Dans La Valeur des rêves, Marie Lebey fait le récit, sur les chapeaux de roue, d'une aventure rocambolesque, faite de remontées dans le temps allant jusqu'à la Seconde guerre mondiale, et de traversées à travers la France allant de Paris à Saint-Vincent-de-Paul : une oeuvre d'art majeure, une sculpture monumentale créée par Alexander Calder, l'immense artiste américain, a été découverte par hasard au beau milieu d'un camp de vacances, avant d'être revendue quelques mois plus tard pour un montant record.
Plus connu du grand public pour son travail sur le « mobile », Calder a aussi réalisé une série de « stabiles » qui, eux, ne bougent pas, et c'est à cette catégorie qu'appartient « Moustipic », le trésor après lequel court la narratrice de ce roman aussi drôle que documenté sur les coulisses du monde de l'art contemporain.
La valeur des rêves, c'est ça : le décalage entre un stabile qui sert de Tancarville aux maillots de bain et sa valeur sur le marché de l'art.
« On résiste à l'invasion des armées ; on ne résiste pas à l'invasion des idées. » Relire notre histoire récente à l'aune de Victor Hugo (Histoire d'un crime) peut donner le vertige. Vertige des conquêtes militaires, vertige de ces mercenaires russes et leur cohorte de crimes commis en Afrique, vertige des mensonges de la guerre érigés en vérité du jour.
Notre époque est cruelle pour la vérité. Malmenée, bafouée, rognée, tordue et déchirée en mille morceaux par les acteurs du pouvoir, la vérité se noie dans les sombres desseins de ceux qui veulent convaincre les esprits faibles. Tous ceux qui sont prêts à exécuter les partisans de la démocratie sans le moindre scrupule. Tous ces ennemis de la liberté qui ne font plus de différence entre le Nord et le Sud, les riches et les pauvres, les villes et les campagnes. Partout, ils pillent, manigancent des complots permanents, corrompent gouvernements et États sans vergogne. Avec, toujours, une même et seule victime, la vérité.
Qu'il s'agisse de conquérir le droit de jouer au rugby, de canaliser la rage des jeunes de banlieue ou de rentabiliser la notoriété de Marcel Proust, les histoires de ce numéro de XXI nous rappellent à quel point la volonté des hommes est un puissant facteur de cohésion.
Alors que faire ? Que faire, sinon continuer à rétablir le fil des événements, à retracer le destin des sociétés et à faire vivre l'idée que le collectif a encore un sens. Pour gagner la plus importante des batailles, comme le rappelle Hugo, celle des idées.
Ce vingt et unième numéro de la Revue du Crieur consacre un dossier d'ouverture à la guerre que mène la Russie en Ukraine depuis la fin février 2022. Pour tenter de mieux comprendre ce séisme qui bouleverse l'Europe et le monde, nous avons choisi de nous pencher sur ses angles morts, sur les pistes moins empruntées qui, pourtant, témoignent de la réalité quotidienne ukrainienne et participent à expliquer le déclenchement de ce conflit assourdissant.
François Bonnet propose ainsi d'aller au-delà du décryptage d'une idéologie poutinienne qui serait mue par une volonté de relancer la guerre froide et l'opposition entre deux blocs, entre deux systèmes moraux et civilisationnels. Bonnet met lui l'accent sur le système mafieux dont s'est entouré Poutine et voit dans la guerre l'ultime moyen dont dispose le Kremlin pour sécuriser son avenir et préparer sa succession. La photographe Adrienne Surprenant nous rappelle pour sa part qu'une guerre, c'est d'abord une longue série de gestes : courir, enterrer, rechercher, fermer un volet, ouvrir la porte d'un bunker, cajoler, réconforter, pleurer, jouer, sauter, lever le poing... Cette série offre ainsi un aperçu bouleversant de la vie qui continue, malgré tout, en Ukraine. Enfin, Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin se penchent sur la complexe mosaïque religieuse que constituent les pays de l'ex-URSS et explorent les tensions qui agitent le monde orthodoxe, où les Églises font plus souvent figure de fauteuses de guerre que d'ouvrières de la paix. À propos des grands enjeux géopolitiques actuels, les lecteurs et lectrices découvriront également de quelle manière, au Brésil, les féministes, les personnes LGBT+, les Noir·es, les autochtones s'organisent afin d'inventer de nouvelles manières de faire de la politique, plus collectivement, plus démocratiquement, dans l'espoir de faire tomber Bolsonaro lors des importantes élections qui se déroulent en octobre 2022 dans tout le pays.
La revue poursuit par ailleurs ses enquêtes culturelles, avec un grand article de Sihame Assbague sur la fabrique - et les biais - de la plus grande encyclopédie du monde : Wikipédia. Alors que les mots d'ordre du géant numérique sont la transparence et la neutralité, des contributeurs·trices partout dans le monde semblent s'organiser pour lancer l'assaut contre les pages consacrées aux personnalités et organisations féministes comme antiracistes. Mais pour comprendre ces attaques, il faut plonger dans les rouages techniques du site et mener l'enquête sur ceux et celles qui rédigent les contenus.
Et ce n'est pas tout : ce nouveau numéro laisse également de l'espace à des réflexions passionnantes sur la géo-ingénierie (est-ce le progrès technologique qui nous sauvera du désastre climatique provoqué par... le « progrès » technologique ?), sur le rôle de la fiction dans l'éveil des consciences face à la violence et à l'injustice qui s'expriment dans les parcours de migration, ou encore sur les liens que peuvent entretenir les personnes queers avec la nature, alors qu'elles sont souvent accusées de soutenir un progrès technologique sans limite et sans éthique. Enfin, un texte important soulève une question taboue : les conséquences matérielles des violences sexuelles pour les victimes, ou comment le viol a des effets en cascade sur leur vie quotidienne, leur travail, leur logement, leurs économies...
"Ensemble, on va plus loin" 144 pages de reportages sélectionnés pour vous !
Pour explorer les initiatives qui font avancer le monde et ouvrir les coulisses de l'information qui donne envie d'agir !
Des reportages, interviews, chroniques pour mettre à l'honneur :
- Des histoires et acteurs de solutions concrètes qui améliorent la vie, l'économie, l'écologie.
- Des récits de journalistes et grands reporters qui vous racontent leur métier, vous ouvrent les coulisses de la "fabrique" de l'information et des nouveaux médias.
Une nouvelle thématique à chaque numéro. Une revue qui s'ouvre aux idées qui rassemblent, aide à se projeter et aiguise curiosité, créativité, envie d'agir. Pour changer de regard sur l'actualité.
Vous allez ainsi cotoyer dans ce numéro des aventures aussi variées que...
Des entrepreneurs marseillais faisant de la "ville à problèmes" une capitale des solutions ;
Des étudiants engagés à faire revivre un village des Alpilles ;
Des personnes qui renouent avec le goût du travail grâce à l'artisanat et au patrimoine architectural ;
Des médecins qui perfectionnent l'art de coopérer en s'initiant au pilotage (virtuel) d'un avion ;
... et moult initiatives et personnalités qui s'engagent pour le bien commun, résolvent concrètement des problèmes de société, améliorent notre vie quotidienne.
Entrez dans les coulisses de l'information : journalistes, réalisateurs, artistes, nouveaux médias, vous expliquent leur métier, leurs passions, le pourquoi de leurs choix éditoriaux, et partagent les initiatives qui les motivent.
JR, l'artiste invité de ce premier numéro, sublime l'espoir avec une série de photographies révélant le "faire ensemble" lles & Ils sont aussi de l'aventure :
Philippe Starck, Eva Roque, Pascal Lemaitre, CharlElie Couture, Sophie Jovillard, François Saltiel, Gaspard Koenig...
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Par analogie artistique ou par complexe, la parfumerie a emprunté à la musique une partie de son vocabulaire : on y retrouve des « notes » qui constituent des « accords » et des « harmonies ». S'il a été établi - tardivement - qu'ils ne partagent pas la même nature, le son étant une onde quand l'odeur provient de corpuscules, leur caractère invisible, impalpable nous extrait de l'hégémonie qu'exerce la vue dans notre société, nous permettant d'accéder à une forme d'abstraction. Ils ont également en commun une temporalité évanescente : l'un comme l'autre change dans la durée et peut difficilement être représenté dans sa globalité. Certains parfumeurs mélomanes ou musiciens épris d'effluves ont pu s'exercer à exprimer l'un à travers l'autre, mêlant les impressions olfactives et auditives. Et, bien que la critique des parfums soit encore marginale de nos jours, sa pratique fait dans une certaine mesure écho à celle (plus installée) des disques, exprimant un ressenti esthétique et émotionnel tout en composant avec des enjeux économiques.
Il y a celles que les appareils de surveillance prennent à notre insu. Au supermarché, au feu rouge, sur notre palier. Avec 420 millions de caméras, la Chine a poussé l'idéal sécuritaire à son paroxysme. On nous promettait des villes intelligentes ; au Xinjiang, on obtient des camps de rééducation. Hikvision, l'entreprise qui fournit 145 villes de France en matériel de surveillance, participe à la répression des musulmans ouïghours. De ces femmes et de ces hommes ne reste qu'une multitude d'images manquantes. Parfois, une image se détache, singulière. Elle devient symbole, s'invite dans les livres d'histoire. En Afghanistan, un taliban en turban aurait dû rester dans l'anonymat de son village. C'était compter sans ses yeux verts sur ciel bleu, son lance-roquettes et le réflexe d'une photographe française, qui l'immortalisa. Quarante ans de guerre dans un regard. On peut tout faire dire à des photographies, y compris la vérité. Réduites à des pixels, elles nous tracent. Le disque dur global enfle, notre mémoire va exploser. « Je veux bien être transformé en papier », dit l'écrivain Jean-Marie Gustave Le Clézio. Les histoires de XXI aussi.
Léna Mauger et Marion Quillard
Découvrez chaque facette de cette fleur bien connue à l'odeur de propre : botanique, histoire, arts, gastronomie, agriculture, chimie, sans oublier parfums et parfumeurs. Née dans le bassin méditerranéen, la lavande est importée par les Romains en Provence, dont le climat ensoleillé, les sols et l'altitude sont propices à l'épanouissement de la fleur bleue. Emblème de la région, où elle colore d'immenses étendues du paysage, elle a accompagné l'essor de la ville de Grasse au XIXe siècle lors de son âge d'or.
Le lavandin, hybride naturel de deux espèces de lavande, se montre plus productif et constitue ainsi un ingrédient plus accessible pour la parfumerie fonctionnelle, où il est très utilisé. Après transformation, chaque espèce peut donner naissance à une huile essentielle, une concrète ou une absolue, aux profils olfactifs distincts. Tandis que le lavandin est plus camphré, la lavande présente des notes plus florales et poudrées.
Cette année de meetings qui s'ouvre nous rappelle qu'en France, l'élection présidentielle demeure pensée comme la rencontre entre un homme (providentiel) et un pays (imaginaire). C'est cet imaginaire national, aussi verrouillé que vieilli, que la Revue du Crieur se propose de défaire et de libérer de ses pesanteurs historiques et de ses crispations idéologiques. Notre dossier d'ouverture passe ainsi au crible le rapt conservateur des principes républicains, qui nous empêche de penser la République comme garante d'une liberté émancipatrice ; revient sur le refoulement de la question coloniale et la persistance de l'impérialisme hexagonal ; décrypte le fantasme de la grandeur nationale et le mythe de la « puissance » ; lève le voile, enfin, sur la grande illusion du progrès et de l'innovation, au coeur des politiques économiques de la France depuis les Trente Glorieuses.
Ce dix-neuvième numéro continue le travail d'enquête sur les idées que mène la revue depuis sa création, en proposant de retracer soixante-dix ans de réception de l'oeuvre de Simone de Beauvoir depuis la publication en 1949 du Deuxième Sexe- avec une question centrale : que reste-t-il de l'héritage de cette philosophe majeure du XXe siècle ? ; mais aussi de dresser le portrait de Bernard Rougier, universitaire reconnu et respecté, spécialiste de l'islamisme au Proche-Orient, devenu l'« éminence grise » de la politique française de lutte contre le « séparatisme » ; et encore de décrire les critiques qui visent le symbole de l'excellence de la recherche française, le CNRS.
Au sommaire également, un reportage en photos qui nous plonge dans les arcanes autoritaires du pouvoir tchétchène et les méthodes de son chef, Ramzan Kadyrov, lequel règne sur cette fédération du Caucase du Nord depuis près de quinze ans en s'appuyant sur l'islam et le sport ; ainsi qu'une déambulation dans un univers familier aux geeks de toute la planète : celui des e-girls, ces jeunes femmes qui mêlent jeux vidéo, réminiscences de Lolita, univers du manga et amour des chatons afin de se faire un nom sur les réseaux sociaux et ainsi monnayer leur popularité.
Est-ce la peur qui nous guide ? L'instinct de survie ? Ou le besoin de croire encore en l'humain ? Ce numéro de XXI est un horizon, un humble hommage à ces inconnus qui fabriquent, ça et là, un futur plus juste. Dans le grand théâtre de l'absurde que nous traversons, nous avons envie d'écouter des voix optimistes, courageuses. « Les mots ont le pouvoir d'illuminer la noirceur », disait le dramaturge Samuel Beckett.
À Marseille, le soin se réinvente au coeur d'une cité. En Amazonie, des « gardiens de la forêt » cessent d'attendre le réveil des grandes puissances et défendent les arbres par les armes. En Angleterre, un avocat prouve qu'enfants de victime et de bourreau peuvent faire la paix. Au Sénégal, une famille interpelle les anciens colons et confronte à ses promesses le chef de l'État français.
Ils sont soudés ; ils sont nombreux. Ils donnent envie d'y croire. À Beyrouth, une librairie se mobilise dans les décombres de l'explosion qui a fait plus de 200 morts et 300 000 sans-abri l'été dernier. À l'intérieur, on lit, on boit, on déblaie et on reconstruit. Debout. Debout, comme nos libraires, ici en France. Jouissons du pouvoir de lire encore, de lire ensemble.
Léna Mauger et Marion Quillard
Dossier principal.
UN PEU PLUS PRÈS DES ÉTOILES - Vivre sur Mars, c'est pour demain ou plutôt après demain ?
LE BONHEUR EST DANS LE BUNKER - Aux États-Unis, le mythe de la petite maison dans la prairie s'adapte à notre époque agitée. Avec du béton armé et 100 pieds sous terre.
GRANDEUR NATURE - Loin des grandes villes et de leur tumulte, Brice Portolanoa fait le tour du monde des hommes et des femmes qui ont tiré un trait sur leur vie passée pour - enfin ! - être libres.
Et aussi :
Le témoin : les habitants de Téhéran continuent à se rendre dans les parcs pour se changer les idées ou briser l'isolement lié à l'épidémie.
Le jour où... : Beyrouth a volé en éclats.
Entretien : Jane Evelyn Atwood, un demi-siècle en marge.
Mémoire : dans les archives des prisons ottomanes, miroir de la Turquie d'aujourd'hui.
Récit : Murmures de glaces, aux confins de la Russie - Desperados : le plus grand exode du XXIe siècle est vénézuélien - Romances d'Arabie : aimer dans le royaume saoudien.
Yvresse, Dior Addict, Opium, Obsession... les substances illicites et les discours de dépendance accompagnent depuis longtemps la création de parfums. Pour susciter le désir d'achat et de réachat, les marques et les parfumeurs sont toujours en quête de l'addiction olfactive suprême. Odeurs corporelles ou achats compulsifs de flacons : sentir peut devenir une dépendance sévère.
Si l'odeur de tabac a depuis peu déserté les lieux publics, supplantée par les sillages aromatisés des vapoteuses, parfum et fumée sont à l'origine liés... L'odorat, notamment celui de chiens bien entraînés, est par ailleurs un outil bien utile pour la brigade des stupéfiants. Enfin, que serait notre parfumerie aujourd'hui sans l'invention de la distillation, qui a permis l'usage de l'éthanol ?
LA VIE ET LA MORT.
Depuis le ventre de notre mère où nous percevons déjà les premières odeurs, jusqu'à nos vieilles années, où un sillage oublié peut soudain nous projeter des décennies en arrière, notre nez nous accompagne tout au long de notre vie. Une des premières fonctions de notre odorat est la détection et l'évitement de dangers environnementaux, constituant ainsi un précieux système d'alerte et un instinct de survie à toute épreuve. Par ailleurs, depuis les premières civilisations, les hommes ont entouré leurs morts de parfums, pour préserver les corps de la décomposition et se rapprocher des Dieux. Pas assez rentables, ou passés de mode, les parfums eux aussi peuvent mourir, tout comme les marques, mais renaissent parfois de leurs cendres. Enfin, les parfumeurs, à l'instar des artistes, parviennent-ils à survivre, à travers leur oeuvre et ce qu'ils ont transmis à leurs pairs, une fois disparus ?