Les quatorze récits écrits entre 1930 et 1958 de cette autoanthologie gaddienne offrent une image assez complète d'un parcours voué à une expérimentation incessante. Ils laissent passer en filigrane l'Italie juste avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, ainsi que les furies de Gadda contre les offensives mussoliniennes. Mais, surtout, ce que l'on trouve ici, c'est tantôt le sarcasme d'un comique irrésistible à l'égard de la bonne société milanaise (« Saint Georges chez les Brocchi »), tantôt la description pittoresque d'une catastrophe populaire (« L'incendie de la via Keplero »), tantôt les souffrances et la faim qui accompagnent la guerre (« Socer generque » et le très émouvant « Club des ombres »), tantôt encore le tragique d'une aventure dont le mystère reste entier (« Un salut respectueux »), pour aboutir enfin à ces « Accouplements bien réglés », où s'entremêlent inextricablement affaires de sexe et d'héritage.
Ce recueil est, avec L'Affreuse Embrouille de via Merulana, L'Adalgisa et LaConnaissance de la douleur, un des quatre chefs-d'oeuvre incontestés de Gadda.
Traduit de l'italien par François Dupuigrenet Desroussilles et Marina Fratnik.
Grièvement blessé, Ashok Banjara, superstar du cinéma hindi, gît entre la vie et la mort sur un lit d'hôpital à Bombay.
A son chevet se succèdent les parents, les partenaires à l'écran et dans la vie. Ils lui parlent, lui dispensent confidences et reproches, tentent de le tirer de son coma. En vain. Ashok Banjara reste muet, prisonnier du film qui défile en technicolor dans sa tête et qui nous retrace sa carrière - ascension fulgurante, déclin, disgrâce, apothéose finale.
Entremêlant la fiction à l'écran et la réalité dans les coulisses avec une virtuosité et un sens de la satire irrésistibles, l'auteur nous décrit l'univers " hollywoodien ", clinquant et fallacieux, comme une métaphore de la société indienne contemporaine et de tous ses maux.
Il nous suggère aussi, dans cette fable colorée, divertissante, jamais frivole, que nous vivons dans un monde où l'illusion passe pour réalité et où rien n'est comme il paraît être.
" Ce roman débordant de vie et d'esprit [. ] permet à M. Tharror de faire des observations d'une ironie percutante sur les parallèles curieux entre cette culture cinématographique unique et l'Inde même dans sa variété foisonnante, déconcertante, ensorcelante - une Inde à la fois vivante et corrompue, sereine et chaotique, raffinée et empêtrée dans ses illusions naïves.
" William Boyd, " New York Times ".
L'Islandais Peter Peterson, émigré jeune aux Etats-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale, arrive à l'automne de sa vie.
Après deux mariages malheureux - ses enfants sont " la preuve vivante d'une erreur " - il habite New York dans un luxueux appartement avec pour compagne, domestique et secrétaire dévouée une jeune Cambodgienne, et se définit lui-même comme un capitaine d'industrie et esthète dégénéré. Peter Peterson est torturé par le cauchemar récurrent d'un crime passionnel qu'il aurait commis cinquante ans plus tôt par dépit amoureux, un crime qui a eu une influence décisive sur son existence entière.
Sur le tard, il décide d'écrire ses Mémoires, sorte de confession qui relate son enfance paisible dans une famille bourgeoise de Reykjavik, ses années d'étudiant au Danemark sous l'occupation nazie et son impitoyable ascension d'homme d'affaires immigré à New York. Le récit sans indulgence reflète sa paranoïa, son sens de la manipulation, son orgueil, son cynisme insensé et son humour désabusé. Ces Mémoires, rédigés en islandais sont traduits en anglais par un compatriote de Peterson après la mort de ce dernier.
Au fil des pages, le traducteur est fasciné par ce personnage hors du commun auquel il s'identifie en l'imprégnant de sa propre sensibilité, et dont " le petit crime " sera révélé par un incroyable coup de théâtre. Absolution est une brillante anatomie de l'obsession du désir et de l'illusion.
Anastassia Lizavetta, belle montevidéenne de 32 ans, sans histoire, mariée, un enfant, se saisit un beau matin d'un couteau de cuisine et assassine sauvagement son mari endormi. Elle déambule dans Montevideo pendant douze heures et c'est cette journée que raconte son cousin, un psychanalyste, qui cherche à comprendre les raisons d'un tel passage à l'acte.Après le crime, Anastassia va au marché, décide de se faire teindre en blonde, rend visite à sa soeur aïnée, traverse la ville en taxi, se promène dans un centre commercial, suit un homme dans un motel pour finalement aller errer dans le quartier de son enfance. Chaque minute de cette errance la renvoie à des souvenirs pour elle insupportables qui prennent, dans son esprit perturbé, une dimension tantôt avilissante tantôt hallucinée, révélatrice de la perception que la jeune femme a de sa vie et de sa ville : l'ennui, la médiocrité, la perte des illusions et des rêves.La violence, dans ce roman audacieux aux accents dostoà¯evskiens et qui rappelle les films de David Lynch, résulte moins d'une réalité sociologique tangible que d'une reconstruction du réel, dominée par les excès d'interprétation du cousin psychanalyste et par les émotions d'Anastassia Lizavetta.Juan Carlos Mondragõn, l'écrivain uruguayen le plus important depuis Juan Carlos Onetti, revient une fois encore à sa ville de Montevideo avec un roman puissant et original. Prenant à l'envers la trame des histoires policières, il se fait complice de la révolte des femmes et, de sa prose dense et singulière, fouille sans concessions les zones obscures de notre imaginaire.
Juan Carlos Mondragõn est né en 1951 à Montevideo. Son oeuvre s'inscrit dans la tradition littéraire du Rio de la Plata dont il est l'un des plus singuliers rénovateurs.Auteur de plusieurs romans, essais, nouvelles, il a reçu le Premio Nacional de la Critica pour Le Principe de Van Helsing (Seuil 2004). Membre de l'Académie des lettres de l'Uruguay, il vit à Paris et enseigne à l'université de Lille III.Bio traducteur, Gabriel Iaculli pour rabat droit jaquette:Outre son travail remarqué sur quelques phares de la littérature espagnole et latino-américaine (Cervantès, Lorca, Rulfo, Unamuno), Gabriel Iaculli est surtout connu pour ses traductions des romans de Juan Manuel de Prada, de diverses oeuvres de Sergio Pitol, et de Jorge Volpi.
Il a récemment donné voix en français à Santiago Roncagliolo, Martàn Kohan et Juan Carlos Mondragõn.
Mémoire du vide est un roman historique, le récit de la vie d'un redoutable bandit sarde ayant réellement existé, Samuele Stocchino, marqué dès son enfance par un terrible destin de vengeance pour un verre d'eau refusé. Fils d'une famille de bergers, il s'engage à l'âge de seize ans et part lutter contre les Turcs en Libye, puis contre les Autrichiens pendant la Grande Guerre, et rentre à chaque fois en héros dans son village sarde. Mais rien n'y fait, le voilà définitivement rattrapé par son destin : pour venger la mort de son frère et sa famille humiliée, il devient le bandit sur la tête duquel pèse la rançon la plus élevée jamais promise, sur l'ordre du Duce en personne. Seul l'immense amour que lui porte depuis toujours Mariangela le soulage parfois, adoucissant un peu la violence qui domine toute sa vie. Dans ce roman d'une très grande puissance, Fois manie à la perfection les différents points de vue, celui de Samuele, celui des habitants du village, sorte de voix populaire, et celui d'une instance narrative supérieure, voix d'une sagesse ancestrale. Une façon bien particulière donc de dire le passé à travers la reconstruction inquiète et fragmentée d'expériences partielles. On est fasciné par la vie de ce personnage à la fois historique et légendaire, mais aussi conquis par la force de la langue, la puissance poétique qui se dégage aussi bien des descriptions que des dialogues.
Un médecin de 38 ans, Masataka Otaka, se marie avec une jeune fille de 19 ans, Hinako Sagara, qu'il va initier à des pratiques sexuelles particulières afin de réaliser avec la complicité de celle-ci son rêve le plus secret : être tué des mains de la femme qu'il aime.
Taeko Kôno a choisi de situer son récit en pleine Seconde Guerre mondiale : le couple, qui se marie quelques mois avant Pearl Harbor, vit sa dernière nuit peu de temps après la chute de Berlin. Ainsi l'amplification des attaques aériennes qui mène peu à peu le Japon vers la défaite a pour fonction d'exacerber la progression insidieuse des héros vers la mort. De cette vie peu ordinaire dans un Japon étranglé par les privations de la guerre, Taeko Kôno donne une vision volontairement banale, tout en aplats ; des descriptions lentes, extrêmement minutieuses, de l'existence quotidienne, font de ce livre autant une passionnante chronique de moeurs qu'un bouleversant roman érotique.
Qui est Kirio ? Un fou, un saint, un marginal ? On trouve trace de son existence d'abord dans le Sud de la France ; elle finit par se perdre dans la zone piétonne de Hanau, en Allemagne, près de la statue des frères Grimm.
Kirio aime marcher sur les mains et, d'une manière générale, il se plaît à renverser la perspective. Il est joueur de flûte et parle avec les pierres et les chauve-souris aussi naturellement qu'avec les hommes. Il prend tout pour de l'argent comptant, sauf l'argent comptant lui-même. Et surtout, il accomplit miracle après miracle sans s'en apercevoir. Qui est donc ce Kirio ? Et qui est donc celui qui raconte sa vie ? L'auteur ? Le Créateur ? Un ange ? Ou l'imagination ? Comme il ne le sait pas lui-même, il compte sur le lecteur pour l'aider à résoudre cette énigme.
Le nouveau roman d'Anne Weber est aussi bien une "Vie de saint" moderne qu'un conte philosophique, entre ciel et terre.