? » Des questions qui reviennent comme une berceuse et qui voudraient obliger le narrateur à se définir de manière définitive. Lui qui avait pensé faire ce voyage pour mettre de côté sa part libanaise, mettre Beyrouth entre parenthèses...
Après Le nez juif, Sabyl Ghoussoub revient avec le récit de ce voyage interdit, un livre plein d'humour, de tendresse et parfois de colère.
Parus en 1888, ces vingt-six contes juifs sont les seuls textes de Leopold von Sacher-Masoch écrits en français.
Ces petites formes littéraires sont inspirées de contes juifs de l'Europe entière (Alsace, Russie, Pologne, Angleterre, Italie...).
Pour la première fois au format poche.
Précédentes éditions : Balland (1992), éditions du Sandre (2007)
La scénariste Dora Bessis est prête à tout, en cette année 1987, pour monter un film sur Eli Cohen, l'espion du Mossad qui, dans les années 1960, a infiltré les plus hautes sphères du pouvoir syrien, avant d'être démasqué et pendu à Damas en 1965. Dora le sait déjà, son film s'appellera Le loup de Damas et sera interprété par Robert De Niro dans le rôle de l'espion.
En 1962, l'auteur alors âgé de dix ans, découvre Kapò de Gillo Pontecorvo, l'un des tout premiers films de fiction traitant du génocide des Juifs par les nazis.
Ce film marquera le début de ce qui deviendra l'obsession de l'auteur. De David Rousset à Primo Levi, en passant par Raoul Hilberg, Dominique Porté va lire tout ce qui paraît sur le sujet. Jusqu'à découvrir un personnage qui ne cessera de le fasciner : Chaïm Rumkowski.
Ce Juif de Lodz a été désigné en octobre 1939 par les nazis pour diriger le ghetto de la ville. Il finira par se prendre totalement au jeu d'un pouvoir dérisoire et délirant, jusqu'à faire imprimer des timbres à son effigie.
Les chapitres décrivant l'obsession de l'auteur alternent avec ceux racontant le comportement de ce « roi » ubuesque du ghetto.
« J'ai longtemps pensé que le yiddish était une langue d'intérieur, comme des chaussons ou une robe de chambre. » À travers des réminiscences du Paris de l'?après-guerre, Talila évoque son enfance de fille d?'immigrés juifs polonais qui ont choisi de vivre malgré la perte des leurs dans le Génocide. Elle rend hommage à des gens simples, tournés vers l?'avenir, pleins d'énergie et porteurs d'une langue - le yiddish - à offrir à leurs enfants.
Elle dépeint l'atelier de confection de son père, les déjeuners du dimanche autour de la table du salon, les cris, les disputes, les pleurs, les rires.
Ces textes d'une profonde humanité ont accompagné ses récitals et les accompagnent encore.
En 2011, ils ont été publiés aux éditions Naïve. Talila ajoute ici une dizaine d'inédits.
Lire Au pied du Sinaï (1898), paru trois mois après le « J'accuse » de Zola, c'est découvrir un Clemenceau insoupçonné : non le redoutable tribun radical, ni même le brillant éditorialiste de L'Aurore, mais un écrivain, tour à tour ethnologue et conteur, satirique et fraternel, parti à la rencontre du monde juif.
C'est aussi s'aviser qu'avant même de s'engager dans la cause dreyfusarde, « le Tigre » entendait répliquer à l'antisémitisme effréné de son temps, en peignant des types humains attachants - de l'opulent baron Moïse au miséreux Schlomé le batailleur - et des cohortes pathétiques de Juifs galiciens, pauvres parmi les pauvres.
C'est mesurer enfin la prégnance troublante, au tournant du siècle, de représentations ambiguës et de préjugés raciaux jusque sous la plume d'un ardent humaniste.
Une introduction de Philippe Zard, professeur de littérature comparée, replace ces récits dans le contexte de l'époque.
Des romans de George Sand, Daniel Stauben dit : « Le Berry n'est pas la seule contrée de la France où vivent des populations au caractère tranché, aux coutumes antiques, à l'idiome pittoresque. Aux paysans de l'Indre, on pourrait opposer sous plus d'un rapport, dans une autre sphère d'existence et d'idées, les Juifs de nos hameaux de l'Alsace. » De 1857 à 1859, dans la Revue des Deux-Mondes, Daniel Stauben fait paraître ces Scènes de la vie juive en Alsace qui seront publiées en volume en 1860.
L'auteur, qui a quitté son Alsace natale pour suivre une carrière universitaire à Aix, Poitiers et Besançon, y raconte la vie de personnages juifs de la campagne alsacienne quelques décennies avant que l'exode rural et les vicissitudes du XXe siècle mettent fin à des siècles de judaïsme rural en Alsace.
Ces récits sont tout simplement charmants.
"Est-il normal, en mes meilleures années, de voir cette seule ruelle, ces quelques cours encloses, étouffées ? Je voudrais crier au temps d'attendre, de cesser de courir. Je voudrais rattraper mon année passée et la garder pour plus tard, jusqu'à la nouvelle vie. Je n'éprouve pas le moindre désespoir. Aujourd'hui j'ai quinze ans et je vis confiant en l'avenir. Je vois devant moi du soleil, du soleil, du soleil, du soleil.
Après le décès de son père, rescapé de la Shoah, sa fille part dans une quête familiale désespérée.
Elle découvre un film témoignage de son père dans lequel il raconte avoir eu une enfant avant la guerre, enfant disparue en déportation. Est-elle morte, se demande la narratrice qui, à partir de ce moment, n'a de cesse de la retrouver.
Recherches et hasards vont la mener à Montréal où elle rencontre enfin sa demi-soeur, Mariette. Mais leurs souvenirs ne correspondent pas. Au fil du récit, l'histoire du père révèle un homme double.
Le lecteur finit par en être totalement troublé.
Ce roman renouvelle le genre de la recherche de l'histoire familiale : les doutes de la narratrice deviennent ceux du lecteur.
Si les faits sont graves, la manière de les relater est légère, souvent drôle.
Peu nombreux se souviennent d'une chanson de Mike Brant intitulée Un grand bonheur. C'est un seul vers de cette chanson, "Si maintenant j'oublie mon île", qui a touché Serge Airoldi au point de prendre la plume et de la laisser aller au gré des sentiments que lui inspirait l'histoire personnelle de Moshe Brand, lui qui était enfant au moment du suicide de la star.
Toute une enfance s'est levée. La nécessité s'est alors fait sentir de revenir au parcours meurtri qui va de Moshe Brand, l'enfant du rêve israélien, à Mike Brant, la star de la variété des années 1970, jusqu'au suicide en 1975.
Sous le texte attachant et poétique de Si maintenant j'oublie mon île, Serge Airoldi fait redécouvrir la fragilité d'un homme à qui tout semblait sourire.
Dans ce court roman très enlevé, Aleph, le narrateur, se présente comme un antihéros, une sorte de Woody Allen inversé.
Depuis tout petit, sa mère lui répète : « T'es moche, j'espère que tu te referas le nez quand tu grandiras. Et en plus tu ressembles à un juif. » Heureusement pour Aleph, sa mère n'a pas complètement raison : il n'est pas moche.
Enfant, il séduit les commerçants ; adolescent, il plaît aux filles et il se fait des copains, y compris dans le lycée privé des beaux quartiers où ses parents l'envoient.
En revanche, sa mère dit vrai sur un point : il ressemble à un juif. Et pour un Français arabe qui vit entre Paris et Beyrouth, ce n'est pas toujours facile.
"Tu parles bien, gros, t'envoies de bonnes disquettes. Tu parles comme mon avocat, un Feuj. C'est frais, j'avoue, mais pour nous t'as vu c'est cuit, dead et archi-dead. On est trop des mecs en chien, des ex-clus, comme disait Doc Gynéco. Nos têtes sont trop cramées. Faut croire que le bonheur, c'est comme une boîte de nuit des Champs-Elysées : tout le monde veut rentrer, mais y en a pas beaucoup qui ne se mangent pas un "ici, c'est privé, vous êtes pas VIP" ".
Frédéric, "Black" des banlieues, est un dealer à succès. Arrêté, il découvre en prison le pouvoir des mots et de la belle langue. Comment partager sa passion ? Il commence avec son compagnon de cellule, un "Feuj" à qui il enseigne le français sans wesh, blédard ou bâtard. Frédéric y croit, sa rédemption passera par les mots et la connaissance. Il lutte, s'appuie sur la confiance en son Dieu, résiste à Satan qui veut le ramener à sa vie antérieure.
La République, consternée par l'état de ses prisons, le couve des yeux.
Quarante ans après les faits, le narrateur revient sur un épisode traumatisant de son enfance : l'exclusion de son collège, pour avoir adressé, avec deux camarades, une lettre antisémite à son professeur d'anglais.
Quelques années plus tard, le narrateur, fils d'une mère juive et d'un père catholique, deviendra spécialiste de culture juive. Que s'est-il passé entre ces deux moments de son histoire ?
Le narrateur tente de décortiquer l'imbrication des conflits politiques des années 1970 et des malaises familiaux. Il retrouve cette question tragique que sa mère a posée devant le conseil de discipline : « Comment voulez-vous que mon fils soit antisémite alors que mon père est mort à Auschwitz ? » Gilles Rozier continue de creuser l'indentité juive et ses enjeux, au plus profond de l'intime.
Le héros, Fred, racaille des banlieues, a appris à maîtriser la langue française en prison. Il emploie les mots justes, parle avec esprit, la ramène souvent, joue les redresseurs de tort et réussit à convaincre même la plus antipathique magistrate. Sorti de prison, il poursuit son idéal : diffuser l'amour de la belle langue à ses "frères" de banlieue et aux femmes qui l'entourent. Mais on découvre, petit à petit, que notre héros est habité par un diable, dans ses relations avec les femmes.
Et ça ne s'arrête pas aux mots. Fred s'interroge : quel est ce diable qui l'habite ? La République y serait-elle pour quelque chose ? Il fait appel à ses "frères" pour l'aider. Une plongée au coeur de la banlieue, avec ses jeunes, sa langue, ses mélanges, tout cela dans le style inimitable de l'auteur.
Espagne, XVIIe siècle. Juan, le narrateur, est fils de marranes, ces juifs contraints par l'Inquisition à se convertir au catholicisme et qui continuèrent à pratiquer le judaïsme en secret. Son père, un riche marchand de Séville, décide de l'envoyer en pension dans la lointaine Valence. Là, Juan découvre le vol, la traîtrise, le mensonge. Au bout d'un an, il s'enfuit et veut retourner chez ses parents à Séville. Le chemin sera plus long que prévu...
Le héros, Frédéric, est un jeune « Black », dealer à succès. Jusqu'au jour où il se fait prendre. Il est arrêté et se retrouve en prison, entouré de gars des banlieues comme lui, des Blancs, des Noirs, des Arabes, des Juifs. Il y mène alors un combat : enseigner le français, sans « wesh », « blédards » et autres « bâtards ». Il commence avec Richard, son compagnon de cellule, un « feuj ».
La tâche ne sera pas aisée. D'une part, ses codétenus ne saisissent pas l'intérêt de connaître cette langue. D'autre part, l'administration pénitentiaire ne lui facilite pas le travail. Et quand la République et le Diable s'en mêlent...
Frédéric tient bon, il croit aux mots et à la lecture, pour lutter contre toutes les prisons de ce monde, réelles ou intérieures.